Intervention de Sebastian Schwenen

Réunion du jeudi 25 juillet 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Sebastian Schwenen, professeur assistant au Centre sur les marchés de l'énergie de l'Université de Munich :

Je suis ravi d'être parmi vous. En guise d'introduction, j'ai préparé quelques diapositives sur la transition énergétique en Allemagne, afin que vous disposiez d'une vue d'ensemble de la situation actuelle.

Ma première diapositive explique notre présence ici : la transition énergétique n'est pas une fin en soi ; le véritable problème, ce sont les émissions de CO2. Or ces dernières ont principalement augmenté à cause de l'homme, comme le souligne le graphique gris, alors que les émissions naturelles – celles des forêts –, en jaune, sont quasi stables.

Pourquoi, en Europe et en Allemagne, a-t-on commencé par décarboner le marché de l'électricité ? Cet histogramme du cabinet McKinsey l'expose clairement. La colonne à l'extrême gauche représente les émissions européennes en 1990 et celle de droite, les objectifs pour 2050 – une baisse de 80 à 85 %. En 2010, le secteur de l'électricité était responsable de la majeure partie des émissions et, vous le voyez, il sera quasiment décarboné en 2050. Nous ne voulons pas toucher à l'industrie pour le moment. Nous nous sommes donc concentrés sur le secteur de l'électricité, financièrement plus abordable à traiter.

Ma troisième diapositive s'intéresse de plus près à l'Allemagne : en 2017, près de 45 % des émissions allemandes étaient issues du secteur de l'électricité. Ensuite venaient les transports – près de 20 % –, puis les foyers – essentiellement le chauffage et un peu la cuisine. En plus d'être le moins onéreux à décarboner, le secteur de l'électricité est donc celui qui pèse le plus.

Comment avons-nous décarboné ? Quels choix s'offraient à nous ? Le premier était le nucléaire, le deuxième, le développement des énergies renouvelables – éolien, solaire –, et le troisième – qui n'en est pas vraiment un – la capture et le stockage des émissions, opérés au niveau des centrales à charbon. Mais cette technologie n'était pas mature quand nous avons entamé notre transition, et ne l'est toujours pas. En outre, après l'accident de Fukushima, nous nous sommes tout naturellement tournés vers l'éolien et le solaire.

La production d'électricité d'origine renouvelable a fortement augmenté depuis 2002, puis avec l'adoption de la loi EEG : éolien terrestre en orange sur le graphique, biomasse en bleu, photovoltaïque en jaune – qui représente 6 à 7 % de la production d'électricité –, éolien offshore développé un peu plus tard. La production d'électricité d'origine renouvelable représente désormais environ 37 %. Bien entendu, cela dépend des conditions météorologiques, notamment de l'ensoleillement.

Comment y sommes-nous parvenus ? Nous avons mis en place des tarifs de rachat – chaque unité produite correspondant à un prix de rachat. Plus récemment, nous sommes passés à un système d'appels d'offres afin de contrôler la quantité. En effet, entre 2010 et 2012, l'État a racheté beaucoup d'électricité solaire, mais le marché seul décidait des volumes. Avec ce système d'appels d'offres, nous reprenons la main. La part des énergies renouvelables doit encore augmenter : nous prévoyons une hausse de 3 gigawatts par an.

Combien coûte cette transition ? Le graphique décompose l'évolution du prix par kilowatt/heure (kW/h) payé par le consommateur allemand entre 2006 et 2016. Le coût de la production est en bleu foncé, les coûts liés au réseau sont en bleu plus clair et sont restés à peu près constants – à 60 centimes d'euro. À l'inverse, la redevance pour énergie renouvelable a beaucoup augmenté et nous a permis de financer notre soutien aux énergies renouvelables. En 2016, elle représentait environ 9 centimes d'euro kW/h. Pour un foyer type consommant environ 4 000 kW/h par an, c'est un surcoût de 360 euros.

Bien entendu, ces chiffres sont des moyennes. Ainsi, les foyers disposant de panneaux photovoltaïques en bénéficient directement. À l'inverse, les locataires ne peuvent pas se permettre d'en installer et paient donc plus. Il ne faut pas oublier cette problématique de la redistribution.

La baisse des émissions de CO2 enregistrée en Allemagne est modeste, mais réelle, comme le souligne la courbe jaune du graphique suivant. Notre sortie du nucléaire a entraîné un transfert de la production d'électricité vers les centrales à charbon, technologie qui engendre beaucoup d'émissions. Les avantages que nous allons tirer de la sortie du nucléaire seront beaucoup plus visibles lorsque nous aurons également achevé notre sortie du charbon.

J'en viens au dernier tableau, préparé par un de mes collègues : à mesure que nous décarbonerons, il conviendra d'électrifier le secteur des transports, le chauffage, etc. En effet, comme vous pouvez le constater, beaucoup de voitures roulent encore aux carburants fossiles. Mais, au fur et à mesure de la transition, il faudra aussi être attentif aux effets de rétroaction (feedback loops) : la demande en électricité augmentant, le marché de l'électricité va prendre de l'ampleur.

Quels sont les débats actuels en Allemagne ? Il y en a quatre principaux : la question de la sortie du charbon ; l'adéquation du réseau et la sécurité d'approvisionnement ; comment tirer le meilleur parti des synergies pour le transport et le chauffage ? Enfin, nous envisageons une taxe carbone dans différents secteurs.

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