Intervention de Jean Arthuis

Réunion du mercredi 31 mars 2021 à 11h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Jean Arthuis, président de la commission sur l'avenir des finances publiques :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés commissaires aux finances, j'ai donc à vous rendre compte des travaux de notre commission, instituée par le Gouvernement et installée le 4 décembre – vous-même, monsieur le président, monsieur le rapporteur général, étiez présents. Lui était assignée l'objectif d'établir un diagnostic et d'éclairer les évolutions possibles de nos finances publiques, au sortir de la crise de la covid-19, et de proposer de nouvelles règles de gouvernance et de nouveaux outils de pilotage afin d'assurer la soutenabilité des comptes publics sur le long terme. Pour atteindre cet objectif, nous avons procédé à plus de cent auditions, nous avons organisé des conférences entre économistes, nous avons demandé à la direction générale du trésor des analyses de trajectoires de finances publiques reposant sur des hypothèses macroéconomiques diverses. Nous avons également fait procéder à une enquête par les services du trésor de huit pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), pour l'essentiel des pays membres de la zone euro. Nous avons également fait procéder à des analyses d'opinion, qui ont été conduites par l'institut Ipsos, qui font apparaître que 83 % des Français sont inquiets de la situation des finances publiques et que 73 % estiment être mal informés de celle-ci.

Je voudrais faire devant vous le point sur nos principaux constats, qui nous ont amenés à tenter de définir une stratégie et, finalement, à proposer une transformation radicale de la gouvernance budgétaire.

Commençons par les constats. Personne n'a mis en cause le bien-fondé de l'action des pouvoirs publics face à la crise. Il s'agissait d'assurer la sécurité des Français et d'éviter le collapsus économique et social. Des masses de fonds publics, d'un niveau inédit en temps de paix, ont été mobilisées. Cette mobilisation a suscité au moins trois questions. Premièrement, d'où cet argent venait-il ? Deuxièmement, l'État pouvait-il continuer ainsi à s'endetter ? Troisièmement, dans quelle mesure une telle situation était-elle soutenable ?

Les fonds ont été abondants, mais ce n'est pas de l'argent magique ; l'État s'est endetté. Quant à la question de la capacité de la France à s'endetter, il n'y a pas eu de problème : les émissions du Trésor ont été l'objet de souscriptions surabondantes, tout s'est donc bien passé. Il est vrai que la Banque centrale européenne (BCE) a engagé des programmes de rachat sans précédent – il faut avoir à l'esprit que pratiquement 80 % des dettes émises par le trésor public français en 2020 se retrouvent aujourd'hui dans les livres de la Banque centrale européenne ou ceux d'autres banques centrales. Autrement dit, c'est plus que le déficit de l'année 2020 qui a ainsi été repris par les banques centrales. Il est clair que les taux d'intérêt sont historiquement bas, notamment en raison d'une épargne mondiale surabondante, et cette situation va sans doute durer. Aujourd'hui, sur des maturités de dix ans et même au-delà, les taux sont pratiquement négatifs.

Si la mobilisation d'argent a été facilitée par les programmes de rachats non seulement pour l'Europe mais pour le monde entier, le soutien de la BCE a été, il faut bien le reconnaître, tout à fait exceptionnel. Toutefois, cette aide de la BCE n'a pas vocation à durer : si l'inflation revient, il sera mis un terme à ces programmes exceptionnels.

En outre, cette situation ne doit pas masquer les problèmes structurels de nos finances publiques. Contrairement à d'autres pays, voisins, il faut bien reconnaître que depuis 1974 nous n'avons jamais équilibré nos comptes publics. Ainsi, la dette publique n'a cessé de progresser, représentant 20 % du produit intérieur brut (PIB) en 1980, 40 % en 1990, 60 % en 2000, 80 % en 2010 et pratiquement 100 % à la veille de la crise du Covid. Ces déficits constatés depuis 1974 s'inscrivent malheureusement dans un contexte de baisse tendancielle de la croissance du PIB. En effet, depuis les années soixante-dix, de décade en décade, les taux de croissance n'ont cessé de baisser pour atteindre, dans les années 2010, 1 % à 1,5 %.

Nous abordons cette crise avec un niveau de dépenses publiques particulièrement élevé et sensiblement plus élevé que celui des pays voisins. Elles représentent pratiquement 56 % du PIB, alors que la moyenne des vingt-sept États membres de l'Union européenne s'établit à 47 % et que les dépenses publiques de l'Allemagne sont plutôt de 42 % du PIB. La croissance de nos dépenses publiques entre 2005 et 2019 a été largement tirée par le secteur local et la sécurité sociale.

Sans orientation nouvelle, l'endettement public continuera d'augmenter dans le long terme. Nous avons étudié différents scénarios : tout laisse à penser que, autour de 2030, nous aurons peut-être une stabilisation, peut-être autour de 125 %, si tous les facteurs favorables sont réunis, mais rien n'en donne l'assurance. Dans ces conditions, nous devons être conscients également des faits et des risques les plus préoccupants, par exemple celui d'une hausse des taux d'intérêt. Leur hausse d'un point signifierait, au bout de dix ans, une augmentation de la charge de la dette de pratiquement 30 milliards d'euros. La dynamique de l'endettement est également plus que préoccupante car elle nous expose précisément au risque d'une remontée des taux d'intérêt. Elle fait également peser un risque sur la stabilité de la zone euro. Le bouclier de la monnaie unique nous a permis d'affronter la crise de 2008, crise internationale en même temps que crise des dettes publiques, dans des conditions à peu près satisfaisantes. Dans quelles conditions la France accéderait-elle, aujourd'hui, aux marchés financiers si elle n'était membre de la zone euro. Les règles que celle-ci s'est données ont été suspendues mais, n'en doutons pas, au sortir de la crise, elles seront rétablies, certes sans doute sous une forme différente, mais nous n'en serons pas moins rappelés à l'ordre si nous nous laissons aller à la progression de notre endettement. Il est à redouter que la zone euro n'entre alors en crise. Par ailleurs, troisième facteur, la mondialisation nous fait encourir des risques de crises. Que se passerait-il si, demain ou après-demain, ils se réalisaient ? Nous avons également conscience des investissements à opérer dans la transition écologique, et il faudra peut-être que notre protection sociale protège d'un cinquième risque : la dépendance.

Ayons donc conscience de la situation de nos finances publiques pour faire face à ces risques.

Il fallait essayer de définir une stratégie. Nous pensons que certaines pistes qui émergent aujourd'hui dans le débat public doivent être écartées. La première d'entre elles, c'est d'effacer tout ou partie de la dette publique. S'il s'agit des dettes détenues par le système des banques centrales, celles-ci versent des dividendes aux actionnaires que sont les États, fruit des intérêts qu'elles perçoivent ; c'est donc un jeu à somme nulle. En ce qui concerne un pays comme la France, dont la dette publique est détenue majoritairement par des investisseurs étrangers, ce serait un très mauvais signal que d'effacer la dette. Le recours à une dette perpétuelle nous paraît également devoir être écarté ; ce ne peut être une solution que de manière tout à fait marginale. Certes, les maturités de la dette britannique atteignent dix-huit ans, alors que les maturités de la dette française – pourtant les plus élevées de la zone euro – sont en moyenne d'un peu plus de huit ans, c'est parce qu'il y a au Royaume-Uni un système de fonds de pension qui n'existe pas en France,

Un cantonnement de la dette résultant de la crise de la covid est-il une solution ? Pour ma part, j'ai l'expérience d'un cantonnement de dette. Alors que j'étais ministre des Finances, à l'été 1995, s'est posée pour la première fois la question de savoir quoi faire de la dette sociale. Il n'y avait à l'époque pas encore de loi de financement de la sécurité sociale et, à la suite de la récession de 1993, la dette sociale s'élevait à 250 milliards de francs environ. Avec Alain Juppé, nous sommes convenus de placer cette dette dans un fonds dédié : la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES). Pour en assurer le remboursement, nous avons institué la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), et il était entendu qu'à partir de cette reprise de la dette sociale il n'y aurait plus de déficit de la sécurité sociale et que la CADES disparaîtrait au bout de quinze ans. En fait, celle-ci est devenue la voiture-balai des déficits chroniques de la sécurité sociale. D'ailleurs, elle a été mobilisée pour le cantonnement de la « dette sociale covid » constatée et à venir. Fallait-il aller plus loin ? Nous avons considéré qu'un cantonnement devait être adossé à une ressource spécifique, donc à un impôt ou une cotisation sociale nouvelle. Nous considérons que cela n'apporte pas grand-chose, que la dette résultant de la covid s'ajoutera à la dette globale, et chacun sait qu'en fait on ne rembourse jamais la dette : lorsque les maturités viennent à échéance, on souscrit des titres pour le même montant – ce qu'on appelle « rouler la dette publique ».

Nous avons donc estimé qu'il n'y avait pas d'intérêt à cantonner la dette Covid, qu'elle pouvait en revanche être isolée et qu'il était nécessaire d'informer l'opinion publique. Encore faut-il se donner les moyens d'évaluer précisément ce que sera cette dette Covid. Elle peut être estimée par différence avec ce qu'aurait été la dette sans la crise exceptionnelle que nous traversons – dont la vaccination nous permettra de sortir.

Dans cette nouvelle stratégie, il convient de ne pas renouveler les erreurs du passé, c'est-à-dire de ne pas consolider trop rapidement les finances publiques – ce qui s'est passé au lendemain de la crise financière internationale de 2008 et 2009. Nous estimons que les efforts accomplis aujourd'hui doivent se poursuivre, il s'agit de maintenir le « quoi qu'il en coûte » en veillant toutefois à ce qu'il s'agisse de dépenses exceptionnelles qui disparaîtront au lendemain de la crise et à éviter d'ouvrir la voie à des dépenses structurelles qui affecteraient nos finances publiques au-delà de cette crise.

La nouvelle stratégie doit aussi tenir compte de notre impossibilité d'augmenter les prélèvements obligatoires, la France faisant déjà partie des « champions » en la matière. Ils s'élèvent ainsi à 46,5 % du PIB, contre 40,5 % dans la zone euro.

Cette piste figurait dans sa feuille de route, mais notre commission – dont la composition était très diverse, avec des économistes français et étrangers, des responsables des secteurs public et privé, ainsi que d'anciens ministres de convictions politiques différentes – a convenu que le levier de l'augmentation des prélèvements obligatoires ne réglerait pas les problèmes de nos finances publiques.

Si nous devions nous en tenir à des pratiques qui ont prévalu jusqu'à maintenant, il n'est pas douteux que nous ne parviendrions pas à mettre un terme à cette lente mais régulière progression de la dette fondée sur des déficits chroniques. La stratégie appelle donc la maîtrise dans le temps des dépenses publiques.

Notre gouvernance, trop « court-termiste », est mal adaptée pour affronter le défi de la dette. Les règles budgétaires européennes ont pratiquement fait office de règles de gouvernance budgétaires jusqu'à présent, comme si la France n'avait pas été capable d'avoir ses propres règles. L'on a pu critiquer la limitation du déficit public à trois points de produit intérieur brut (PIB), mais convenons qu'il était presque devenu un objectif, au détriment de la recherche d'un équilibre dans la durée, qui devrait être la règle ; avec un déficit à hauteur de trois points de PIB, de manière chronique, la dette publique augmente forcément. Nous avons adressé chaque année un programme de stabilité (PSTAB), toujours trop optimiste, à la Commission européenne, en application du pacte de stabilité et de croissance (PSC) de 1997 et ne l'avons jamais respecté. Cela n'a conforté ni le crédit de la France auprès de ses partenaires européens, ni son autorité.

Nos prévisions vont rarement au-delà de cinq années, quand d'autres pays membres de l'OCDE vont jusqu'à vingt ou trente ans et quelquefois bien au-delà.

Par ailleurs, nos finances publiques sont fragmentées ; nous n'avons pas d'image globale de leur situation et cette complexité nuit considérablement à leur pilotage, à leur lisibilité, à leur compréhension et à leur appropriation par l'opinion publique. Les flux financiers entre les budgets de la sécurité sociale et de l'État sont multiples, et l'on dénombre parmi eux une quarantaine de taxes affectées, ce qui ne facilite pas la lisibilité ; il faudrait revenir à l'universalité. La gestion publique territoriale, elle aussi, est éclatée, avec 93 700 gestionnaires contre 15 000 en Allemagne : cela doit nous amener à réfléchir.

Cinq lois de programmation des finances publiques (LPFP) ont été adoptées depuis 2009. Couvrant théoriquement de quatre à six années, elles ont dans la pratique une durée de deux ans en moyenne et ont été peu respectées : cette caducité précoce ne peut pas durer.

Dans le calendrier contraint de l'examen des LPFP, il faut un échange approfondi au Parlement, ainsi qu'avec les représentants des élus locaux et des organismes de protection sociale. Leur insuffisante appropriation peut contribuer à expliquer leur suivi insuffisant.

Il faut aussi une stratégie de long terme, et donc une institution budgétaire indépendante, au mandat large qui lui permette d'exercer son autorité. Nous avons observé ce qui se pratique dans la plupart des pays de l'OCDE et constatons que la France s'est dotée d'une institution, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), dont l'autorité est reconnue mais dont le champ de responsabilité est tout de même très limité. Ses homologues sont chargés de l'analyse de la soutenabilité budgétaire de long terme, de la production de prévisions budgétaires et macroéconomiques distinctes de celles du Gouvernement – aujourd'hui, le HCFP se prononce après la fixation des hypothèses par l'exécutif –, d'un soutien direct au Parlement, de l'évaluation du coût des réformes, voire, dans certains pays, des programmes des candidats aux élections, et, enfin, du contrôle du respect des règles budgétaires.

Nous pensons nécessaire de très profondément et radicalement transformer la gouvernance budgétaire et y voyons une condition de la réussite de notre stratégie de redressement des finances publiques. Cette transformation est fondée sur trois piliers.

Le premier pilier est de créer une norme de dépense pluriannuelle pour toutes administrations publiques, ainsi qu'un niveau plancher de dépenses d'avenir. Selon nous, la LPFP devrait définir à chaque début de mandat un objectif de dépenses qui concernera l'ensemble des administrations publiques : l'État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale. Il serait décliné pour chacun de ces sous-secteurs et le respect de cette trajectoire serait suivi chaque année au moyen d'un compteur des écarts afin d'éviter que la maîtrise des dépenses se fasse au détriment de celles favorables à la croissance de demain. Le plancher de dépenses d'avenir engloberait des dépenses d'investissement, mais également de fonctionnement : nous avons eu de multiples débats, mais il existe des investissements sans effet sur l'avenir, au contraire, incontestablement, de certaines charges de fonctionnement.

La déclinaison de cette norme dans les différentes sphères publiques prendrait la forme, pour l'État, de contrats pluriannuels entre les principales directions d'administration centrale et le ministère chargé des comptes publics – sur le modèle de ceux expérimentés avec l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et la direction générale des finances publiques (DGFiP) –, de sorte qu'un directeur sache à quoi s'en tenir non seulement au cours de l'année qui vient mais aussi sur une période suffisamment longue pour entreprendre une véritable réforme de l'administration dont il a la charge, pour les administrations de sécurité sociale (ASSO), d'un élargissement du périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) au régime d'assurance chômage et aux régimes de retraite légalement obligatoires, sans toutefois modifier leurs règles de gouvernance, et, pour les collectivités territoriales – en tenant bien sûr compte de leur autonomie de gestion –, par une extension des contrats dits de Cahors, lesquels ont, semble-t-il, donné des résultats tout à fait satisfaisants.

Le deuxième pilier est d'instituer une vigie budgétaire à l'approche de long terme. Les membres de cette institution indépendante exerceraient à temps plein et seraient à la fois des experts issus de nos administrations, comme la direction générale du trésor, la Banque de France, la Banque centrale européenne (BCE) et la sécurité sociale, mais aussi des économistes. Nous suggérons qu'elle soit rattachée au Parlement, à l'image du Congressional budget office (CBO) aux États-Unis ; il y a eu de tels projets dans les années passées, mais le Parlement n'a pas encore manifesté de véritable intérêt en ce sens. Si tel n'était pas le cas, alors deux voies seraient possibles : le renforcement du HCFP ou la création de l'équivalent de l' Office for budget responsibility (OBR) britannique, avec un mode de désignation de ses dirigeants sur le modèle de celui applicable à ceux du Conseil constitutionnel et du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).

Le troisième pilier est d'accroître les prérogatives du Parlement. Au lendemain du renouvellement de l'Assemblée nationale, avant même le vote de la première loi de finances et de la première LFSS, le Parlement se mobiliserait avec le Gouvernement pour établir la LPFP couvrant la législature : dans ces conditions, il faudrait veiller à fixer le rythme de la stabilisation puis du reflux du ratio de la dette publique rapportée au PIB, en jouant donc aussi sur le paramètre de la croissance et en intégrant un plancher de dépenses d'avenir dans cet arbitrage. Sans doute une telle disposition n'est-elle pas facile. Je connais les interrogations du président Woerth sur sa faisabilité – comment trouver le temps entre une élection qui a lieu au mois de juin et un examen du projet de loi de finances (PLF) qui doit débuter au plus tard le 13 octobre pour respecter les soixante-dix jours prévus par l'article 47 de la Constitution ? – et sans doute échangerons-nous nos arguments dans un instant. Ce moment solennel en début de législature serait gage de crédibilité.

Peut-être faudrait-il aussi revoir le temps que le Parlement consacre à l'examen des PLF : sommes-nous sûrs que les cinq semaines qui y sont consacrées à l'Assemblée nationale puis les trois semaines au Sénat soient marquées par une vraie valeur ajoutée parlementaire ? N'est-ce pas plutôt un moment où les arbitrages du Premier ministre peuvent être plus ou moins contournés par voie d'amendement – certains ministres se prêtant quelquefois à ce jeu ? C'est pour cela que nous avons osé imaginer que le budget soit défendu par le seul ministre chargé des comptes publics et qu'en revanche le temps économisé soit mis à profit pour le « printemps de l'évaluation » : que les ministres chargés de la dépense publique viennent s'expliquer et, sans doute, imaginer avec la représentation nationale des réformes structurelles de nature à réduire son niveau.

Il faut aussi une conférence nationale sur les finances et la dette publiques, ainsi qu'une présentation globale et synthétique de l'ensemble des recettes comme des dépenses par nature, de telle sorte que les citoyens puissent s'approprier la situation et participer à la réflexion sur l'urgente nécessité de sa maîtrise.

Nous avons également posé le principe que, désormais, l'évolution des dépenses publiques devait être inférieure à celle des recettes publiques.

Enfin, je voudrais rappeler que nous sommes, dans la zone euro et que cette dernière a été instituée pour mettre un terme aux dévaluations compétitives qui ruinaient la croissance et entraînaient le chômage. D'ailleurs, les règles européennes ont survécu aux alternances. En 1997, était sur la table, à la veille des élections consécutives à la dissolution de l'Assemblée nationale, le projet du PSC. J'entends encore M. Lionel Jospin dire que, s'il devait être à la tête d'une majorité nouvelle, il ne le signerait pas en l'état. À peine celle-ci était-elle en place qu'elle le faisait sans rien y modifier, parce qu'elle avait compris que, grâce à lui et à la monnaie unique, les taux d'intérêt baissaient d'une manière considérable et que la remise en cause de ses dispositions allait entraîner une explosion de ces taux. Le même phénomène s'est produit en 2012, lorsqu'était évoqué un resserrement du PSC au moyen du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (TSCG). Je me souviens de M. François Hollande avançant que, s'il était élu Président de la République, il ne serait pas question de ratifier ce traité. Tel a pourtant été le cas car, une fois encore, la sanction eût été une hausse considérable des taux d'intérêt.

Je ne dis donc pas que les règles anciennes doivent être rétablies en l'état lorsque nous serons sortis de cette crise – elles ont été suspendues et tous les pays de la zone euro ont augmenté leurs dépenses publiques et assuré la sécurité des citoyens en tentant de prévenir l'effondrement économique et social –mais elles reviendront : la Commission européenne fera des propositions au lendemain des élections fédérales allemandes, qui auront lieu à la fin de l'année. Je ne peux pas préjuger de leur teneur, mais si, en tout cas, la France veut faire partager ses préoccupations avec ses partenaires européens, il est important qu'elle définisse d'abord ses propres règles, marquées du sceau de la responsabilité. L'Europe a joué la carte de la solidarité : j'ai dit ce que nous a apporté la BCE avec son pandemic emergency purchase programme (PEPP) en rachetant de la dette publique d'une manière aussi systématique, et il y a également ce projet d'un emprunt commun de 750 milliards d'euros, qui constitue une sorte de cantonnement européen, parmi lesquels la France bénéficiera de 40 milliards d'euros de subventions, sans doute pour des investissements dans la transition énergétique. Cependant, aussi longtemps qu'il n'y aura pas de gouvernement économique, financier et budgétaire de la zone euro, ces règles reviendront : nous avons donc intérêt à définir les nôtres si nous voulons qu'elles marquent de leur empreinte les règles européennes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.