Intervention de Philippe Sauquet

Réunion du mardi 7 mai 2019 à 17h00
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Philippe Sauquet, directeur général « Stratégie et innovation », directeur général de la branche Gas, Renewables and Power (GRP) et membre du comité exécutif de la société Total :

Lorsque les premières réglementations européennes ont paru sur l'incorporation de biocomposants dans les biocarburants, il n'existait aucune norme. Des biocarburants ont été développés à base d'éthanol dans l'essence, et à base d'huile végétale dans le diesel. Un débat a ensuite eu cours sur la concurrence qui s'exerçait entre les cultures destinées à l'alimentation et celles qui étaient destinées aux biocarburants. Les surfaces disponibles pour les activités agricoles sont en effet, par définition, contraintes. Est ainsi apparu le concept de biocarburant de deuxième génération, censé ne pas entrer en concurrence avec l'alimentation humaine. Il consiste à utiliser la lignocellulose. Or cette biomasse de deuxième génération est très coûteuse, plus encore que la première. Elle correspond à la partie des plantes qui résiste le plus à l'agression et à la déconstruction de son squelette en carbone. Nous y travaillons néanmoins, en particulier dans le cadre du projet pilote BioTfuel à Dunkerque. Ses coûts sont sans commune mesure avec ceux de la première génération. Notez, pour finir, que les réglementations européennes différencient les parts de biocarburants de première et de deuxième génération pouvant être incorporées.

Le dernier débat introduit en France à l'occasion du projet de La Mède est d'une autre nature. Il consiste à attaquer le principe même selon lequel les biocarburants pourraient contribuer à la réduction des émissions de CO2. En la matière, les réglementations sont inexistantes. Nous peinons à trouver une base rationnelle aux législations prises dans certains pays, y compris en France. Aussi nous trouvons-nous dans une situation d'inconfort. Un procès médiatique a été intenté à l'huile de palme, en partie pour ses qualités gustatives – domaine dans lequel je suis incompétent. Quoi qu'il en soit, l'huile de palme est employée de longue date dans le domaine énergétique. Les premiers agriculteurs français à avoir développé la filière des biocarburants à base d'esters d'huile végétale importent depuis longtemps de l'huile de palme. Total n'est donc en rien pionnier en la matière, contrairement à ce qui a pu être dit. Sur le fond, la discussion est complexe. Les pays producteurs d'huile de palme manifestent leur incompréhension quant aux récriminations qui leur sont faites : ils affirment que s'ils devaient passer à l'huile de colza, ils utiliseraient davantage de surfaces, de pesticides et d'engrais. La Malaisie et l'Indonésie sont manifestement trop éloignées de nos contrées pour arriver à s'y faire entendre. Des pays africains produisent aussi de l'huile de palme et préfèrent rester silencieux dans ce débat. À ce sujet, je vous encourage à écouter les experts du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD). Les grands spécialistes de l'huile de palme et des semences de palmiers à huile sont en effet français et représentés par cet organisme.

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