Intervention de Véronique Louwagie

Réunion du jeudi 22 octobre 2020 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Louwagie, rapporteure spéciale :

La mission Santé est composée de deux programmes, le programme 183 Protection maladie, qui finance les diverses composantes de l'aide médicale d'État (AME), et le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins, destiné à financer d'autres actions dans le domaine de la santé. Les crédits de paiement de la mission s'élèvent à 1 329 millions d'euros et ses autorisations d'engagement à 1 323 millions d'euros, soit une progression de 200 millions par rapport à 2020. Contrairement à ce que l'on pourrait penser spontanément, la mission Santé est peu affectée par la crise sanitaire. Compte tenu de son intitulé, on aurait pu s'attendre à ce qu'elle constitue l'un des outils financiers mobilisés dans la lutte contre la pandémie. Il n'en est rien. Sur les 1 323 millions d'euros d'autorisations d'engagement de la mission, moins de 0,5 % sont liés à la crise sanitaire ; il s'agit de dépenses en faveur des systèmes numériques de santé.

Même si nos débats portent sur les crédits du projet de loi de finances pour 2021, il me semble utile de dire quelques mots de l'organisation financière adoptée en 2020, par exemple pour acheter des masques et des respirateurs. Cette organisation ne repose pas directement sur le budget de l'État mais sur le budget de la sécurité sociale. Depuis un an, Santé publique France, qui est au cœur de la réponse à la crise, est financée par l'assurance maladie et non plus par le budget de l'État. Au mois de mars 2020, une dotation exceptionnelle de 4 milliards d'euros lui a été accordée. Sur cette base, cet opérateur a alimenté un fonds de concours, à hauteur de 700 millions d'euros, lequel a ensuite abondé le programme 204 pour procéder à des achats de matériel ou de prestations. À la mi-octobre, près de 450 millions d'euros ont été dépensés dans ce cadre. J'insiste sur le fait que ces 450 millions d'euros n'ont pas fait l'objet d'une ouverture de crédits en loi de finances rectificative. Ces crédits relèvent de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, donc de la loi de financement de la sécurité sociale.

Le projet de loi de finances pour 2021 s'inscrit dans la continuité de cette organisation. C'est pourquoi la mission Santé comporte très peu de crédits liés à la crise. Elle n'en présente pas moins une augmentation importante de ses moyens : elle est dotée de 200 millions d'euros supplémentaires par rapport à la loi de finances de 2020, dont 60 millions affectés au programme 204. La principale modification qui en résulte est l'engagement d'un plan d'investissement de 45 millions d'euros en faveur de l'agence de santé de Wallis-et-Futuna. Ce plan est une bonne chose ; il répond aux critiques à ce sujet de la Cour des comptes, ainsi qu'à celles que j'ai formulées dans mes précédents rapports spéciaux.

Le programme 204 comporte également les crédits relatifs au dispositif d'indemnisation des victimes de la Dépakine, auquel j'attache une attention particulière depuis que je suis rapporteure spéciale de la mission Santé. Ce mécanisme a été réformé il y a un an. Malgré de réelles avancées, des difficultés persistent, en raison notamment du refus de Sanofi de participer au dispositif d'indemnisation. Je présenterai tout à l'heure deux amendements à ce sujet.

L'augmentation de 200 millions d'euros des crédits de la mission Santé est essentiellement motivée par le coût croissant de l'AME, dont le budget bénéficie de 140 millions d'euros supplémentaires. Pour la première fois, le coût global de l'AME est supérieur à 1 milliard d'euros. Sa réforme a pourtant été engagée il y a un an mais elle ne permet pas de maîtriser cette dépense, bien au contraire.

Plusieurs raisons concourent à l'accroissement du coût de l'AME. En 2021, un rattrapage des soins non effectués en 2020 aura lieu, et le nombre de bénéficiaires de l'AME continuera de croître. En outre, la réforme elle-même pèsera sur le coût de l'AME. Fondamentalement, la réforme engagée il y a un an ne me semble pas à la hauteur des enjeux. Elle est inachevée et mérite d'être complétée. Nous en débattrons dans l'hémicycle avec le ministre. En commission, je me contenterai de présenter deux amendements techniques visant à simplifier l'AME et à mieux en connaître ses bénéficiaires. J'en déposerai d'autres en séance publique visant à la recentrer sur les soins urgents, comme je l'ai fait l'année passée.

En dépit des quelques avancées que comporte le programme 204, je ne soutiendrai pas l'adoption des crédits de la mission Santé, notamment en raison de l'absence de maîtrise de la dépense de l'AME.

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