Mme la présidente, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de nous recevoir en audition. C'est un honneur que nous apprécions et qui prouve la reconnaissance nationale de notre travail.
Avant d'aborder la situation des Hauts-de-France, je rappellerai que nous travaillons avec M. Jean-Luc Fugit au sein du Conseil national de l'air. Nous partageons de nombreux points de vue. Son analyse est très claire et très explicite. Si cette commission d'enquête porte sur la santé environnementale, les AASQA n'ont pas de compétence en santé. Elles sont avant tout des observatoires qui mesurent la qualité de l'air mais aussi évaluent les actions mises en place à tous les échelons réglementaires, national et local. Le plus important n'est pas de mesurer mais d'évaluer la situation et les pratiques. Comme l'a dit M. Jean-Luc Fugit, nous sommes tous victimes et responsables de la pollution de l'air.
Même si la santé n'est pas notre première vocation, les ARS faisant partie de nos collèges, la qualification environnementale nous intéresse beaucoup car l'environnement est un sujet transversal. La qualité de l'air l'est également, car ce problème ne peut être traité en « silo ». Nous constatons cependant un cloisonnement des intervenants entre la question de l'air intérieur et celle de l'air extérieur, alors que l'air est un tout que nous respirons à raison de dix à quinze ml par jour. De ce fait, la qualité de l'air et la santé sont inextricablement liées. C'est pourquoi nous sommes présents devant vous aujourd'hui. Si la santé n'est pas de notre ressort, cet enjeu est toujours présent dans nos travaux.
Nous parlons de plus en plus des décès causés par la pollution de l'air. Cette morbidité existe de toute évidence, mais selon moi, il est plus juste de mettre en cause la notion d'exposome dans ces décès. Celle-ci relie et articule les différents facteurs de pollution, notamment de l'air. L'évaluation devrait donc être effectuée non en nombre de morts mais selon la situation globale de la qualité de l'air au niveau national, voire international.
Il existe déjà un certain nombre de plans visant à réduire les polluants atmosphériques, tels que le plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA), le plan de protection de l'atmosphère (PPA), et les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), auxquels Atmo participe et qui s'imposent aux collectivités territoriales. Celles-ci sont accompagnées par les AASQA dans la mise en œuvre de ces plans. Cependant, il convient d'évaluer leurs résultats finaux, ce qui reste compliqué encore aujourd'hui. Un bilan est dressé mais l'évaluation est superficielle. Il n'est pas démontré comment certaines pratiques peuvent améliorer la qualité de l'air, non en mesurant la morbidité, mais en observant une meilleure qualité de vie.
L'opinion publique a pris conscience du problème depuis environ cinq ans. Nous sommes de plus en plus sollicités par les élus, mais aussi par nos concitoyens, et nous devons répondre à ces sollicitations. Pour cela, il est important de parler de la pollution de l'air en des termes positifs, c'est-à-dire ne pas la présenter comme une contrainte mais comme une opportunité pour changer nos pratiques.
Pour répondre maintenant à votre question, les Hauts-de-France sont une vaste région qui regroupe cinq départements et plus de six millions d'habitants, depuis 2017. D'ailleurs, Atmo Hauts-de-France dispose d'un budget de 6 millions d'euros, soit un euro par habitant, ce qui est faible. Les Hauts-de-France présentent une grande diversité de population et d'activité économique, partagée entre l'agriculture et l'industrie. Les grandes agglomérations du Nord Pas-de-Calais regroupent plusieurs centaines de milliers d'habitants et hébergent des industries lourdes. La région compte notamment le plus grand nombre d'usines SEVESO mais les surfaces agricoles sont aussi très vastes. Par conséquent, les Hauts-de-France sont soumis à tous les types de polluants.
Atmo Hauts-de-France est particulièrement impliquée dans la coopération avec les agriculteurs, notamment dans la surveillance des pesticides dans l'air – un sujet important dans le PNSE 4. Les agriculteurs font preuve d'une écoute particulière et les plans de réduction des épandages conclus avec eux fonctionnent très bien. Nous avons eu l'occasion de mesurer la qualité de l'air intérieur chez des agriculteurs volontaires afin de montrer qu'ils sont les premières victimes de la pollution de l'air, compte tenu des teneurs élevées en pesticides dans l'air intérieur des fermes.
Nous surveillons également la pollution émise par l'industrie métallurgique et sidérurgique du Nord Pas-de-Calais. Toutefois, les industriels ne sont pas les plus gros pollueurs de nos jours, car ils sont très surveillés et adhèrent tous volontairement à Atmo, en plus de la contribution financière qu'ils nous versent via la taxe générale sur les activités polluantes. Ils interviennent sans hésitation dès lors qu'un dépassement est constaté pour un polluant. Ils prennent des mesures et règlent rapidement le problème.
Aujourd'hui, la pollution de l'air est majoritairement due au résidentiel tertiaire et à la circulation routière. Les Hauts-de-France sont une euro-région et sont donc traversés par de nombreux poids lourds qui traversent l'Europe. Si cette localisation comporte des avantages, de par la proximité avec les autres pays européens, ses conséquences sont considérables en termes de trafic routier et de pollution. Les autoroutes sont notre point noir en ce qui concerne les émissions de particules fines. Lorsqu'il fait chaud, ce qui est de plus en plus fréquent avec le réchauffement climatique, nous subissons de graves pics d'ozone en été.