Intervention de Laurianne Rossi

Réunion du mercredi 16 décembre 2020 à 14h00
Commission d'enquête sur l'évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurianne Rossi :

Je salue très sincèrement l'immense travail accompli. Vous avez procédé à un nombre considérable d'auditions mais, surtout vous avez réussi à synthétiser des sujets complexes pour en tirer des propositions remarquables, susceptibles de répondre aux enjeux majeurs que vous avez dégagés. Bravo pour votre travail ! À titre plus personnel, je vous remercie pour l'attention que vous avez portée aux travaux de la mission d'information sur les perturbateurs endocriniens présents dans les contenants en plastique pour l'alimentaire, les cosmétiques et les produits pharmaceutiques, dont j'étais co-rapporteure avec Claire Pitollat. Vous nous avez fait l'honneur de nous auditionner et nous retrouvons dans votre rapport quelques-unes de nos propositions, en particulier le toxi-score, ce qui nous touche tout particulièrement. C'est aussi la preuve que les travaux réalisés par le Parlement, aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, continuent à vivre et à alimenter les travaux suivants, ce qui est très important.

Pour ce qui est de la gouvernance, je salue les propositions et je partage entièrement le constat que vous dressez. Il est très difficile de dégager des priorités et de coordonner les actions à mener en raison de la multiplicité d'acteurs et de plans. C'est l'un des écueils majeurs de la politique en santé environnementale, que l'on retrouve dans toutes les politiques publiques que l'on souhaite décliner, qu'il s'agisse de la recherche, des politiques de prévention et d'évaluation et, bien entendu, du principe de précaution qui se trouve au bout de la chaîne et que nous pourrions être amenés à poser. Le diagnostic est extrêmement clair.

Un autre problème découle de cette situation : l'absence fréquente d'une recommandation nationale claire et opposable. Vous le dites vous-même, la plupart des plans n'ont pas de valeur contraignante. C'est un problème qui me conduit à vous alerter au sujet de l'une de vos propositions de déléguer à l'échelle locale la prise en charge de ce sujet. Autant les territoires, régions et départements peuvent jouer un rôle crucial dans le recueil de données et la surveillance – à cet égard, la création d'observatoires régionaux est une excellente idée –, autant les préconisations et recommandations en matière de santé environnementale ne devraient être émises que par une autorité nationale ou, du moins, un organisme capable de les formuler. Les collectivités, qui se retrouvent totalement démunies, ont besoin d'être guidées et accompagnées. Certaines agences régionales de santé le font. Elles ont ainsi pu être d'une aide précieuse lorsqu'il s'agissait de trouver des substituts au plastique. Il n'empêche qu'en déléguant au niveau régional le soin de formuler des recommandations, nous prendrions le risque de creuser les inégalités entre les régions.

Je salue, par ailleurs, à mon tour, votre souci des usagers, des citoyens. Votre proposition de solliciter le CESE et le Ceser est excellente. Rappelons que la plupart des scandales ont éclaté parce que des citoyens, constitués en collectifs ou en associations, les avaient portés sur la place publique ou auprès des élus. C'est ainsi un petit collectif de parents d'élèves qui a permis de prendre des mesures pour réduire l'utilisation du plastique dans les cantines scolaires. Il a pris, aujourd'hui, une envergure nationale et accomplit un travail remarquable. La liste de tous les sujets sur lesquels nos concitoyens sont intervenus serait longue à dresser.

Quant au toxi-score, il correspond à l'une des propositions que nous avions formulées dans notre rapport d'information sur les perturbateurs endocriniens. Partant de la classification de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) des perturbateurs endocriniens en trois catégories – « avérés », « présumés » et « suspectés » –, nous avons imaginé, sur le modèle du nutri-score, un pictogramme informant le consommateur du degré de toxicité du produit qu'il achète. Cet étiquetage ne serait efficace qu'à condition que le secteur industriel soit totalement transparent sur les substances utilisées. Au niveau européen, le règlement REACH, en cours de révision, devrait être beaucoup plus strict et soumettre les industriels, non plus à un simple régime déclaratif, mais à une exigence de complète transparence sur les substances utilisées, quitte à en interdire certaines au nom du principe de précaution. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Une fois cette garantie de transparence obtenue, le pictogramme pourra voir le jour. Bien sûr, le nombre de pictogrammes va finir par être élevé et je ne suis pas certaine qu'il y ait suffisamment de places, sur certains produits, pour le nutri-score, le toxi-score, le score carbone, sans parler du logo dédié au recyclage ou au retraitement des déchets. Nous devrons rationnaliser l'étiquetage, en espérant que les industriels soient le plus vertueux possible, car l'objectif du toxi-score est d'éradiquer la présence de ces substances toxiques dans les contenants et les contenus.

En tout cas, nous porterons haut et fort le rapport que vous présentez aujourd'hui.

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