L'accord du Brexit n'est pas forcément pour nous un accord gagnant-gagnant ; disons que c'est « moins pire » que pas d'accord du tout. Tout dépendra de la capacité de la France à négocier ou à renégocier des accords bilatéraux avec le Royaume-Uni.
Les régions Normandie et Hauts-de-France, avec leurs ports de pêche, comme celui de Boulogne-sur-Mer, et leurs liaisons transmanche de Dieppe à Calais sont fortement impactées. Dans ma région, 80 % des pêches françaises ont lieu dans les eaux britanniques. Si un accord a été signé pour les cinq prochaines années, la très grande majorité des pêcheurs du Boulonnais sont toujours dans l'attente des licences leur permettant d'avoir accès aux eaux britanniques. Seules onze licences ont été attribuées, et si la France n'intervient pas rapidement, les autres pêcheurs vont mourir. Monsieur le ministre, pouvez-vous régler cette question rapidement ?
Concernant les liaisons transmanche, la principale compagnie, P&O Ferries, a réduit le nombre de ses navires à destination de Calais et a supprimé 1 100 emplois. La compagnie DFDS vient, quant à elle, de supprimer 142 emplois sur cet axe. Certes, le Brexit n'est pas la seule cause et la pandémie explique aussi une partie de ces licenciements. Le plan de soutien que vous avez évoqué prévoit-il de soutenir ces liaisons depuis la France ?
Et puis, il y a la question des frontières, à laquelle nous sommes attachés. D'abord, la frontière fiscale. Le Brexit libère la City, qui est un véritable paradis fiscal. La City va être encore plus agressive pour attirer la finance de l'Union européenne, notamment française, et pour développer le commerce de services financiers. Est-il prévu de revoir les conventions fiscales entre la France et le Royaume-Uni, pour empêcher les financiers de délocaliser à Londres les richesses produites dans notre pays ?
Enfin, le Brexit devrait nous amener à reconsidérer la question de la frontière franco-britannique, notamment les accords du Touquet de 2003, qui l'ont déplacée en France, à Calais, sous le tunnel et même à la gare du Nord, avec l'Eurostar. Ce déplacement de la frontière transforme le Nord de la France – le Calaisis et le Dunkerquois – en un véritable cul-de-sac pour tous ces hommes et ces femmes qui quittent leur pays et aspirent à rejoindre la Grande-Bretagne.
La France doit assumer la lourde responsabilité d'un accueil désastreux de milliers de pauvres gens et faire face à des morts de plus en plus nombreux dans la Manche. C'est la raison pour laquelle nous posons la question suivante : cette frontière, qui se trouve sur le sol français, ne doit-elle pas faire l'objet de discussions avec le Royaume-Uni, en vue de son rétablissement sur le sol britannique ?