Intervention de Daniel Chateigner

Réunion du jeudi 20 juin 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Daniel Chateigner :

Nous avons recensé aujourd'hui environ 50 000 signatures de pétitions sur le territoire français. Cela nous fait un réservoir d'environ 100 000 personnes mécontentes qui sont impactées directement par les méthaniseurs. Le CSNM et le CNVM sont favorables à un mix énergétique qui intègre aussi la méthanisation. Nous ne sommes pas contre la méthanisation : elle a toute sa place, mais rien que sa place.

Concernant l'aspect agronomique, il faut souligner la non-utilisation du carbone organique du sol comme un carburant. Le jour où nous commencerons à utiliser le carbone organique du sol comme carburant nous appauvrirons les sols et c'est ce qui est en train d'être fait lorsque l'on pousse la méthanisation. Appauvrir le sol, c'est enrichir son infertilité, c'est le rendre infertile. Et rendre infertile un sol, c'est perdre la souveraineté alimentaire d'un territoire. Et aujourd'hui, nous allons dans ce sens. En plus de l'agriculture intensive qui est néfaste pour les sols, on rajoute de la méthanisation qui continue de pomper du carbone organique au sol. C'est ce qui est le plus dérangeant car nous allons tout droit vers un appauvrissement catastrophique du sol. Nous ne pourrons pas respecter la limitation à 4 ‰ de l'augmentation de la matière organique dans le sol, qui avait pourtant été signée par le ministère sous M. Le Foll.

Si nous allons à l'encontre de cela, nous perdrons notre souveraineté alimentaire pour un gain énergétique modeste. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) nous indique que la méthanisation a réalisé 25 % de l'objectif d'il y a cinq ans. C'est-à-dire qu'on annonçait il y a cinq ans une efficacité quatre fois supérieure à ce que l'on constate sur le terrain avec les meilleurs méthaniseur. Appauvrir l'alimentation du territoire pour gagner en énergie de manière très modeste est donc quelque chose qui doit nous interpeller tous et qui doit nous refaire voir la nouvelle PPE.

Dans cette PPE, nous avons quelques hypothèses de base de calcul qui impose de prendre uniquement en considération la conversion du charbon ou des énergies fossiles sans prendre en compte le reste de la méthanisation. On peut assez facilement imaginer que l'ensemble des méthanisations, telle qu'elle est prévue dans les scénarii de la PPE, va conduire à l'occupation d'environ six départements français couverts d'agriculture uniquement pour méthaniser. Tout cela pour 7 % à 10 % de remplacement du gaz naturel fossile ! Si vous voulez remplacer totalement le gaz naturel fossile en 2050, il va vous falloir 60 départements. C'est impossible. Ce constat réalisé il y a huit mois par les scientifiques du CSNM n'a pas été contredit pour l'instant.

Concernant les odeurs, les nuisances et les pollutions, les riverains, représentés par le CNVM, sont souvent contredits. Or, il y a beaucoup de riverains qui sont capables de comprendre que lorsqu'on commence à sentir des odeurs d'œuf pourri c'est qu'il y a du H2S et que c'est dangereux. Donc, légitimement, l'ensemble des populations s'inquiète.

La biodiversité des sols va aussi être impactée par la méthanisation et aucune mesure de cette biodiversité n'apparaît dans les 670 projets que nous avons pu analyser.

Il faut investir 1,2 million d'euros pour créer deux emplois directs. Sur ces 670 méthaniseurs, nous avons estimé entre 500 000 et 1 million d'euros la dépense par emploi direct créé. Ce n'est pas avec cela que l'on va résorber le chômage ! On n'aura pas les sous.

Je pense qu'il faut aller vers un système où l'on aura naturellement beaucoup plus de contrôles – des contrôles indépendants et non pas des autocontrôles puisqu'aujourd'hui la plupart des incidents découverts le sont par les riverains et non par les instances qui nous surveillent.

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