Intervention de Carine Vialatte

Réunion du mercredi 15 janvier 2020 à 15h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Carine Vialatte, cheffe du Service national des enquêtes administratives de sécurité :

Dans le domaine des transports, par exemple, nous devons disposer d'un faisceau d'indices significatifs et concordants. Aux termes de l'article L.114-2 du CSI, l'enquête doit préciser si le comportement de la personne donne des raisons sérieuses de penser qu'elle est susceptible, à l'occasion de ses fonctions, de commettre un acte portant gravement atteinte à la sécurité ou à l'ordre publics. Pour motiver un avis d'incompatibilité, il nous faut donc des informations suffisamment précises et étayées, de nature judiciaire ou provenant des services de renseignement.

Il arrive que les services de renseignement ne nous communiquent pas d'informations, soit parce qu'ils n'en ont pas, soit parce qu'ils ne peuvent les transmettre, la cible faisant l'objet d'un suivi très actif. Dans ces très rares cas, la personne est de toute façon prise en compte et une judiciarisation interviendra sous peu.

Le même article prévoit que, dans le cadre d'un recrutement, le SNEAS avise l'employeur du résultat de l'enquête – l'avis n'est, dans ce cas, pas motivé. Si l'enquête a porté sur un salarié en poste, le SNEAS doit remettre un avis motivé à la personne concernée. Celle-ci peut exercer un recours gracieux auprès du service ou contester l'avis devant le tribunal administratif de son domicile.

Nous nous astreignons, en interne, à motiver tous les avis d'incompatibilité. Mais les éléments de motivation ne sont transmis qu'aux autorités administratives ou aux autres services enquêteurs. Les textes encadrant les enquêtes administratives nous défendent de les communiquer aux demandeurs – transporteur, organisateur d'événement –, à qui nous ne donnons que le sens de l'avis.

Dans le domaine des transports, trois recours contentieux ont été formés par des salariés de la RATP, à la suite d'une mauvaise application du texte par leur employeur. En effet, l'article L.114-2 du CSI prévoit deux régimes juridiques, selon que l'enquête est préalable au recrutement ou au changement d'affectation en interne, ou qu'elle porte sur un salarié déjà en poste. La RATP nous ayant sollicités sur des candidats au recrutement, nous avons avisé l'employeur du résultat de l'enquête, sans le notifier aux personnes concernées. Or, entre-temps, la RATP avait recruté ces personnes et elle les a licenciées sur la base de cet avis. Les ex-salariés ont donc sollicité du ministère de l'Intérieur l'avis motivé, qui n'existe pas dans ce cadre d'enquête. Le Conseil d'État est saisi pour avis.

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