L'UIPP, créée en 1918, est une association professionnelle qui rassemble les entreprises qui mettent sur le marché des produits phytopharmaceutiques à usage agricole. Comme vous l'avez mentionné, Madame la Présidente, ce périmètre est encadré à la fois par le code rural et le règlement n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009.
L'UIPP compte dix-neuf entreprises adhérentes qui représentent, en valeur, 96 % du secteur de la protection des plantes. Celui-ci emploie environ 5 500 salariés en France, dans diverses fonctions de production, puisqu'il existe des sites de production en France et des fonctions d'encadrement pour les besoins du monde agricole. Comme notre activité concerne le secteur de la chimie pour le domaine agricole, nous sommes affiliés à l'organisation professionnelle des entreprises de la chimie France Chimie. Nous sommes également membres de l'Association européenne pour la protection des cultures (ECPA), qui représente le secteur auprès de la Commission européenne et du Parlement européen. Douze des dix-neuf membres de l'UIPP sont également adhérents à l'Association internationale des fabricants de biocontrôle (IBMA). L'UIPP a une équipe de dix personnes et un réseau constitué d'experts des entreprises qui contribuent à la vie de l'association sur des sujets techniques.
Il existe en France vingt sites de production dans le secteur, et c'est un secteur qui consacre 10 % de son chiffre d'affaires à la recherche et à l'innovation, ce qui s'explique par le fait que l'agriculture est en perpétuelle évolution, au niveau mondial, européen ou français, en réponse aux évolutions qui surviennent sur différents marchés. Nos produits sont destinés à tout type d'agriculture. Ainsi, plus de 40 % des produits utilisables dans l'agriculture biologique proviennent en France des adhérents de l'UIPP. Dans le champ du biocontrôle, dont la France est le seul pays à avoir donné une définition légale, plus de la moitié des produits proviennent de nos adhérents. Les entreprises du secteur adoptent de plus en plus une approche combinatoire d'éléments associant la chimie naturelle, la chimie de synthèse et les produits de biocontrôle. Elles adoptent également des outils numériques qui permettent de remplacer des produits ou d'améliorer les traitements avec des produits plus anciens.
Nous sommes très intéressés par la démarche « une seule santé », mise en avant par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), et nous portons cette approche, qui a du sens face aux enjeux planétaires. La santé humaine et la santé animale sont très liées, et la santé du végétal est un socle, puisque le végétal fournit des aliments aux animaux et aux humains. Face aux enjeux démographiques, la FAO estime qu'il faut continuer à augmenter la production agricole pour accompagner les besoins des populations. La dimension globale de la démarche « une seule santé » nous semble importante, et c'est aussi la dimension qu'il faut donner aux investissements et à l'offre d'innovation. La santé des plantes en est un maillon à part entière.
Nous avons en tête un grand nombre d'exemples sur le lien entre santés humaine et animale, comme nous le rappelle malheureusement l'épidémie actuelle, mais le phénomène est le même avec les végétaux. Nous faisons face à une augmentation de l'impact qu'ont, globalement, les bioagresseurs, c'est-à-dire les maladies des plantes, les insectes ravageurs et les mauvaises herbes. La FAO estime que, sans solution phytosanitaire de protection des plantes, environ 40 % des récoltes sont perdues au niveau mondial : l'impact des bioagresseurs sur l'offre alimentaire est donc très important.
Quant aux maladies des plantes, il n'en existe pas qui soit directement liée à la santé humaine, mais le fait que les plantes soient attaquées par des champignons peut déclencher des problèmes de toxicité. Nous avons tous en tête le cas de l'ergot, de la patuline, des fusarioses qui induisent des mycotoxines pouvant affecter la santé humaine. Cela doit être suivi, tout comme la présence de plantes toxiques telles que le datura ou la morelle qui sont une préoccupation importante dans la chaîne alimentaire.
L'impact du réchauffement climatique sur les activités agricoles est majeur. Les phénomènes climatiques actuels favorisent la progression de maladies ou d'insectes, comme l'augmentation accélérée des populations de ravageurs, ainsi que leur installation à des endroits de la planète où ils n'étaient pas présents et leur développement. Ces signaux nous montrent qu'il nous faut accentuer la surveillance.
L'approche privilégiée est de plus en plus combinatoire, avec des éléments de solution provenant de produits phytopharmaceutiques, ainsi que le développement de l'agriculture numérique, qui fait l'objet d'investissements importants. D'autres éléments importants se trouvent dans la boîte à outils dont dispose l'agriculteur : le raisonnement agronomique, ou encore les variétés résistantes. Nous avons ainsi un ensemble de solutions.
Le secteur phytopharmaceutique est très encadré au niveau réglementaire, par le biais des autorisations de mise sur le marché (AMM). En France, l'AMM date de 1948 et a fait l'objet d'un certain nombre de lois. Au niveau européen, le secteur est encadré par une directive de 1991 et un règlement de 2009 qui fait partie du paquet sur les pesticides. La délivrance des AMM se fait au niveau national, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) ayant un rôle important qui a été renforcé en 2015. Depuis 2015, en plus d'évaluer les conséquences des produits sur la santé humaine des utilisateurs, des riverains, des promeneurs et des consommateurs et sur la biodiversité, l'ANSES délivre aussi les autorisations de mise sur le marché.
Les principes de base n'ont pas trop évolué : l'innocuité est contrôlée, les risques devant être maîtrisés avant la mise sur le marché. Le service agronomique rendu, c'est-à-dire l'efficacité et l'utilité du produit, doit être démontré. Un produit arrive sur le marché uniquement si ces deux principes sont respectés, après une phase d'évaluation très complète. En moyenne, il s'écoule plus de dix ans entre le moment où des propriétés sont observées en laboratoire et le moment où le produit arrive, formulé à la vente, pour les utilisateurs professionnels, dont les agriculteurs.
L'encadrement de la mise sur le marché est réalisé par le règlement n° 1107/2009 déjà mentionné. L'Europe s'est également dotée, par la directive-cadre qui fait partie du paquet sur les pesticides, d'éléments qui concernent l'utilisation des produits en vue d'une harmonisation de la réduction des risques et des impacts. Cette directive contient des éléments sur lesquels les Français ont été précurseurs, tels que le contrôle des pulvérisations, la mise en place de plans nationaux comme Écophyto, plan exigé par cette directive, la formation, la mise en place de bandes tampons, etc.
Vient s'ajouter à ces dispositifs la phytopharmacovigilance, que la France est la première à mettre en place. Comme pour la pharmacovigilance humaine ou animale, un dispositif robuste est coordonné par l'ANSES. Il recense toutes les données provenant des différents organismes pour assurer la surveillance des milieux, des impacts sur la santé et l'environnement. Les AMM étant renouvelées tous les dix ans, une nouvelle phase de réévaluation est réalisée à chaque fois que les substances et les produits sont en cours de renouvellement d'AMM. Les éléments de phytopharmacovigilance sont intégrés dans cette évaluation. Lorsque des éléments ont été constatés lors de l'application ou de l'utilisation normale de ces produits par les utilisateurs, nous pouvons les prendre en compte et l'agence les intègre dans son processus de réévaluation. C'est pour nous un processus important, et la responsabilité des entreprises ne s'arrête donc pas au moment où les AMM sont délivrées.
L'association rassemble des projets en ce qui concerne le domaine non concurrentiel : sécurité des applicateurs, délivrance et préconisations de bonnes pratiques, gestion des déchets avec la société anonyme Agriculteurs, distributeurs, industriels pour la valorisation des déchets agricoles (ADIVALOR). Nous avons été pionniers sur les emballages des produits phytosanitaires, et ce dispositif s'applique maintenant à tout type de déchet sur les exploitations, que ce soient des emballages de produits, de semences ou d'engrais.
Nous avons travaillé sur l'agriculture raisonnée et produit des formations avant même que la directive de 2009 intègre des obligations de formation. Depuis les années 2010, nous avons mis l'accent sur la réduction des risques et des impacts avec des campagnes pour les équipements de protection individuelle (EPI), des démonstrations de pratiques agricoles et la création de guides sur les étiquettes. Ces actions vont dans le sens de la cohérence avec le paquet sur les pesticides. Si l'évaluation du produit conduit à une précision sur les conditions d'emploi indiquées sur l'étiquette, il est de la responsabilité des entreprises de s'assurer que les utilisateurs professionnels se sont bien appropriés le fait. Les entreprises doivent aussi être capables de traiter toute donnée de santé ou d'environnement pour améliorer le profil des produits et leur application.
Nous avons commencé à collecter des statistiques sur les tonnages de matières actives utilisées en France avant même la mise en place de la base nationale des données de vente (BNDV), qui est la base de référence aujourd'hui notamment pour Écophyto. Nous voyons une baisse importante des tonnages de matières actives depuis le début des années 2000, avec une réduction de plus de 40 %. La part des substances actives utilisables en agriculture biologique est en augmentation, sans surprise, puisque des politiques incitent au développement des surfaces en agriculture biologique. La part de l'agriculture biologique atteint maintenant presque 30 % des substances actives, et le biocontrôle progresse aussi, jusqu'à atteindre 23 % des substances actives, tandis que la part du conventionnel diminue. Cette évolution est tout à fait logique compte tenu des politiques publiques qui encouragent l'agriculture biologique et le biocontrôle. C'est l'un des axes du plan Écophyto et de la feuille de route du Gouvernement.
Notre secteur est totalement encadré par des politiques européennes. Nous sommes très attentifs aux évolutions de la réglementation qui nous concerne et plus largement à la stratégie « De la fourche à la fourchette » et au pacte vert pour l'Europe. Nous souhaitons être partie prenante des solutions apportées au niveau européen. Notre association européenne, l'ECPA, a communiqué voici un peu moins d'un mois sur trois types d'engagements.
Je souhaitais souligner cet aspect combinatoire car les enjeux de santé végétale sont très prégnants et le seront peut-être demain encore davantage. Nous réaffirmons notre capacité à apporter une partie des solutions dont a besoin le monde agricole pour continuer à produire en qualité et en quantité tout en respectant les cadres de la protection de l'environnement et de la santé humaine.