Intervention de Philippe Wahl

Réunion du mercredi 3 février 2021 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Philippe Wahl, président-directeur général du groupe La Poste :

Nous essayons en effet de mettre en place ce service à domicile. Je suis très favorable à inclure dans le travail des facteurs cette mission de proximité mais cela dépend également du Gouvernement et du législateur. Nous pensons réellement, notamment pour le rural profond et les personnes à mobilité réduite, que les facteurs peuvent apporter un bureau de poste à domicile ou France Services à domicile. Je rappelle que le facteur est habilité à déposer du cash chez les gens, pour La Banque postale ou d'autres banques, à travers le service « Allo facteur ». Si, en tant que législateur, vous nous ouvrez de nouvelles possibilités en termes de services numériques, ce sera très positif pour La Poste et les territoires.

Le service universel est déficitaire d'un milliard d'euros et ce déficit a vocation à s'aggraver. Des déficits de service public ne peuvent pas être rééquilibrés par notre seul effort. Nous pouvons réduire les coûts ou calibrer différemment l'offre de service public mais une compensation sera quoi qu'il en soit nécessaire. Les industries gazières et électriques reçoivent 9 milliards d'euros de compensation pour la péréquation du branchement électrique. Les TER reçoivent plus de 4 milliards d'euros. La Poste n'équilibra pas toute seule, même par des mesures sociales, ses coûts de service public, sachant que ses missions sont menées dans des conditions dérogatoires aux activités de marché. Nous prendrons notre part de l'effort comme nous l'avons toujours fait. Nous proposons des mesures de retraite anticipée et les effectifs de La Poste ont considérablement baissé au cours des dernières années, sans aucun licenciement et dans une acceptation sociale et sociétale satisfaisante.

Les bénéfices de La Banque postale et de CNP Assurances n'ont pas vocation à combler les déficits résiduels des missions de service public. À défaut, ces activités concurrentielles seront condamnées. La Banque postale est face à cinq grandes banques françaises. Si, en plus de l'impôt sur les sociétés qu'elle paye, La Banque Postale est obligée de mettre des centaines de millions d'euros dans la compensation des missions de service public, elle ne pourra pas survivre et se développer. J'espère que les deux auront, par leur rentabilité, à la fois suffisamment de fonds propres et les moyens de se développer. C'est l'une des raisons de l'opération que nous avons réalisée. Les fonds propres durs de La Banque Postale sont légèrement inférieurs à 19 % aujourd'hui en France, ce qui en fait la banque la mieux capitalisée du pays.

Par ailleurs, le colis est porté par le e-commerce mais il ne compense pas les pertes sur la lettre. Nous cherchons à piloter de très près la part d'Amazon dans l'ensemble du chiffre d'affaires ; celle-ci est inférieure à 10 %. Nous sommes toutefois très satisfaits qu'Amazon nous fasse confiance en tant que leader du marché.

Sur la question de l'utilité sociale, je suis prêt à en discuter mais je crains, tout autant que sur la question de la fréquentation, des débats sans fin à propos de sa définition et sa mesure.

En ce qui concerne le livret A, il reste le support de la mission d'accessibilité bancaire pour le million d'« invisibles », dont le nombre a tendance à se renforcer. Les tentatives de contournement sont très faibles. Nous devrons toutefois travailler avec le Gouvernement, le législateur et la Commission européenne pour faire évoluer et moderniser le vecteur livret A.

En outre, nous faisons très attention à la réception et la maîtrise des nouveaux outils que nous mettons en place. Nous avons doté dix ans plus tôt les facteurs d'un outil aidant à la numérisation de leur travail, le smartphone Facteo. Il nous a fallu du temps pour l'installer. Il en sera de même pour les casiers électroniques ETF. Nous passons du temps à former et à expliquer mais tout changement de méthode de travail est difficile, surtout lorsqu'il concerne 70 000 personnes.

À propos de la santé au travail, les accidents du travail ont baissé de manière très sensible depuis cinq ans. Nous sommes passés de 9 000 à 6 000 accidents du travail dans la branche services-courrier-colis. L'effort a été considérable. En ce qui concerne le trois-roues, il prend un peu plus de temps à l'usage mais nous avons toujours 27 000 vélos électriques. Nous sommes massivement favorables au vélo. Nous faisons appel aux trois-roues pour les colis les plus lourds.

Enfin, La Poste est l'une des premières entreprises à accueillir des apprentis. Pour 2021, nous avons décidé de reconduire les chiffres de 2020, avec 4 600 apprentis. En ce qui concerne l'intégration, nous donnons la priorité aux postiers dont le travail a été modifié par ailleurs, conformément à notre modèle social. Nous souhaitons rester une grande entreprise d'accueil des apprentis mais nous ne pouvons pas les intégrer systématiquement.

La « silver économie » est devenue un secteur réalisant un peu plus de 200 millions d'euros de chiffre d'affaires aujourd'hui. Nous sommes rentrés dans la santé par le biais des services. Nous sommes reconnus, à la fois par le ministère de la santé et les autres acteurs, comme extrêmement légitimes. Les facteurs ont cette puissance de relation et cette intelligence du contact qui fait que nous continuerons à nous développer dans ce secteur.

En ce qui concerne la logistique urbaine, nous avons signé 19 accords sur les 22 métropoles. Nous avons pris contact avec les nouvelles équipes municipales. Je rencontrerai ce vendredi le maire de Toulouse pour développer le projet de logistique urbaine. Nous essayons d'opter pour la décarbonation totale des marchandises.

En matière de RSE, La Poste est l'entreprise la mieux notée au monde, tous secteurs confondus, par l'agence de notation Vigeo Eiris. Ce n'est pas très étonnant compte tenu de nos missions de service public, qui signifient que nous sommes engagés dans la société. Nous possédons un modèle social de discussion très étendu. En matière d'engagement environnemental, nous détenons la première flotte de véhicules électriques d'Europe à quatre roues.

S'agissant de la place de La Banque postale dans le plan de relance, nous avons conclu des prêts garantis par l'État (PGE), nous avons été en 2020 la première banque de financement des projets locaux. Plus une commune est petite, plus elle fait appel à La Banque postale.

« Ma ville, mon shopping » est une nouvelle offre aidant les commerçants à se digitaliser. Nous sommes persuadés que tous les commerçants peuvent se mettre sur Internet et en partie digitaliser leur offre. La solution que nous avons créée a la spécificité de faire appel aux collectivités locales, pour les aider à dynamiser leurs commerces de centre-ville. Presque 3 000 communes ont déjà signé, ainsi que des milliers de commerçants. Nous souhaitons continuer à nous développer et sommes très fiers de ce que nous faisons.

En ce qui concerne le déploiement à l'international, l'accord signé par CNP Assurances au Brésil est la prolongation d'un accord signé vingt ans plus tôt. Nous nous sommes projetés avec le partenaire brésilien jusqu'en 2041.

En conclusion, La Poste, La Banque postale et CNP Assurances seront des entreprises à mission au sens de la loi Pacte. Le statut d'entreprise publique nous donne la responsabilité d'être des entreprises à mission. Nous le faisons dans le groupe dès que nous le pouvons.

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