Notre mission a évolué au fil du temps, et nos outils aussi. Ce qui était à l'origine le CIPD comptait six agents. Nous allons passer à une quarantaine : il y a une montée en puissance qui est assurée grâce à des moyens supplémentaires. Le fonds interministériel de prévention de la délinquance a été renforcé, et nous avons pu augmenter le niveau de notre intervention.
Nous sommes vraiment montés en puissance en ce qui concerne la radicalisation. Muriel Domenach, qui a dirigé le SG-CIPDR avant moi, s'est engagée dans ce travail. J'estime que nous avons aujourd'hui les outils pour intervenir dans le format de coordination et d'animation qui est le nôtre, même si on peut toujours l'améliorer, le développer.
S'agissant du lien entre la délinquance et la radicalisation, nous travaillons notamment avec le monde universitaire – il existe un conseil scientifique sur les processus de radicalisation – pour essayer d'affiner l'approche. J'observe qu'il n'y a pas de superposition complète entre la criminalité organisée et la radicalisation. Ce ne sont pas les mêmes domaines, les mêmes mondes. En revanche, il y a naturellement des porosités. Les parcours individuels sont bien souvent marqués par un passage dans la délinquance de droit commun avant le basculement dans la radicalisation. Nous avons tous en tête Mohamed Merah et Cherif Chekatt, auteur de l'attentat de Strasbourg.
Le retour d'expérience a montré, dans le dernier cas que je viens de citer, qu'il faut vraiment travailler sur la prise en charge individuelle. Plusieurs services se sont occupés de Chekatt, en particulier l'aide sociale à l'enfance (ASE) et la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), il a vu de nombreux médecins et psychologues, mais il n'a jamais fait l'objet d'une prise en charge complète. Ce que l'on essaie de faire, notamment dans le cadre des CPRAF, c'est de porter vraiment une attention tout à fait particulière aux personnes qui sont déjà connues pour des faits de délinquance et qui présentent des signes de risque de basculement dans la radicalisation : cela fait partie des publics prioritaires en matière de prise en charge. On a demandé aux préfets de renforcer autant que possible le dispositif. S'il y a déjà une radicalisation et un risque de passage à l'acte violent, la prise en charge est assurée par d'autres services, mais les préfets doivent être attentifs aux premiers signes.
Vous verrez que la stratégie nationale de prévention de la délinquance, qui va être publiée dans les prochains jours, prévoit des mesures de vigilance visant à assurer la prise en charge des jeunes qui ont des profils de délinquants et qui présentent des signes de risque de radicalisation. On a demandé aux préfets de porter une attention toute particulière, dans le cadre des CPRAF et des GED, à ces personnes qui ont déjà un passé judiciaire.