Intervention de Stéphane Mulliez

Réunion du mercredi 28 octobre 2020 à 14h00
Commission d'enquête sur l'évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Stéphane Mulliez, directeur général de l'ARS de Bretagne :

Anne Serre et moi-même allons rappeler la situation bretonne en matière de santé. L'espérance de vie en Bretagne est un peu inférieure à la moyenne nationale, notamment parce que nous avons une surmortalité importante. Nous nous situons au douzième rang sur treize pour la mortalité toutes causes confondues, respectivement au douzième rang pour les hommes et au dixième rang pour les femmes. Une prévalence du cancer et une surmortalité afférente sont observées en Bretagne, en particulier pour les cancers de la prostate et du poumon chez l'homme. Par ailleurs, nous constatons des taux plus élevés dans le nord et dans l'ouest de la région.

En matière d'indicateurs de santé publique, nous avons généralement un gradient est-ouest au détriment de l'ouest, et plus particulièrement du nord-ouest, de notre région. Par rapport à certains cancers et notamment les cancers du poumon, l'incidence régionale apparaît plus importante. Autre indicateur de santé, le mélanome provoque environ 120 décès par an dans notre région, soit une surmortalité régionale de 20 %, avec un fort gradient est-ouest, au détriment de l'ouest de la région.

Nous sommes également exposés aux maladies cardio-vasculaires, avec une particularité : elles sont la première cause de mortalité féminine en Bretagne. C'est un point que je souhaite souligner.

Le dernier indicateur de santé péjoratif pour notre région concerne les suicides. La Bretagne reste malheureusement la région française la plus touchée. Même si le taux en a diminué depuis 2000, il reste néanmoins bien supérieur à la moyenne nationale.

Si nous avons des indicateurs de santé plus positifs, notamment ceux relatifs au diabète et l'obésité, de nombreux indicateurs de santé sont péjoratifs, généralement ou fréquemment liés à l'ensemble des déterminants de la santé, que ceux-ci soient sociaux, comportementaux ou environnementaux. C'est ce qui anime l'action de l'agence régionale de santé et ses équipes, avec d'autres partenaires. Ce n'est pas une originalité absolue de notre région, mais il s'agit d'un principe très structurant de notre projet régional de santé qui a été adopté en 2018 : nous nous sommes donné l'ambition de travailler en premier lieu sur les déterminants de santé. Parmi ceux-ci figurent l'ensemble des déterminants en matière de santé-environnement.

En ce domaine, la Bretagne est entourée de mers et le littoral breton s'étend sur plus de 1 700 kilomètres. 76 % du territoire de la région est granitique. Enfin, elle n'est pas très industrielle, mais le secteur agricole et le secteur agroalimentaire représentent un poids fort. Cette description très succincte de la géographie et des activités de la région Bretagne représente des enjeux très importants en matière de santé-environnement. La question du littoral et des eaux entraîne de forts enjeux, avec les eaux de baignade. Les sols granitiques engendrent de forts enjeux en ce qui concerne la qualité de l'air, notamment l'air des habitats, en raison du radon, induisant des facteurs de risque importants pour la santé des populations. S'agissant de la qualité des eaux, je précise qu'une bonne partie d'entre elles vient des rivières. Pour l'eau de consommation humaine, le défi est important pour la gestion des politiques de santé-environnement de notre région. Enfin, relativement aux enjeux agricoles, nous avons une série de pressions sur lesquelles l'agence travaille, avec l'ensemble de ses partenaires.

Ces enjeux forts en matière de santé-environnement, mais aussi peut-être le travail que nous accomplissons, depuis la création de l'agence régionale de santé, vis-à-vis des populations, font que nous pouvons considérer la population bretonne comme sensibilisée. Nous le mesurons à échéances régulières – tous les sept ans environ – dans un baromètre santé-environnement. Lors de la dernière mesure, en 2015, sept Bretons sur dix se sentaient concernés par les enjeux environnementaux. Nous produisons aussi tous les ans un tableau de bord santé-environnement – qui concerne notamment le cadre de vie et la santé, le logement, les enjeux climatiques, les enjeux de l'air, les enjeux de santé au travail – et cela participe peut-être de la sensibilisation des populations bretonnes aux enjeux de santé-environnement. Ce tableau de bord présente tous les ans des indicateurs chiffrés sur les évolutions de ces différents enjeux de santé publique et de santé environnementale.

Pour nous concentrer plus spécifiquement sur l'agence régionale de santé et son action par rapport à l'ensemble de ces enjeux de santé-environnement, notre travail en la matière s'inscrit dans un axe classique :

– de veille et de sécurité sanitaires, ainsi que de gestion de l'ensemble des alertes et des signaux qui parviennent à l'agence régionale de santé ;

– de surveillance des milieux, et notamment de contrôle sanitaire des eaux – tant les eaux de loisirs et de baignade que les eaux de consommation humaine ;

– de délivrance d'avis en matière d'urbanisme, pour mesurer les impacts sanitaires potentiels de projets ;

– de différentes actions d'inspection et de contrôle ;

– de gestion des signaux sanitaires.

Nous menons également en partenariat un ensemble d'actions de prévention et de promotion de la santé. Il s'agit d'une richesse des agences régionales de santé : nous ne sommes pas seuls. Cependant, la planification et l'animation interministérielles des différents volets en matière de santé-environnement – à commencer par le projet régional de santé-environnement qui est adossé à notre projet régional de santé et qui est partagé avec d'autres partenaires, et en premier lieu le conseil régional de Bretagne – sont des enjeux que nous inscrivons dans une démarche de communication, de pédagogie. De plus, nous mobilisons différents leviers financiers pour promouvoir ces actions de prévention dans différentes instances.

La direction adjointe santé-environnement de l'ARS est positionnée au sein de la direction de la santé publique. Celle-ci comprend également la direction adjointe prévention et promotion de la santé. Nous pouvons par ailleurs avoir une forte congruence dans les actions susceptibles d'être menées. Aux côtés de la direction adjointe, se trouvent la veille et la sécurité sanitaires. La direction de la santé publique s'inscrit, pour sa part, au cœur des différentes directions « métiers » de l'agence régionale de santé. À l'ARS Bretagne, qui compte à ce jour 381 collaborateurs, 60 personnes travaillent sur les questions de santé-environnement. Telles sont les forces en présence qui sont plus spécifiquement consacrées aux enjeux de santé-environnement. Elles travaillent sous l'autorité d'Anne Serre.

Les agences régionales de santé ont à la fois un siège à l'échelle régionale et des délégations dans chacun des départements. Sur les 60 personnes travaillant à la santé-environnement, environ 55 agents le font en délégation départementale et six au siège à la direction adjointe santé-environnement. Ces chiffres montrent que nous sommes héritiers d'un passé administratif. Cependant, il existe un enjeu que je souhaite souligner devant la commission d'enquête : celui du renforcement des travaux à l'échelle du siège et à l'échelle régionale, pour asseoir et appuyer le pilotage stratégique de ces différentes politiques. Il faudrait, si possible, insister sur certaines thématiques de santé-environnement peut-être plus émergentes ou faire des ponts entre différents sujets.

Par exemple, quand nous menons des contrôles sur le radon dans les habitats bretons, ne faut-il pas, du point de vue stratégique, en « profiter » pour élargir les contrôles ? Au-delà des contrôles, c'est aussi l'occasion de multiplier les actions sur la prévention et la promotion de la santé par rapport à la qualité de l'air intérieur. Ce sont des enjeux qui méritent d'être portés par une structure régionale dont le siège mériterait d'être plus étayé.

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