Intervention de Marlène Schiappa

Réunion du mardi 25 mai 2021 à 17h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté :

Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, qui est retenu par d'autres obligations et m'a demandé de le représenter aujourd'hui devant cette commission d'évaluation.

Cet exercice est fondamental car, si le Parlement a pour mission essentielle de voter les crédits au travers de la loi de finances, il exerce également un rôle majeur pour la démocratie, sur lequel vous avez beaucoup insisté, en contrôlant l'exécution et l'évaluation des politiques menées par le Gouvernement. Cet exercice n'avait malheureusement pas pu avoir lieu l'an dernier, du fait de la pandémie de covid-19. Il est bon de renouer avec cette pratique des printemps de l'évaluation, désormais bien installée.

Le budget du ministère de l'intérieur regroupe trois missions. Cette première discussion est consacrée à la mission Administration générale et territoriale de l'État, qui comprend les crédits de l'administration centrale du ministère, indispensables pour soutenir l'activité opérationnelle de nos forces, les crédits destinés au financement de la vie politique et à l'organisation des élections – si importants pour la vitalité démocratique – et le budget du réseau des préfectures et sous-préfectures – qui réalisent un travail remarquable en cette période particulière de crise sanitaire et dont je salue l'engagement.

Je répondrai tout d'abord aux questions relatives aux CERT avant de vous présenter la gestion budgétaire de l'année 2020 et la mise en œuvre des priorités gouvernementales pour l'administration générale et territoriale de l'État, dans le contexte évidemment très particulier que chacun connaît.

Les CERT ont été créés en 2017 dans le cadre du PPNG. J'ai bien pris note de la recommandation de la rapporteure d'augmenter les effectifs d'agents titulaires en leur sein, plutôt que de recourir à des contractuels ou à des vacataires, afin de limiter l'augmentation des délais d'instruction.

Les cinquante-huit CERT instruisent les demandes de titres adressées au ministère de l'intérieur : CNI, passeport et permis de conduire. En étant rattachés aux préfectures, ils jouent aussi un rôle important dans la lutte contre la fraude documentaire. Leur création est allée de pair avec la fermeture des guichets de proximité dans les préfectures. Les citoyens peuvent désormais déposer une demande ou une pré-demande de titre sur internet, tandis que l'instruction des dossiers peut être mutualisée entre plusieurs départements par le biais des CERT. Ces derniers ont atteint leur degré de maturité même si, bien entendu, l'année 2020 a été hors du commun.

Les délais moyens d'instruction, qui correspondent à la partie du travail relevant des CERT et de la préfecture, sont très bons pour l'exercice 2020. Le délai moyen d'instruction d'une demande de passeport biométrique est de 5,7 jours en 2020, soit 3,3 jours de moins que la cible initiale annoncée en loi de finances. Pour une demande de CNI, il faut compter sept jours et demi en moyenne, ce qui est inférieur d'un jour et demi aux prévisions. Quant aux permis de conduire et aux stages de récupération de points, le délai d'instruction s'élève à six jours et demi, soit un jour et demi de moins par rapport à la cible initiale.

Soyons honnêtes, ces très bons résultats sont d'abord liés à la crise sanitaire puisque les demandes de passeport ont chuté de 43 % en 2020 par rapport à 2019. Mais il ne faut pas sous-estimer la forte mobilisation des agents, des préfectures comme des CERT, qui a permis de maintenir des délais d'instruction très réduits depuis le printemps 2020, malgré la période de confinement. Les services du ministère de l'intérieur restent pleinement mobilisés pour faire face à la reprise de la demande, en raison de la réouverture des frontières et de la reprise de l'activité générale. Leurs délais d'instruction restent inférieurs aux cibles prévues en 2020.

Venons-en aux moyens consacrés aux CERT. Fin janvier 2021, ils comptaient 1 525 équivalents temps plein travaillé (ETPT), dont moins de 11 % de contractuels. Le recours à ces derniers a permis d'adapter les moyens humains consacrés à l'instruction des titres aux fluctuations de la demande dans le temps, mais aussi par département. La qualité du service ne s'en est pas ressentie pour autant car ces personnes sont formées et encadrées dans l'exercice de leurs missions. Enfin, c'est aussi le sens de l'action du Gouvernement que d'élargir la possibilité de recourir à des contractuels, grâce à la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Au-delà de l'instruction des titres, le Gouvernement sait combien il a pu être tentant, ces dernières années, de faire peser sur l'administration centrale, et encore plus sur l'administration territoriale de l'État, les économies à réaliser pour financer la sécurité. Toutefois, il a veillé à ce que cette administration territoriale dispose pleinement des moyens de son action.

À la demande du Président de la République et du Premier ministre, le ministère de l'intérieur n'a pas réduit les effectifs au sein des préfectures et des sous-préfectures, alors que 463 suppressions de postes étaient prévues en 2021. Cette décision historique marque le terme de la forte déflation entamée depuis plus de dix ans qui a fait perdre au réseau préfectoral 25 % de ses effectifs. Nous répondons ainsi à une forte attente, exprimée dans le cadre du grand débat national.

J'en viens à l'exécution des crédits votés en loi de finances pour 2020 et à la mise en œuvre des mesures votées par le Parlement.

Trois faits ont marqué l'année 2020. Tout d'abord, la préparation de la réforme de l'organisation territoriale de l'État s'est traduite par la création du programme 354, Administration territoriale de l'État, qui représente une avancée importante pour la réforme de cette administration. Par ailleurs, nous avons créé la direction du numérique du ministère de l'intérieur (DNUM) et le service d'achat du ministère. Enfin, la crise sanitaire a eu des conséquences sur la gestion des crédits.

Le programme 354 avait été créé en 2020 pour renforcer l'efficacité du fonctionnement des services déconcentrés en mutualisant leurs moyens. Les crédits et les emplois des préfectures, des sous-préfectures et des directions départementales interministérielles – les fameuses DDI – sont désormais regroupés au niveau départemental. Au niveau régional, ce programme inclut les moyens des secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR), ainsi que des directions et des délégations régionales placées sous l'autorité des préfets de région. Les mutualisations sont engagées mais il est encore trop tôt pour en mesurer les effets et en débattre. En outre, l'épidémie de covid-19 a eu des répercussions sur le calendrier. La création des secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), initialement prévue en 2020, a dû être décalée au 1er janvier 2021. Ces SGCD permettent de concentrer dans un même programme les moyens des DDI et des préfectures consacrés aux fonctions support – achats, logistique, immobilier, informatique. Plus de 5 500 agents sont concernés par cette réforme, dont plus de 1 800 relèvent d'autres ministères – transition écologique, agriculture, santé et solidarité, économie et finances.

Je veillerai, dans les prochains mois, au respect des objectifs du Gouvernement et du législateur, qui a voté ces crédits dans la loi de finances pour 2020 et les a confirmés dans celle pour 2021.

La réforme de l'organisation territoriale doit permettre d'améliorer le service rendu aux Français à moindre coût, grâce à une efficacité accrue des circuits de gestion. La réforme augmente la capacité d'action de l'administration de l'État au niveau territorial, au plus près des Français, en renforçant le pouvoir décisionnaire des préfets de région et de département dans l'allocation des moyens.

La création de la DNUM, deuxième priorité de la mission Administration générale et territoriale de l'État en 2020, a permis d'organiser une fonction numérique forte susceptible de répondre aux grands enjeux. La stratégie numérique du ministère s'est développée au travers d'une nouvelle gouvernance, menée avec l'ensemble des services concernés du ministère. Elle s'est traduite par le regroupement de l'ensemble des crédits relatifs aux systèmes d'information au sein du programme support du ministère, hormis les équipements opérationnels ou liés à des métiers.

La pandémie de covid-19 a eu des conséquences importantes. Sur les 4 milliards d'euros de crédits prévus pour la mission Administration générale et territoriale de l'État, 187 millions n'ont pas été dépensés, soit moins de 5 % du total prévu. Cette moindre consommation est liée au confinement : moins de déplacements, moins de fournitures de bureau et un report d'une partie des projets en 2021.

Toutefois, une partie de ces crédits a permis d'accompagner les personnels durant la crise en développant le télétravail et en fournissant du matériel de protection. Nous avons pu innover pour nous adapter à cette période particulière.

En conclusion, les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l'État ont permis de traduire les objectifs largement partagés d'une présence accrue de l'État et du service public dans tout le territoire de la République.

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