Intervention de Olivier Toma

Réunion du jeudi 24 septembre 2020 à 9h30
Commission d'enquête sur l'évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Olivier Toma, porte-parole du Comité pour le développement durable en santé :

Ce sont des questions très difficiles. Ma réponse ne peut être que très polémique mais, puisque je suis ici, autant que cela serve à nourrir le débat.

Je pense que, sur ces sujets, une solution intéressante serait la fusion des ministères chargés de la santé et de l'environnement. Nous en sommes loin, mais nous voyons bien que toutes les décisions prises nécessitent une analyse bénéfices-risques. Par exemple, la réduction de la vitesse sur les routes peut être expliquée de deux façons : soit en faisant comprendre aux automobilistes, en mettant des radars partout, qu'ils sont des vaches à lait et paieront des amendes, soit en expliquant, comme des médecins me l'ont dit – et cela a changé mon attitude au volant – que réduire de 30 % la vitesse dans les agglomérations et autour des agglomérations permet de réduire les particules fines, et que cela réduit de 30 % les maladies cardiovasculaires. C'est ce qu'il faut expliquer, mais ce n'est jamais expliqué.

Il faut donc une transversalité dans les politiques publiques et il faut que les acteurs se parlent. J'entends bien qu'une véritable fusion entre les deux ministères ne sera jamais possible, parce que trop d'intérêts et trop d'egos sont en jeu. Peut-être faut-il investir dans une agence ou un guichet unique pour traiter ces sujets. Ce guichet unique pourrait aussi servir d'agence de recherche et développement en santé, ce qui n'existe pas. Il est étonnant que toutes les actions sur le terrain qui engendrent des résultats ne soient pas évaluées, que nous ne parvenions pas à faire ce travail de recherche et développement. Il faut certainement, en termes de gouvernance, regrouper des agences pour réussir à travailler de façon transversale.

J'en viens à l'échelon territorial. Comme je l'ai expliqué tout à l'heure, la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) est très structurante pour les sociétés. Elle permet aux organisations de définir leur raison d'être, d'avoir des objectifs et de faire en sorte que ces objectifs soient contrôlés par un tiers indépendant. Si ces dispositions sont bien appliquées, elles verront la fin de l'éco-blanchiment (« greenwashing ») dans notre pays. En ce qui concerne les territoires, nous prévoyons de faire une opération pilote à Montpellier fondée sur l'idée du territoire à mission, une adaptation de la dynamique de société à mission. Il s'agit de regrouper des acteurs – associations, collectivités, entreprises, citoyens – et de définir un objectif commun, de façon à ce que toutes les organisations y travaillent en commun. Nous n'avons pas encore les financements mais nous avons déjà quelques pistes, et j'ai rencontré le maire de Montpellier vendredi dernier. Nous proposerons, dans ce territoire à mission, de mener une action sur la qualité de l'air intérieur, et de supprimer les perturbateurs endocriniens dans les organisations impliquées.

Cela signifie de mutualiser les bonnes pratiques. C'est donc positif en termes de coûts, puisque lorsque nous avons réussi à le faire dans une structure, toutes les autres en bénéficient. Nous avons déjà prévu une plateforme pour mutualiser les données entre les différents territoires. Cela se fait sans l'État ; c'est le terrain qui s'organise. Le problème de fond est que cela sera long et compliqué puisque nous n'avons pas de moyens. Mais cela ne demande que peu de moyens. Un territoire à mission demande deux équivalents temps plein (ETP), ce qui vous donne une idée du budget. Ce n'est rien du tout ; je ne parle pas de créer des agences avec de nombreux effectifs. Il s'agit juste d'avoir des personnes qui identifient les bonnes pratiques, les cartographient, les mutualisent et que nous puissions échanger au niveau des territoires pour le mettre en œuvre.

Je propose donc, pour la gouvernance au niveau national, un guichet unique et un pilote unique. Au niveau des territoires, lançons une expérimentation, sur la logique des territoires à mission, pour que toutes ces actions mises en œuvre sur le terrain puissent bénéficier au plus grand nombre. Ne comptons pas que sur l'État pour le faire. Appuyons-nous sur les acteurs engagés dans les territoires et sur la société civile. Je prends un exemple : ce soir, nous animons à Béziers une réunion avec une vingtaine d'entreprises qui veulent s'engager dans l'amélioration de la qualité de l'air intérieur de leur organisation pour protéger leurs clients et leurs collaborateurs. Nous leur donnerons ce soir les outils pour protéger la santé de leurs parties prenantes. Nous mesurerons la réduction des impacts dans un an. Une fois que c'est fait dans un endroit, nous le donnons ensuite pour le dupliquer à un autre endroit. Il suffit d'avoir les moyens de coordonner ces actions.

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