Faisable, monsieur Orphelin, ça l'est assurément ; souhaitable, je ne sais pas. L'enjeu de ces amendements, en réalité, n'est pas tant de produire des recettes fiscales – avec quelques centaines de millions d'euros, nous sommes loin de nos besoins de financement pour faire face à la crise et à la relance – que d'en faire un symbole de justice sociale. Je ne suis pas défavorable à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ; du reste, la CEHR existe toujours. Je considère seulement, de façon un peu clinique, qu'en France les hauts revenus sont correctement taxés, et c'est un euphémisme : en additionnant l'impôt sur le revenu, la CEHR et toutes les autres contributions, on dépasse les 65 %. Notre impôt sur le revenu est le plus redistributif ; il est quasiment sans équivalent dans le monde. Vous me direz qu'il ne représente que 7 % des ressources de l'État, mais c'est un autre débat… Les 10 % les plus riches de notre pays paient 60 % de l'impôt sur le revenu.
On ne peut pas dire qu'il n'y a pas de redistribution fiscale. Or vos amendements laissent penser que, face à la crise, les riches ne paient pas. Cela n'est pas vrai : le mécanisme fiscal de redistribution fonctionne. Cela étant, la fiscalité est un message envoyé aux contribuables, et c'est bien la raison pour laquelle je tiens à une stabilité fiscale pour la sortie de crise. Si ce principe évoluera peut-être dans quelques années en fonction de nouvelles trajectoires budgétaires, je vous livre ma conviction en tant que rapporteur général à l'automne 2020 : augmenter la fiscalité des ménages, quels qu'ils soient, serait un signal négatif pour la consommation et l'investissement individuels. Avis défavorable.