Intervention de Olivier Toma

Réunion du jeudi 24 septembre 2020 à 9h30
Commission d'enquête sur l'évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Olivier Toma, porte-parole du Comité pour le développement durable en santé :

Notre définition de la santé environnementale est celle de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). La santé environnementale comprend les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux et psychosociaux de notre environnement. Cette définition accorde également une place à la prévention des facteurs environnementaux susceptibles d'affecter la santé des générations actuelles et futures.

Votre deuxième question porte sur les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, que je regrouperai sous le terme générique d'hôpital. Le rôle de l'hôpital est majeur dans notre pays : il assure la prise en charge de la santé humaine et de la dépendance. L'hôpital doit être exemplaire et il doit avoir les compétences et les moyens de garantir la santé d'aujourd'hui et la santé de demain. Mettre la santé au cœur de l'économie, par exemple, permettrait certainement à cet égard d'obtenir demain de meilleurs résultats qu'aujourd'hui, comme nous le voyons avec la crise de la covid-19.

L'hôpital est très engagé puisque, en dix ans, de nettes évolutions ont eu lieu, surtout dans certaines régions. Pour être efficace, il faut avoir le soutien des agences régionales de santé (ARS). Les différentes agences régionales de santé en France n'ont pas le même niveau d'engagement, puisqu'il n'existe pas de pilote national du PNSE. Cela dépend donc des directions des agences régionales. En particulier, les ARS de Nouvelle-Aquitaine, de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) et d'Occitanie sont les trois ARS les plus engagées dans le pays, et même en Europe. Il n'existe nulle part en Europe l'équivalent de ce qui a été fait dans ces trois régions.

Ainsi, en PACA, 170 établissements de santé sont accompagnés par l'agence régionale de santé pour les faire monter en compétence sur la santé environnementale et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Dans d'autres régions, on ne retrouve pas du tout ce niveau d'engagement, puisqu'il faut piloter ce qui se passe sur le terrain et avoir des moyens. Cela dépend donc des régions, en fonction de l'engagement d'un directeur ou d'une directrice d'agence régionale de santé.

Vous faites bien de souligner notre statut. Le C2DS est une association, et je m'occupe aussi, professionnellement, d'une agence d'experts. J'ai créé avec 25 collaborateurs une agence, dans laquelle j'ai embauché des ingénieurs et des professionnels de santé, qui fait de l'accompagnement de stratégie RSE auprès des établissements de santé.

Lorsque nous intervenons auprès des ministères, de la DGCCRF ou de toute entité publique ou représentant de l'État, nous nous adressons à eux avec toute la dynamique du C2DS et, en plus, avec celle de notre société, qui est une société à mission. J'insiste sur ce point. La loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE) a créé le statut de société à mission. Une telle société détermine des objectifs et une raison d'être, que reflètent ses statuts. Ce statut est, comme celui d'association créé en 1901, une importante étape. Pourtant, aujourd'hui, ces sociétés à mission ne sont pas reconnues. L'État a créé la loi mais n'a pas créé le référentiel des sociétés à mission, et nous ne sommes pas capables d'évaluer réellement une société à mission. Ce n'est pas sérieux, et il n'est pas sérieux non plus de ne pas nous répondre parce que nous avons un statut qui ne plairait pas aux autorités.

Je suis choqué que lorsque des citoyens, associations ou entreprises s'adressent à des institutions comme les ministères chargés de la santé ou de l'environnement ou la DGCCRF pour lancer une alerte, par exemple, sur le fait que les laits artificiels donnés aux nouveau-nés français comportent des perturbateurs endocriniens ou des nanoparticules de dioxyde de titane, nous n'obtenions jamais de réponse. Je ne le comprends pas et je pense même que, dès lors que nous avons conscience de cela, c'est une faute grave de ne pas répondre. L'exposition des nouveau-nés à des perturbateurs endocriniens, six à sept fois par jour, via leur alimentation, leurs couches ou les cosmétiques appliqués sur leur peau est un fait grave. Il ne me paraît pas cohérent que ces entités ne répondent pas à nos sollicitations sur un tel sujet, et c'est d'autant plus inacceptable si elles se fondent sur le caractère inhabituel de notre statut pour ne pas répondre.

Je ne le comprends pas et personne ne le comprend dans notre entourage. Je ne suis pas le porte-parole de toutes les institutions françaises mais je travaille avec beaucoup de praticiens, de médecins, de sociétés savantes ou de fédérations professionnelles. Ils n'ont pas plus de réponses. Nous n'avons aucune réponse aux questions que nous nous posons. Je vous donne un exemple qui date de cet été. Nous sommes actuellement face à une crise qui engendre des milliers de tonnes de déchets, notamment les masques jetables à usage unique. Comment est-il possible de ne pas promouvoir des masques lavables, écoconçus, biosourcés, répondant aux normes de l'Association française de normalisation (AFNOR) ? Pendant la crise de la covid-19, nous avons même reçu des directives selon lesquelles les établissements de santé français pouvaient stocker des déchets infectieux puisque les prestataires de déchets d'activité de soin à risque infectieux (DASRI) étaient complètement saturés. Là non plus, ce n'est pas raisonnable. Nous n'avons pas de réponse à ces ambiguïtés. J'ai sollicité quantité d'institutions en demandant : pouvez-vous clarifier les faits sur le masque chirurgical, sur le masque grand public ? Nous n'avons aucune réponse.

Il est important, par le biais de cette commission que vous animez, d'essayer de comprendre pourquoi nous n'avons ni interlocuteur ni réponse face à ces problématiques complexes, face à ces acteurs du terrain qui s'engagent sur ces sujets. Pourtant, la politique de santé environnementale du PNSE déclinée grâce aux plans régionaux (PRSE) est parfaite. Nous sommes le seul pays d'Europe à avoir une telle politique. Même les Canadiens sont bien moins avancés que nous sur la santé environnementale.

Je le redis, nous avons d'un côté une politique bien établie et, de l'autre côté, une absence de pilotage, de moyens et de structuration. Je trouve dommage que des actions exemplaires comme celles qui existent en Nouvelle-Aquitaine ne soient pas dupliquées dans toutes les régions. La Nouvelle-Aquitaine a une stratégie extraordinaire pour la petite enfance qui est très vulnérable face à ces risques environnementaux. Comment est-il possible d'avoir une telle perte de chance selon que l'on est mère en Nouvelle-Aquitaine ou en Île-de-France ? Les informations et les préventions auxquelles ces mères ont accès ne sont pas les mêmes, ce n'est pas cohérent. Je pense qu'il faut restructurer et avoir des pilotes dûment désignés.

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