Il y a un mois, nous recevions ici Jean-Louis Bal le président du Syndicat des énergies renouvelables, qui nous déclarait que le projet du Tréport est l'exemple de ce qu'il ne faut pas faire. Je crois que c'est bien l'illustration de l'aberration de ce projet. Je l'ai vécu de l'intérieur puisque j'étais à l'époque élu local au département et dans ma commune de Mers-les-Bains située face au parc. Ce projet se situe dans le périmètre du parc naturel marin situé entre les estuaires de la plaine de Picardie et de la côte d'Opale. Il s'agit d'une zone extrêmement riche en termes de biodiversité et un plan de gestion ambitieux – auquel Olivier Becquet a participé – a été mis en place pour la sauvegarder. Puis, on a nous a retiré le droit de veto pour le confier à l'Agence française pour la biodiversité (AFB) qui a validé ce parc alors que nous avions émis un avis défavorable. Cela a généré une crise de gouvernance puisque nous avons tous démissionné du parc marin à cette occasion-là.
C'est à la fois une zone riche en biodiversité dont l'État s'est contrefichu et une zone de pêche. Le parc a également un impact sur l'économie touristique puisque c'est la porte d'entrée de la baie de Somme, l'une des plus belles baies du monde, labellisée grand site de France. Ce rouleau compresseur de l'État écrase toutes les labellisations que l'État lui-même avait réussi à mettre en place et sur lesquelles on s'était mis d'accord.
Je dénonce également toute la procédure que nous avons subie depuis 2008. Un premier débat public en 2008, où tout le monde s'était accordé pour dire que le périmètre n'était pas le bon, et dès 2014 un nouvel appel à projet relancé par l'État sur le même périmètre. Si le parc est parti un peu plus vers Dieppe pour épargner une partie du parc marin, l'impact demeure extrêmement fort. L'enquête publique, où les gens se sont exprimés défavorablement, a été écrasée par le rouleau compresseur de l'État. Toutes les collectivités de la baie de Somme, le conseil départemental, le conseil régional, se sont opposés à ce parc mais peu importe, il fallait passer le rouleau compresseur et tout écraser. Quelle est la compatibilité entre cette production dite décarbonée et la restauration de la biodiversité puisque c'est une zone extrêmement riche comme le sont vraisemblablement les autres zones ?
On est parti d'un seuil à 230 euros, on est à 150 euros et on vient d'attribuer Dunkerque à 45 euros. Quel serait le coût de l'abandon de ces six projets qui de toute évidence, sont hors marché ? On est trois fois plus cher que le marché. Au moment où l'on se pose tous des questions de financement et d'équilibre de nos comptes publics, c'est une question qu'il faut porter.
Pourriez-vous, d'autre part, nous parler de l'approche des consortiums vis-à-vis de vos métiers, et nous dire comment nous sommes arrivés à des conflits d'usage comme ceux qui sont cristallisés aujourd'hui ?
Enfin, comment sortir de ces situations ? On évoque le fait qu'il faut se parler, mais quand on a parlé pendant des dizaines d'heures et que personne ne nous a jamais entendus, je ne vois pas comment on peut avancer. Rien n'a été concédé. Les marins pêcheurs du Tréport et de la zone de Dieppe sont extrêmement responsables et avaient proposé un autre site, la pointe d'Ailly, qui est une zone où il y a peu de pêche. Les deux ministres d'État en charge de ces sujets-là n'ont pas voulu nous entendre. Tout le monde s'accorde pour dire que c'est un mauvais projet, mais on continue. Ne nous étonnons donc pas d'avoir des citoyens en colère sur nos giratoires quand on procède de cette façon-là dans la gouvernance publique.