Intervention de André Merlin

Réunion du mercredi 17 juillet 2019 à 14h10
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

André Merlin, fondateur et ancien président de Réseau de transport d'électricité (RTE) :

Le risque est permanent mais il est plus ou moins élevé selon la situation dans laquelle on se trouve. Plus on augmente la part des énergies intermittentes, plus ce risque croît. Pour le maîtriser, il faut disposer de moyens pilotables conventionnels, qu'il s'agisse de centrales thermiques à flamme ou de centrales nucléaires. L'hydraulique peut être une solution mais uniquement dans les pays où il y a une forte puissance en hydroélectricité comme la Norvège et le Canada. En France, il doit servir principalement à passer les pointes de consommation.

Le stockage procure une plus grande flexibilité, et à ce titre il est pertinent d'augmenter les capacités, toutefois il ne saurait répondre à lui seul aux enjeux soulevés par l'intermittence. Au-delà de l'instabilité du système, se pose un problème de coût qu'a pointé Jean-Marc Jancovici devant votre commission.

Un des moyens, au niveau européen, de maîtriser ce risque consiste à développer les interconnexions, solution dont je me suis fait depuis longtemps l'avocat. Elles ont trois avantages. Premièrement, elles permettent une solidarité entre les États membres : si un pays est confronté, pour de multiples raisons, à un déficit de production, il peut avoir recours à l'électricité disponible dans les pays voisins – on envisage même maintenant des interconnexions entre continents, notamment entre l'Europe et l'Afrique du Nord. Deuxièmement, elles favorisent l'intégration des marchés : plus les réseaux sont interconnectés, plus il est facile de mobiliser la production d'autres pays et de faire jouer la concurrence. Troisièmement, elles facilitent l'intégration des énergies intermittentes, notamment du fait du foisonnement, dont l'effet n'est pas très important, je le reconnais – lorsqu'il fait froid en France et que l'éolien est presque à l'arrêt, il y a toutes les chances pour qu'il en aille de même en Allemagne.

Pour toutes ces raisons, la Commission européenne encourage la création de nouvelles interconnexions, notamment entre la France et les pays voisins – la péninsule ibérique, l'Italie, l'Irlande, le Royaume-Uni. Le problème, c'est que ces ouvrages coûtent de plus en plus cher parce qu'ils passent soit sous la mer, soit sous la terre en raison de la difficile acceptabilité de l'implantation de pylônes à très haute tension, comme nous avons pu le voir avec le projet de ligne France-Espagne. La question se pose de savoir jusqu'où aller dans le développement des interconnexions. Il y a un calcul à faire pour montrer que ces opérations sont rentables. C'est au gestionnaire du réseau de mettre en évidence ces atouts dans les discussions avec la Commission.

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