Intervention de Christophe Castaner

Réunion du jeudi 5 mars 2020 à 11h00
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Christophe Castaner, ministre de l'Intérieur :

Le débat sur la démarche asymétrique a eu lieu au moment de la loi SILT. Il est nécessaire en certains cas de pouvoir porter à la connaissance d'un magistrat des éléments n'ayant pas vocation à être tracés dans le dossier car, quand on fait la transparence totale sur une procédure, on informe nos adversaires.

Je prendrai un exemple. Nous devons rendre compte dans la procédure de toutes les techniques utilisées dans la lutte contre le trafic de drogue. Nous avons parlé récemment d'une très belle saisine de 3,2 tonnes de cocaïne, représentant un enjeu de 230 millions d'euros. Or lorsqu'une très belle opération de ce type se présente, la loi, que vous avez votée – le « vous » étant collectif –, impose que la totalité des techniques utilisées par nos services apparaisse dans le dossier.

Or nous savons qu'un certain nombre d'acteurs ont accès au dossier et peuvent parfaitement relayer le fait que, sur tel conteneur, telle technique a été employée. Nous donnons donc des informations à nos adversaires. Et, au fond, nous nous privons de moyens.

Quand on est au ministère de l'Intérieur, quand on est engagé dans ces dossiers, on connait les vertus du système asymétrique.

Je ne réponds pas à votre question de savoir s'il faut une chambre spécialisée sur ces sujets. Mais je pense qu'en matière de lutte contre la radicalisation et de lutte contre le terrorisme il faut assumer une transparence totale à l'égard de la justice, qui doit pouvoir jouer son rôle et sanctionner une dérive administrative, tout en veillant à ce que cela puisse se faire sans fragiliser notre système de renseignement.

Les cas que nous avons souhaité écarter et sur lesquels des procédures ont été engagées ont été assez peu nombreux. J'ai connaissance d'un cas pour lequel la décision a été cassée ensuite par les juridictions. C'est un vrai problème, car il faut réaffecter la personne concernée – pas forcément à la même place, et pas forcément dans le même service. Généralement, j'imagine qu'elle est vouée à un placard. Mais il n'empêche que cette personne continuera à être payée pour des missions qui ne sont pas celles pour lesquelles elle avait été engagée initialement.

J'entends dans votre question une suggestion, une proposition. Et je vous le dis : la démarche asymétrique est une démarche dans laquelle le ministère de l'Intérieur et nos forces de sécurité intérieure assument la transparence de ce qu'ils font, mais cette transparence doit se faire sous le contrôle d'une autorité judiciaire ou d'un juge administratif, et ne pas forcément conduire à porter des informations à la connaissance d'acteurs qui n'hésiteraient pas à les utiliser pour les détourner ensuite.

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