Intervention de Nicole Trisse

Réunion du mercredi 8 décembre 2021 à 17h15
Délégation française à l'assemblée parlementaire du conseil de l'europe

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Trisse, Présidente :

Mes chers collègues, nous avons la chance de recevoir aujourd'hui M. Nicolas de Bouillane de Lacoste, envoyé spécial pour la Biélorussie. Monsieur l'Ambassadeur, je vous souhaite la bienvenue devant notre délégation.

Je rappellerai à grands traits, vous m'en excuserez, votre carrière très riche pour indiquer à mes collègues que vous avez occupé plusieurs postes en Europe centrale et orientale, notamment en Pologne, en Roumanie, en République tchèque et en Russie, et que vous avez été secrétaire à la Représentation permanente de la France auprès de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), à Vienne. Vous avez ensuite assumé les fonctions de sous-directeur du Caucase et de l'Asie centrale à la direction de l'Europe continentale et celles de directeur-adjoint de la direction de l'Europe continentale.

C'est donc en diplomate chevronné, expert de la région, que vous avez été nommé Ambassadeur de France en Biélorussie par décret du 14 septembre 2020, c'est-à-dire à un moment important et sensible pour l'avenir de ce pays.

Les conditions de votre départ contraint de Minsk, il y a quelques semaines, me paraissent devoir être rappelées ici. Le ministère biélorusse des Affaires étrangères a en effet subitement exigé que vous partiez avant le 18 octobre au motif que vous n'aviez jamais présenté vos lettres de créance à M. Alexandre Loukachenko, dont la réélection à la présidence biélorusse pour un sixième mandat le 9 août 2020 n'a pas été reconnue par la France, à l'instar de tous les pays de l'Union européenne.

Comme vous le savez très certainement, même si la Biélorussie n'est pas membre du Conseil de l'Europe, l'Assemblée parlementaire de cette Organisation, l'APCE, a accordé une attention toute particulière à la situation du pays suite à l'annonce des résultats de la présidentielle de 2020 et à la répression de la contestation populaire qui s'en est suivie.

Lors de notre session de printemps, cette année, nous avons notamment débattu, sur le rapport de notre collègue Alexandra Louis, des violations des droits de l'Homme depuis la fin de l'été 2020. Plus récemment, en septembre dernier, nous avons dénoncé l'instrumentalisation des migrants par le régime biélorusse, afin de faire pression sur les États baltes ainsi que la Pologne, et à travers eux sur l'Union européenne elle-même.

Ce dernier sujet de préoccupation a malheureusement connu des développements dramatiques depuis lors, le pouvoir illégitime à Minsk organisant et planifiant des transferts toujours plus massifs de migrants depuis le Moyen-Orient pour pousser des personnes aux abois et dans le plus total dénuement sur les frontières orientales de l'Union européenne.

Cette véritable « guerre hybride », faisant fi des plus élémentaires principes humanitaires, ne doit pas nous faire oublier la grave crise politique qui perdure en Biélorussie depuis seize mois.

Sans doute y reviendrez-vous plus longuement et précisément dans votre propos liminaire, mais il n'est pas inutile de rappeler ici que les manifestations pacifiques contre la falsification du scrutin présidentiel du 9 août 2020 ont été réprimées de manière brutale par les autorités biélorusses. Plusieurs milliers de manifestants ont été arrêtés et au moins plusieurs centaines d'entre eux torturés en détention. Aujourd'hui, plus d'un millier de prisonniers politiques croupissent dans les geôles du pouvoir biélorusse. La plupart ont été poursuivis pour des crimes dont la définition est vague mais assortis de longues peines de prison.

Votre expulsion du pays s'inscrit hélas dans la triste lignée du raidissement sans précédent des autorités illégitimes de Minsk.

Des motifs d'espoir subsistent néanmoins. La société civile biélorusse a fait preuve d'un courage exemplaire contre la tyrannie. Les manifestations contestant les résultats annoncés par le pouvoir ont été impressionnantes et expliquent sans doute l'ampleur de la répression.

De même, la voix de l'opposition est incarnée par des figures nouvelles, telle Mme Svetlana Tikhanovskaïa, candidate par défaut à la présidentielle qui est devenue la figure de proue de la contestation politique de M. Loukachenko, ou encore Mme Maria Kolesnikova qui, après avoir déchiré son passeport à la frontière pour ne pas être expulsée de force, se trouve emprisonnée à Minsk depuis septembre 2020 et a été condamnée récemment à onze ans de prison pour « complot visant à s'emparer du pouvoir ». Cette dernière vient d'ailleurs de se voir décerner par l'APCE, le 27 septembre, le Prix Vacláv Havel 2021 des droits de l'Homme.

Vous-même, dans un message poignant que vous avez adressé au peuple biélorusse juste avant votre départ, avez indiqué avoir « rencontré de nombreuses personnes courageuses et fortes d'esprit » et appelé la population locale « à ne jamais perdre espoir en des jours meilleurs ».

Monsieur l'Ambassadeur, nous ne pouvions manquer l'opportunité de vous convier à venir nous éclairer de votre regard avisé sur les développements à l'œuvre en Biélorussie. Je vous laisse donc sans plus tarder la parole pour nous livrer votre propos liminaire, puis nous aurons si vous le voulez bien un rapide échange sous la forme de questions des membres de la délégation et de réponses de votre part.

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