Le SNEAS a été créé par un décret du 27 avril 2017. Cet outil monte fortement en puissance et est chargé précisément de renseigner sur des recrutements à venir, sur la base d'informations dont nous avons connaissance par nos différents outils. Cela ne concerne pas que le secteur public : j'évoquais les métiers du transport, mais les agents de sécurité privée font aussi l'objet d'enquêtes sous le contrôle du SNEAS.
Tous les métiers de la sécurité font l'objet d'enquêtes. Et un débat politique est posé pour savoir jusqu'où doit aller ce criblage. Ce débat vous appartient.
Le Gouvernement ne considère pas qu'il faille cribler la totalité de la société française et la totalité des métiers. Mais la radicalisation peut aussi se manifester dans l'Éducation nationale. C'est un sujet qui a été souvent abordé. Il y a peut-être moins de risques globaux pour un enseignant que pour un pilote dans une centrale nucléaire, mais il y a bien un risque majeur si un enseignant déroge au cadre de l'Éducation nationale. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle cette dernière a formé en son sein des agents chargés de la lutte contre la radicalisation et d'identifier les différentes personnes en risque de radicalisation.
Au total, 409 000 enquêtes administratives ont été menées par le SNEAS en 2019. Ce chiffre va plus que doubler en 2020 compte tenu de l'élargissement du champ que vous avez décidé. Et il est nécessaire que nous renforcions les moyens de ce service. Nous doublons d'ailleurs presque ses effectifs, que j'ai installés dans de nouveaux locaux pour qu'ils puissent travailler dans de bonnes conditions.
Ce service rassemble des agents qui viennent de la police, de la gendarmerie nationale, et de la DGSI. Puis des recrutements directs sont opérés, avec plusieurs niveaux d'enquête, dans un cadre piloté par le SGDSN. Il est nécessaire en effet d'avoir une méthodologie partagée par tous.
La question est de savoir comment mieux cribler. Mais je ne suis pas favorable, je le dis, à un criblage systématique. La société de la vigilance n'est pas forcément celle du contrôle systématique de tous.
Vous avez évoqué ensuite l'accompagnement social – si je peux le réduire ainsi – d'une personne dont on considère qu'elle présenterait des signes de radicalisation. Votre propos, que je fais mien, consiste en un sens à considérer qu'une radicalisation est une forme de désespérance personnelle survenue dans un parcours, et qu'il convient de traiter. Et je pense qu'il faut l'envisager comme vous le faites.
Si cette situation implique d'un côté des mesures administratives immédiates – de déplacement, de sanction, de retrait d'agrément, etc. –, il faut aussi prendre en compte cette dimension humaine. Et je crois que les services de la police ont des services sociaux capables d'accompagner les personnes concernées.
Il me semble indispensable de lier les deux dimensions. D'un point de vue humain, fraternel, votre question est totalement pertinente. Je ne suis pas sûr que cette approche soit automatique, et je vous remercie d'avoir soulevé ce point. Je pense que j'aurai l'occasion de relayer cette double approche.
Se pose également la question du rapport avec les collectivités locales. Il me semble indispensable de renforcer notre niveau d'échanges, car c'est bien la question. Certains maires et certaines associations d'élus ont contribué aux travaux du Livre blanc en proposant par exemple que les maires soient systématiquement informés, nominativement, de l'identité de tous leurs administrés inscrits au FSPRT. Ce n'est pas la position que je défends, pour ce qui me concerne.
En revanche, dès le mois de novembre 2018, à ma prise de fonction, j'ai fait paraître une circulaire visant à améliorer la relation et la circulation des informations entre les préfets et les collectivités locales. Cela implique de signer une charte de confidentialité. Au moment où je vous parle, 150 chartes ont été signées pour 271 communes.
Cette charte permet aux préfets de donner des informations sur des recrutements susceptibles d'être effectués dans certains services considérés comme à risque – liés à l'enfance, par exemple – ainsi que des informations générales sur un risque avéré, à un moment donné, dans une commune donnée, ou sur le volume global de personnes suivies dans le cadre de nos services au sens large.
Nous ne sommes donc pas dans une transparence totale vis-à-vis des maires. Je pense qu'une telle transparence n'est pas nécessaire, et que les maires comme leurs services n'ont pas forcément vocation à connaître certains sujets relevant du judiciaire. Mais je suis partisan d'aller le plus loin possible dans cette communication et dans cette information.
J'ai noté que de nombreux maires n'étaient pas informés de l'existence du dispositif introduit par la circulaire de 2018. J'ai donc demandé récemment aux préfets de le relancer, et de faire en sorte que, dès l'installation des nouvelles municipalités ou la reconduction des municipalités existantes, l'existence de cette circulaire soit signalée aux maires et le dispositif proposé.