Intervention de Bernard Squarcini

Réunion du mardi 28 janvier 2020 à 17h00
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Bernard Squarcini, ancien directeur central du renseignement intérieur :

Oui, très certainement. Un service de renseignement est aussi un service de sécurité. Il doit donc lutter également contre le contre-espionnage et l'infiltration par les services étatiques adverses – même si, en l'espèce, il s'agit d'une infiltration individuelle ayant un fondement religieux. Comme je le disais, nous avons adopté un double système de sécurité : tout d'abord, une habilitation secret défense, qui est le lot commun. Auparavant, nous avions une liste d'habilitations beaucoup plus longue, en fonction du niveau de circulation et d'intérêt des textes classifiés se retrouvant entre les mains de l'agent : spécial OTAN – Organisation du traité de l'Atlantique nord –, très secret défense, diamant, etc. Les habilitations concernent tous les agents, pas uniquement les directeurs ou les officiers : cela va de la secrétaire au chauffeur qui porte les plis. Toute la chaîne opérationnelle est concernée. Nous disposons en outre d'une habilitation discrétionnaire, qui fait la force du service : chaque fois qu'un doute ou qu'une vulnérabilité émerge, le fonctionnaire concerné est remis à la disposition de la DGPN. Certes, d'une certaine façon, on se repasse le mistigri, car il est affecté dans un autre service, mais, au moins, il n'est plus en contact avec un domaine très sensible.

Le domaine du contre-espionnage est le plus sécurisé. Il est anormal que votre voisin de bureau ou du service d'à côté vous interroge sur ce que vous faites, car il n'a pas à en connaître. En effet, même si vous êtes habilité, vous devez avoir aussi le « besoin d'en connaître », selon la formule consacrée, et ceux qui ne l'ont pas se placent dans une situation créant le doute. Comment ce doute est-il levé ? Le service de sécurité – à l'insu de l'agent concerné, bien sûr – vérifie son bureau, ses fadettes, ou encore ses comptes bancaires, à la recherche d'un élément qui serait passé inaperçu. Le niveau de contrôle est très élevé ; c'est le prix à payer. L'ultime solution est d'engager une procédure judiciaire pour compromission du secret de la défense nationale, trahison, intelligence avec l'ennemi. Pour résumer, nous avons un système administratif qui est doublé par un autre système administratif, lui-même complété par un système judiciaire.

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