Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mardi 25 mai 2021 à 17h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission, réunie en commission d'évaluation des politiques publiques, entend Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté.

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Nous débutons cet après-midi le printemps de l'évaluation, qui donnera lieu à des réunions de notre commission jusqu'au mercredi 9 juin.

Elles s'inscrivent dans le cadre de l'examen du projet de loi de règlement, qui a été déposé cette année sur le bureau de l'Assemblée dès le 14 avril. Nous avions auditionné à ce sujet les ministres Bruno Le Maire et Olivier Dussopt, en même temps que nous examinions le programme de stabilité. Nous examinerons les articles du projet de loi de règlement lors de la réunion de commission de demain matin, avant un examen en séance mercredi 16 juin.

L'organisation des commissions d'évaluation des politiques publiques (CEPP) renoue avec celle retenue en 2019, en prévoyant une audition des ministres compétents. Je m'en réjouis car c'est l'occasion, dans le champ de chaque grande politique publique, de les interroger quant à l'exécution des crédits de l'année passée, non pas selon une vision strictement comptable mais en dégageant des problématiques plus fondamentales relatives à la dépense publique, à son exécution et à son efficience. Nous avons essayé cette année de structurer chaque CEPP en identifiant des ensembles cohérents, puisque des reproches avaient été formulés au sujet de l'organisation des travaux en 2019. Les missions sont parfois très larges et méritent une discussion distincte, afin d'éviter une trop grande hétérogénéité des thématiques abordées.

Ainsi, pour cette première CEPP, les trois discussions distinctes concerneront l'administration générale et territoriale de l'État, l'immigration puis la sécurité, cette dernière mission faisant l'objet de deux rapports spéciaux. Auparavant, tout ceci était étudié en un seul bloc, les groupes politiques ne disposant que d'un seul temps de parole pour l'ensemble, ce qui était insuffisant.

Les rapporteurs spéciaux présenteront les conclusions de leurs travaux en dix minutes puis les rapporteurs pour avis, s'ils sont présents, pourront s'exprimer pendant cinq minutes. Après une intervention du président de la commission et du rapporteur général, s'ils le souhaitent, la parole sera donnée au ministre pendant quinze minutes. Dans un second temps, nous entendrons les orateurs de chaque groupe, pour deux minutes chacun, ainsi que les députés qui souhaitent intervenir. Le ministre pourra ensuite leur répondre.

Avec cet exercice, nous nous inscrivons dans une démarche d'évaluation. Nous ne sommes pas ici pour parler des projets de loi ou des prochaines dispositions financières, mais bien pour évoquer la gestion des crédits en 2020, en lien avec le projet de loi de règlement et, surtout, avec le thème de l'évaluation qui a été choisi par chaque rapporteur spécial et retenu in fine par le bureau de notre commission.

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Les dépenses de la mission Administration générale et territoriale de l'État ont atteint 3,87 milliards d'euros en crédits de paiement en 2020. Par comparaison avec l'exercice précédent, il s'agit d'une hausse d'environ un milliard d'euros, ce qui peut sembler beaucoup. En réalité, elle est due à une évolution importante du périmètre des programmes de la mission, et plus particulièrement de deux d'entre eux sur lesquels je vais revenir.

Si l'on fait abstraction de ce changement de maquette, les dépenses de la mission sont en réalité stables. J'observe d'ailleurs que l'exécution est assez proche de la prévision, malgré la crise sanitaire.

Rappelons que la majorité des crédits relève des dépenses de titre 2 au sens de la LOLF, c'est-à-dire des dépenses de personnel. Cette caractéristique a eu pour conséquence de limiter les effets néfastes de la crise sanitaire sur les budgets de la mission. Les surcoûts observés, environ 34 millions d'euros pour le programme 354, Administration territoriale de l'État, par exemple, sont principalement dus aux frais engendrés par le travail à distance, la prime covid pour les personnels concernés, les mesures d'hygiène au sein des bureaux et des espaces d'accueil du public. Toutefois, l'ensemble de ces coûts n'a pu être imputé sur l'exercice 2020, notamment en ce qui concerne le report du second tour des élections municipales – en raison du décalage du calendrier de rendu des décisions de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

On peut se féliciter de la résilience et de l'effort considérable fourni par le réseau des préfectures pendant la pandémie. Ils témoignent du caractère essentiel de l'administration territoriale de l'État et du travail de ses agents.

Toutefois, je déplore la gestion compliquée du télétravail au sein des services. Il est vrai qu'il existait des obstacles matériels, et surtout culturels, à la mise en place avec une telle rapidité d'une aussi nouvelle méthode de travail. Il n'empêche qu'on peut regretter les retards pris dans sa mise en œuvre concrète, probablement symptomatique de la vision générale du numérique dans les administrations.

Revenons à l'évolution du périmètre des programmes 354, Administration territoriale de l'État, et 216, Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur, qui explique la quasi-totalité de la hausse des dépenses de la mission. Le renforcement de sa fonction support et la progression de la mutualisation des moyens ont en effet conduit aux transferts d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement en provenance du programme Moyens mutualisés des administrations déconcentrées de la mission Direction de l'action du Gouvernement ainsi que de la mission Sécurités, venus abonder le programme 216.

Je ne peux que saluer cette modernisation bienvenue de l'administration déconcentrée et du ministère de l'intérieur en général. Cela permet d'atténuer un des travers que constitue le fonctionnement en silo. Cependant il est encore un peu tôt pour dresser le bilan de ces évolutions, d'autant plus que la crise sanitaire a retardé l'effet de certaines d'entre elles. Nous aurons probablement l'occasion d'en rediscuter lors du prochain projet de loi de finances, mais aussi lorsque l'Assemblée examinera le projet de loi relatif à la décentralisation, la différenciation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit 4D.

Tels étaient les principaux éléments que je voulais aborder concernant l'exécution des crédits pour l'année 2020.

Je souhaite maintenant faire un point sur les travaux d'évaluation, qui ont concerné les moyens des centres d'expertise de ressources et des titres (CERT). Ces structures sont chargées d'instruire les demandes de cartes nationales d'identité (CNI), de passeports, de permis de conduire et de certificats d'immatriculation. Les CERT ont été mis en place depuis 2017 dans le cadre du plan préfectures nouvelle génération (PPNG) pour remplacer les anciens guichets et accroître la dématérialisation des demandes.

J'ai choisi ce thème parce que je m'étais inquiétée, à l'occasion de l'examen du PLF 2021, du recours excessif aux contractuels et aux vacataires dans ces centres, la question ayant souvent été soulevée lors des auditions. Malheureusement, mes travaux ont confirmé ce que je craignais : du fait de l'insuffisance de leurs effectifs, les CERT ne disposent pas des moyens pérennes pour assurer leur mission. Le recours temporaire à des contractuels pour des besoins permanents constitue une solution de facilité, destinée à pallier une mauvaise anticipation des capacités logistiques nécessaires pour ces structures.

Certes, on observe une amélioration en 2020, avec une réduction des stocks de dossiers en retard perceptible au travers des indicateurs de performance. Mais celle-ci résulte de la crise sanitaire et de la chute du nombre de demandes des usagers.

Dès lors, nous pouvons craindre la réapparition des dysfonctionnements observés ces trois dernières années, auquel s'ajouterait un effet de rattrapage, sans compter l'engouement pour la nouvelle carte d'identité électronique imposée par la réglementation européenne.

J'en conclus que le PPNG n'est pas soutenable en raison d'effectifs insuffisants et je plaide pour des moyens supplémentaires pour les CERT.

Je formule quatre recommandations principales : renforcer les effectifs des CERT et améliorer leur attractivité pour les agents, procéder à une révision générale des outils informatiques des CERT, simplifier la réglementation relative à la délivrance des certificats d'immatriculation des véhicules et dresser un bilan de la politique française d'échange des permis de conduire étrangers, mieux anticiper les évolutions liées à la conclusion de conventions internationales.

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La presse a fait état encore aujourd'hui de la situation des CERT et, surtout de l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS).

La chaîne de délivrance des titres comprend au moins trois maillons : la mairie, dans laquelle se rend le demandeur, puis les CERT, et enfin l'ANTS, qui produit et délivre les documents. Cela fait beaucoup. C'est aussi une charge pour les mairies, dont une partie du personnel municipal participe à ce travail. L'État accorde à ce titre un petit dégrèvement, mais qui ne correspond pas au coût réel.

On entend un mécontentement assez récurrent des usagers, variable en fonction du type de document demandé. Je comprends des conclusions de la rapporteure spéciale que les dysfonctionnements constatés se situent plutôt au niveau des CERT pour des raisons d'effectifs ; ils découlent aussi, selon moi, de changements de logiciels – parfois étonnants et en tout cas insuffisamment efficaces.

En tout état de cause, ce sont les mairies et l'ANTS qui subissent le mécontentement des demandeurs. Globalement, les délais de délivrance de titres sont pourtant assez acceptables, même s'il faut parfois autant de temps pour obtenir un rendez-vous que pour aller se faire vacciner contre la covid-19. Qu'en pensent la rapporteure et la ministre ? Il est nécessaire de faire connaître aux citoyens la chaîne des responsabilités et les points qu'il faut améliorer.

Ma deuxième question concerne les préfets. Le Gouvernement a fait part de sa volonté de supprimer des corps, dont le corps préfectoral. Qu'en est-il exactement ? Le débat autour des mérites respectifs d'une fonction publique statutaire et d'une fonction publique de métier est ancien. S'orienter vers une fonction publique organisée par grand métier est évidemment important. Bien entendu, les préfets resteront des préfets et les ambassadeurs des ambassadeurs, mais leur carrière ne sera pas gérée de la même manière. Pourquoi pas ?

Quel est votre avis sur l'intérêt d'une telle réforme en termes de ressources humaines ? Quel en sera le coût ? Si elle a lieu, il s'agira d'une réforme importante pour l'ensemble de la fonction publique et nous aurons à en débattre.

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Je me réjouis de cette nouvelle saison du printemps de l'évaluation, qui est chaque année plus pertinente puisque nous choisissons des thèmes d'évaluation de politiques publiques d'actualité et que nous les éclairons par l'étude de l'exécution des crédits de l'année précédente. L'exercice est presque devenu un rituel, qui répond à l'adage auquel le président et nombre d'entre nous sommes attachés : moins d'autorisations à l'automne, mais plus d'évaluation au printemps. Complétée par la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques que le président et moi-même avons déposée, cette démarche portera ses fruits.

Lorsque l'on parle de LOLF, il est toujours pertinent de s'intéresser aux modifications de maquettes. Avec le recul, cette nouvelle maquette apparaît-elle pertinente ? Quelle serait votre analyse de la mise en commun de ces programmes, destinés à mieux servir les fonctions support du ministère de l'intérieur ? Cette refonte permettra-t-elle d'améliorer la gestion et l'efficacité de la dépense publique, notamment au travers de la mutualisation du back office déconcentré du ministère ?

S'agissant de l'organisation du travail des agents du ministère pendant la pandémie, de nouvelles pratiques ont-elles pu être adoptées ? Certaines d'entre elles seront-elles durables ? Les nouvelles formes de travail à distance permettront-elles de faire face aux moyens insuffisants des CERT, pointés du doigt par la rapporteure spéciale ? N'y a-t-il pas là une manière de s'organiser différemment, sans forcément revoir l'équilibre du PPNG ?

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Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté

Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, qui est retenu par d'autres obligations et m'a demandé de le représenter aujourd'hui devant cette commission d'évaluation.

Cet exercice est fondamental car, si le Parlement a pour mission essentielle de voter les crédits au travers de la loi de finances, il exerce également un rôle majeur pour la démocratie, sur lequel vous avez beaucoup insisté, en contrôlant l'exécution et l'évaluation des politiques menées par le Gouvernement. Cet exercice n'avait malheureusement pas pu avoir lieu l'an dernier, du fait de la pandémie de covid-19. Il est bon de renouer avec cette pratique des printemps de l'évaluation, désormais bien installée.

Le budget du ministère de l'intérieur regroupe trois missions. Cette première discussion est consacrée à la mission Administration générale et territoriale de l'État, qui comprend les crédits de l'administration centrale du ministère, indispensables pour soutenir l'activité opérationnelle de nos forces, les crédits destinés au financement de la vie politique et à l'organisation des élections – si importants pour la vitalité démocratique – et le budget du réseau des préfectures et sous-préfectures – qui réalisent un travail remarquable en cette période particulière de crise sanitaire et dont je salue l'engagement.

Je répondrai tout d'abord aux questions relatives aux CERT avant de vous présenter la gestion budgétaire de l'année 2020 et la mise en œuvre des priorités gouvernementales pour l'administration générale et territoriale de l'État, dans le contexte évidemment très particulier que chacun connaît.

Les CERT ont été créés en 2017 dans le cadre du PPNG. J'ai bien pris note de la recommandation de la rapporteure d'augmenter les effectifs d'agents titulaires en leur sein, plutôt que de recourir à des contractuels ou à des vacataires, afin de limiter l'augmentation des délais d'instruction.

Les cinquante-huit CERT instruisent les demandes de titres adressées au ministère de l'intérieur : CNI, passeport et permis de conduire. En étant rattachés aux préfectures, ils jouent aussi un rôle important dans la lutte contre la fraude documentaire. Leur création est allée de pair avec la fermeture des guichets de proximité dans les préfectures. Les citoyens peuvent désormais déposer une demande ou une pré-demande de titre sur internet, tandis que l'instruction des dossiers peut être mutualisée entre plusieurs départements par le biais des CERT. Ces derniers ont atteint leur degré de maturité même si, bien entendu, l'année 2020 a été hors du commun.

Les délais moyens d'instruction, qui correspondent à la partie du travail relevant des CERT et de la préfecture, sont très bons pour l'exercice 2020. Le délai moyen d'instruction d'une demande de passeport biométrique est de 5,7 jours en 2020, soit 3,3 jours de moins que la cible initiale annoncée en loi de finances. Pour une demande de CNI, il faut compter sept jours et demi en moyenne, ce qui est inférieur d'un jour et demi aux prévisions. Quant aux permis de conduire et aux stages de récupération de points, le délai d'instruction s'élève à six jours et demi, soit un jour et demi de moins par rapport à la cible initiale.

Soyons honnêtes, ces très bons résultats sont d'abord liés à la crise sanitaire puisque les demandes de passeport ont chuté de 43 % en 2020 par rapport à 2019. Mais il ne faut pas sous-estimer la forte mobilisation des agents, des préfectures comme des CERT, qui a permis de maintenir des délais d'instruction très réduits depuis le printemps 2020, malgré la période de confinement. Les services du ministère de l'intérieur restent pleinement mobilisés pour faire face à la reprise de la demande, en raison de la réouverture des frontières et de la reprise de l'activité générale. Leurs délais d'instruction restent inférieurs aux cibles prévues en 2020.

Venons-en aux moyens consacrés aux CERT. Fin janvier 2021, ils comptaient 1 525 équivalents temps plein travaillé (ETPT), dont moins de 11 % de contractuels. Le recours à ces derniers a permis d'adapter les moyens humains consacrés à l'instruction des titres aux fluctuations de la demande dans le temps, mais aussi par département. La qualité du service ne s'en est pas ressentie pour autant car ces personnes sont formées et encadrées dans l'exercice de leurs missions. Enfin, c'est aussi le sens de l'action du Gouvernement que d'élargir la possibilité de recourir à des contractuels, grâce à la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Au-delà de l'instruction des titres, le Gouvernement sait combien il a pu être tentant, ces dernières années, de faire peser sur l'administration centrale, et encore plus sur l'administration territoriale de l'État, les économies à réaliser pour financer la sécurité. Toutefois, il a veillé à ce que cette administration territoriale dispose pleinement des moyens de son action.

À la demande du Président de la République et du Premier ministre, le ministère de l'intérieur n'a pas réduit les effectifs au sein des préfectures et des sous-préfectures, alors que 463 suppressions de postes étaient prévues en 2021. Cette décision historique marque le terme de la forte déflation entamée depuis plus de dix ans qui a fait perdre au réseau préfectoral 25 % de ses effectifs. Nous répondons ainsi à une forte attente, exprimée dans le cadre du grand débat national.

J'en viens à l'exécution des crédits votés en loi de finances pour 2020 et à la mise en œuvre des mesures votées par le Parlement.

Trois faits ont marqué l'année 2020. Tout d'abord, la préparation de la réforme de l'organisation territoriale de l'État s'est traduite par la création du programme 354, Administration territoriale de l'État, qui représente une avancée importante pour la réforme de cette administration. Par ailleurs, nous avons créé la direction du numérique du ministère de l'intérieur (DNUM) et le service d'achat du ministère. Enfin, la crise sanitaire a eu des conséquences sur la gestion des crédits.

Le programme 354 avait été créé en 2020 pour renforcer l'efficacité du fonctionnement des services déconcentrés en mutualisant leurs moyens. Les crédits et les emplois des préfectures, des sous-préfectures et des directions départementales interministérielles – les fameuses DDI – sont désormais regroupés au niveau départemental. Au niveau régional, ce programme inclut les moyens des secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR), ainsi que des directions et des délégations régionales placées sous l'autorité des préfets de région. Les mutualisations sont engagées mais il est encore trop tôt pour en mesurer les effets et en débattre. En outre, l'épidémie de covid-19 a eu des répercussions sur le calendrier. La création des secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), initialement prévue en 2020, a dû être décalée au 1er janvier 2021. Ces SGCD permettent de concentrer dans un même programme les moyens des DDI et des préfectures consacrés aux fonctions support – achats, logistique, immobilier, informatique. Plus de 5 500 agents sont concernés par cette réforme, dont plus de 1 800 relèvent d'autres ministères – transition écologique, agriculture, santé et solidarité, économie et finances.

Je veillerai, dans les prochains mois, au respect des objectifs du Gouvernement et du législateur, qui a voté ces crédits dans la loi de finances pour 2020 et les a confirmés dans celle pour 2021.

La réforme de l'organisation territoriale doit permettre d'améliorer le service rendu aux Français à moindre coût, grâce à une efficacité accrue des circuits de gestion. La réforme augmente la capacité d'action de l'administration de l'État au niveau territorial, au plus près des Français, en renforçant le pouvoir décisionnaire des préfets de région et de département dans l'allocation des moyens.

La création de la DNUM, deuxième priorité de la mission Administration générale et territoriale de l'État en 2020, a permis d'organiser une fonction numérique forte susceptible de répondre aux grands enjeux. La stratégie numérique du ministère s'est développée au travers d'une nouvelle gouvernance, menée avec l'ensemble des services concernés du ministère. Elle s'est traduite par le regroupement de l'ensemble des crédits relatifs aux systèmes d'information au sein du programme support du ministère, hormis les équipements opérationnels ou liés à des métiers.

La pandémie de covid-19 a eu des conséquences importantes. Sur les 4 milliards d'euros de crédits prévus pour la mission Administration générale et territoriale de l'État, 187 millions n'ont pas été dépensés, soit moins de 5 % du total prévu. Cette moindre consommation est liée au confinement : moins de déplacements, moins de fournitures de bureau et un report d'une partie des projets en 2021.

Toutefois, une partie de ces crédits a permis d'accompagner les personnels durant la crise en développant le télétravail et en fournissant du matériel de protection. Nous avons pu innover pour nous adapter à cette période particulière.

En conclusion, les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l'État ont permis de traduire les objectifs largement partagés d'une présence accrue de l'État et du service public dans tout le territoire de la République.

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Je vous avais posé deux questions, concernant les conséquences de la réforme envisagée pour le statut des préfets et l'articulation des responsabilités entre les CERT et l'ANTS dans la délivrance de titres. Vous pourrez y répondre à la suite de l'intervention des orateurs des groupes.

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La mission Administration générale et territoriale de l'État est une mission particulière. Elle vise à garantir aux citoyens l'exercice de leurs libertés publiques, à assurer la présence et la continuité de l'État dans l'ensemble des territoires de la République et à mener, à l'échelon local, les politiques publiques nationales.

Cette mission comprend notamment les programmes Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur et Administration territoriale de l'État, qui constituent des programmes support du ministère de l'intérieur. Ils réduisent de fait les marges de manœuvre des responsables de programme des autres programmes de ce ministère et, partant, la portée de la dimension managériale de la LOLF. L'examen de la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques pourrait être l'occasion de nous interroger sur la manière de rationaliser le développement des programmes support.

Ma question concernera la préfecture de police de Paris. Dans un rapport récent, la Cour des comptes a souligné un dysfonctionnement du mode de financement de la préfecture de police, qui relève à la fois de la mairie de Paris et de l'État. Cela pose la question de la transparence des moyens dont dispose la préfecture de police. Que pensez-vous de la proposition de supprimer le budget spécial de la ville de Paris et de réintégrer ces crédits dans le budget de l'État, quitte à prévoir de nouvelles modalités de participation financière de la mairie de Paris ?

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La mission Administration générale et territoriale de l'État vise trois objectifs : garantir l'exercice des droits des citoyens dans le domaine des grandes libertés publiques ; assurer la présence et la continuité de l'État sur l'ensemble du territoire ; mener au plan local les politiques publiques nationales.

Selon le rapport de la Cour des comptes, les effectifs des préfectures sont en sérieuse tension. D'une part, le PPNG a conduit à des réductions de postes : 200 en 2019 et 471 en 2020. Au cours de la période 2016-2018, 1 300 emplois ont été supprimés. D'autre part, le plan de redéploiement qui prévoyait l'affectation de 1 000 emplois aux missions prioritaires a été revu à la baisse, passant à 603 postes. Ce sont donc les missions prioritaires qui pâtissent du manque de personnel. Or, ces missions sont le maintien de la sécurité et de l'ordre public, le contrôle de légalité, la lutte contre la fraude. Ces priorités ont été fixées par le Gouvernement lui-même. C'est la raison pour laquelle, au nom du groupe Socialistes et apparentés, nous vous demandons de bien vouloir expliquer la différence entre les objectifs affichés et les moyens qui leur sont consacrés.

Le manque d'effectifs dans les préfectures est d'autant plus problématique que le Défenseur des droits dénonce depuis 2018 des dysfonctionnements dans l'exécution des programmes préfectoraux, notamment en ce qui concerne la délivrance de documents. De nombreux usagers désireux d'obtenir un permis de conduire ou un certificat d'immatriculation de véhicule l'ont alerté quant aux délais excessifs de traitement de leurs demandes, aux nombreuses pannes informatiques ou encore aux difficultés à joindre les services de l'ANTS. Le Défenseur des droits a interpellé le Premier ministre et le ministre de l'intérieur sur les nombreuses atteintes aux droits des usagers. Ceux-ci ont été insuffisamment informés en amont de la réforme et trop peu accompagnés une fois celle-ci généralisée. Les difficultés particulières d'accès et de maîtrise d'internet n'ont pas été prises en compte.

Par ailleurs, le Gouvernement entend-il renforcer les effectifs des services préfectoraux chargés du séjour des étrangers et du droit d'asile ? Alors que 327 ETPT supplémentaires leur ont été affectés de 2016 à 2020, il apparaît que les préfectures ne parviennent que très difficilement à gérer les flux des demandes. Il en va, pour les personnes concernées, de l'accès à leurs droits.

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Le PPNG avait pour objectifs, dès sa mise en place à la fin de 2017, de gagner du temps – la ministre déléguée a rappelé que les résultats étaient là –, de se rapprocher des usagers et de lutter contre les démarches frauduleuses.

Concernant ce dernier point, je reviens du Bénin où j'étais en mission pour notre commission dans le cadre du rapport spécial sur la mission Action extérieure de l'État. Les services de police français sur place m'ont montré les difficultés auxquelles ils font face, avec des faux qui révèlent un travail d'orfèvre. L'efficacité de la lutte contre cette fraude documentaire suppose bien entendu de l'expertise, mais aussi des moyens technologiques.

Disposez-vous d'enquêtes sur le niveau de satisfaction des usagers ? Notre évaluation repose sur la consommation des crédits et les indicateurs de performances mais les usagers ont leur propre regard sur la qualité du service rendu. Leurs plaintes concernant le traitement des dossiers ou la lenteur des procédures sont-elles nombreuses ?

Nous sommes tous interrogés dans nos permanences au sujet des échanges de permis de conduire étrangers et des difficultés rencontrées pour les transposer. Or bien souvent cela a des conséquences sur l'accès à l'emploi. Comment ces dossiers sont-ils traités, en sachant que chacun d'entre eux constitue un cas particulier ? Il est peut-être plus facile de procéder à ces échanges de permis pour les ressortissants de l'Union européenne, puisque l'on dispose de bases de données communes, que pour les ressortissants extracommunautaires.

Au bout de quatre ans, disposons-nous de suffisamment de recul pour évaluer les résultats des mutualisations de services de l'administration territoriale de l'État que vous évoquiez ? Lors d'échanges sur le dossier d'une personne sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), le préfet de mon département m'a indiqué qu'un service mutualisé situé dans le Pas-de-Calais s'en occupait désormais, ce qui lui laissait moins de souplesse. Quels sont les retours d'expérience sur cette moindre marge de manœuvre ?

Y aura-t-il une nouvelle génération du PPNG ?

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Je tiens à saluer le travail qui est mené dans l'ensemble des préfectures. Si l'on parle souvent de décentralisation, il est également nécessaire de disposer de services déconcentrés puissants.

Le choix de la rapporteure spéciale de se pencher sur les CERT à l'occasion de ce printemps de l'évaluation est pertinent. Il s'agit d'un véritable sujet. À la suite de l'application du PPNG, on est souvent nostalgique de l'époque des files d'attente dans les préfectures pour obtenir un certificat d'immatriculation, ou dans les mairies pour demander une carte d'identité. Alors que l'on parle beaucoup de développement durable, il faut désormais parfois parcourir plusieurs dizaines de kilomètres pour bénéficier de ces services, qui devraient être des services de proximité.

Madame la ministre déléguée, comptez-vous revoir l'accès à ces services dans les territoires ? Bien des maires désirent installer des guichets pour les demandes de cartes d'identité et de passeports. Pourquoi ne pas envisager un redéploiement ? Comment simplifier l'accès aux démarches administratives, la numérisation rendant parfois délicate la tâche pour nos aînés ?

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L'exécution des crédits pour l'exercice 2020 a été marquée par la crise sanitaire, qui a inévitablement eu des conséquences pour le déploiement des crédits de la mission Administration générale et territoriale de l'État. Le confinement a imposé aux administrations de développer des outils de télétravail. Le second tour des élections municipales a été repoussé. Les préfectures ont été mobilisées pour gérer la crise au niveau territorial. Tout ceci a engendré un surcoût budgétaire. Toutefois, le ralentissement de l'activité a permis des économies aussi bien sur le fonctionnement que sur la masse salariale ou les investissements. L'estimation du surcoût net de la crise pour la mission est donc de 50 millions d'euros, ce qui reste raisonnable au regard de l'ensemble des crédits de la mission.

Par ailleurs, l'exécution 2020 a été marquée par des mesures de périmètre importantes et la création d'un nouveau programme, qui expliquent à eux seuls la quasi-totalité des hausses de crédits de paiement. La mission a réussi, malgré la crise, à tenir le cadre d'exécution qui lui était fixé, et des crédits correspondant pour l'essentiel aux mises en réserve ont été rendus à l'occasion de la loi de finances rectificative. La soutenabilité à court terme est bien maîtrisée, comme le relève la Cour des comptes.

Enfin, plusieurs projets d'ampleur, gages de sécurité pour nos concitoyens, relèvent de cette mission, comme la construction d'un site unique pour la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ou le réseau radio du futur, indispensables à l'efficacité des services de renseignement et au bon fonctionnement du ministère de l'intérieur. Cette mission contribue à appliquer des réformes qui visent à répondre au sentiment d'éloignement des services publics. Il s'agit par exemple de mieux incarner l'État dans les territoires, grâce en particulier au réseau France Services, qui a été grandement soutenu et renforcé cette année.

Le groupe La République en marche salue la bonne maîtrise de l'exécution des crédits de cette mission. Quels types d'accompagnement ont-ils été mis en place en faveur des agents durant la crise sanitaire ? Comptez-vous augmenter les crédits alloués à la transition numérique du ministère ? Enfin, l'engagement de ne pas réduire les effectifs dans les préfectures et les sous-préfectures en 2021 sera-t-il maintenu, en dépit des surcoûts liés à la crise ?

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La rapporteure spéciale a indiqué qu'il fallait renforcer les effectifs des CERT et améliorer leur attractivité pour les agents. Mais lorsque l'on consulte le rapport annuel de performance (RAP), il y est indiqué à la page 55 que 20 % des crédits de personnel n'ont pas été consommés, soit un montant de 63 millions d'euros. Selon ce document, « La tension constatée sur le recrutement de contractuels, très importante dans les services en charge de la délivrance des titres, expliquerait une partie de cette différence. »

Pourquoi ne pas suivre la recommandation de notre collègue en utilisant les crédits ouverts ?

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Marlène Schiappa, ministre déléguée

Je vais tenter de répondre à toutes et tous. Je resterai bien sûr à votre disposition, avec le ministre de l'intérieur, si d'aventure j'omets quelque chose.

S'agissant du corps préfectoral, je veux préciser notre intention, qui a été indiquée par le Premier ministre et le ministre de l'intérieur. Nous ne supprimerons pas les fonctions des préfets et des sous-préfets, car ils jouent un rôle essentiel : ils sont la colonne vertébrale de l'État dans les territoires. Le sens de la réforme de la haute fonction publique voulue par le Président de la République est surtout de faire en sorte qu'elle soit moins cloisonnée, notamment grâce à des parcours interministériels, et plus ouverte, et que la réglementation des corps ne l'emporte pas sur la question du service de l'État. Nous sommes convaincus que les hauts fonctionnaires gagneront à cette réforme conduite par ma collègue Amélie de Montchalin.

Vous avez fait référence, monsieur le président, à des dysfonctionnements relatifs à la délivrance des titres. Le système actuel est assez simple : on peut faire une demande en ligne, notamment pour les permis de conduire et l'immatriculation des véhicules, mais il est également possible de se rendre dans une mairie équipée. Il existe néanmoins des cas particuliers, plus complexes, qui concernent parfois des personnes en difficulté. Nous avons amélioré la réponse en renforçant la plateforme téléphonique de l'ANTS et les CERT, ainsi qu'en créant des points d'accueil numériques, dotés de médiateurs, au sein des préfectures. Nous sommes encore en train de travailler sur cette question avec l'ensemble des directions, afin que le service soit aussi optimal que possible.

Monsieur le rapporteur général, le télétravail a fait l'objet d'un développement intense, notamment grâce au déploiement d'instruments nomades pour les visioconférences. Des moyens de protection ont également été mis à la disposition de tous les agents. L'an dernier, plus de 300 000 litres de gel ou de solution hydroalcoolique ont été commandés et des plaques en plexiglas ont été installées à l'accueil de nombreux sites. Je vous épargne la liste, un peu longue, de toutes les mesures appliquées dans le cadre de la pandémie. Nous tirerons bien sûr des leçons sur ce qui doit être pérennisé au-delà la crise, en particulier s'agissant du télétravail – c'est un sujet très important.

Mme Florennes m'a interrogée sur le budget spécial de la préfecture de police, qui est un héritage de l'histoire et qui associe la ville de Paris, l'État et la petite couronne. Avant la question du budget, néanmoins, il y a celle des compétences, qui est primordiale. La conclusion de multiples conventions ne nous semble pas aller dans le sens d'une simplification ou d'une clarification, au service de l'efficacité. Le financement doit simplement être mis en cohérence avec les prérogatives du Préfet de police, qui sont définies par la loi. Il n'y a pas d'évolution prévue sur ce point ni sur celui du mode de financement.

Mme Rouaux m'a posé une question sur les services des étrangers. Nous y reviendrons sans doute plus tard, lorsque nous aborderons la mission Immigration, asile et intégration, mais je veux dire dès maintenant que ces services ont été largement renforcés.

La lutte contre la fraude documentaire, monsieur Ledoux, est une priorité pour le ministère. La police aux frontières (PAF) a développé, d'une manière très interministérielle mais aussi internationale, une véritable expérience dans ce domaine, qui repose notamment sur la mutualisation des connaissances. J'ajoute que la carte nationale d'identité électronique (CNIE) apporte aussi une réponse, même si elle est partielle.

M. Simian a parlé de l'accès des aînés aux services publics. J'ai déjà indiqué que nous avons ouvert des points numériques, dotés de médiateurs, pour aider non seulement nos aînés mais aussi des personnes moins à l'aise que d'autres ou en difficulté. Il y aura également un accompagnement dans le cadre des maisons France Services.

Celles-ci constituent, monsieur Cazeneuve, une mission importante pour le ministère de l'intérieur. Nous y contribuons très largement, sous le pilotage du ministère de Jacqueline Gourault.

Nous avons pris l'engagement que vous avez évoqué, monsieur de Courson. La sous-consommation des crédits est purement liée, à notre humble avis, à la particularité de l'année 2020 que j'ai soulignée dans mon propos introductif. Des crédits ont été utilisés pour faire face à d'autres dépenses et la sous-consommation n'a pas vocation à être pérenne.

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Nous en venons à la discussion relative à la mission Immigration, asile et intégration, pour laquelle nos deux rapporteurs spéciaux sont Jean-Noël Barrot et Stella Dupont. Leurs travaux, en dehors du suivi des crédits, portent sur les moyens consacrés par les préfectures à l'instruction des demandes de titres de séjour.

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Je vous présenterai quelques éléments concernant l'exécution budgétaire en 2020 de la mission Immigration, asile et intégration, puis Stella Dupont exposera les conclusions de notre évaluation des moyens consacrés par les préfectures à l'instruction des demandes de titres de séjour.

L'exécution budgétaire en 2020 s'est traduite par une dépense de 1,849 milliard d'euros en autorisations d'engagement et de 1,746 milliard en crédits de paiement, ce qui constitue des montants inférieurs d'environ 4 % aux crédits ouverts par la loi de finances. Cette sous-exécution n'est pas homogène : le programme 303, Immigration et asile, connaît une sur-exécution proche de 17 millions d'euros, alors que le programme 104, Intégration et accès à la nationalité française, est marqué par une sous-exécution de plus de 80 millions d'euros.

L'exercice 2020 se distingue nettement des précédents, qui s'étaient traduits par une sur-exécution de 5 % en 2019 et de 3 % en 2018. L'autorisation budgétaire initiale a donc été mieux respectée.

Par ailleurs, le financement de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) a été moins déséquilibré que précédemment. La dépense prévisionnelle était de 448 millions d'euros, et 485 millions ont été dépensés. L'écart, de 37 millions, est très inférieur à ce qu'on constate habituellement – l'écart s'était établi à 156 millions en 2019. Là encore, la situation s'est améliorée.

Le dernier constat, moins satisfaisant, concerne les conditions de gestion des fonds de concours. À la suite d'un différend avec la Commission interministérielle de coordination des contrôles et avec la Commission européenne, la France a renoncé à 48 millions d'euros de fonds de concours en 2019. Pour compenser cette perte, des fonds nationaux se sont substitués en 2020 aux fonds de concours, à hauteur de 39 millions. Cette situation, que nous avions déjà regrettée l'an passé, est susceptible de se reproduire puisque la Commission européenne a bloqué de nouveaux versements de fonds de concours en 2020. Nous souhaiterions que vous précisiez, madame la ministre déléguée, les mesures prises pour prévenir ces difficultés.

L'exécution budgétaire en 2020 ne peut pas être séparée de son contexte. Une part importante de l'amélioration constatée s'explique par la modération des dépenses imputable à la crise sanitaire et la fragilité initiale des crédits a ainsi été atténuée.

En dépit de cette réserve, nous soulignons l'existence d'une amélioration qui répond à certaines des observations précédemment formulées par la commission des finances. Nous souhaitons que cette amélioration puisse s'inscrire dans la durée.

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J'en viens à notre travail d'évaluation des moyens consacrés par les préfectures à l'instruction des demandes de titres de séjour. Ce sujet est à la fois ancien et récent. Il est ancien puisque nous avons tous observé par le passé de longues files d'attente matinales, voire nocturnes, devant les préfectures. Mais il est également récent parce que si ces files d'attente ont été réduites, beaucoup s'interrogent sur leur remplacement par des files d'attente virtuelles, liées au développement de la prise de rendez-vous par internet.

Nous avons choisi, Jean-Noël Barrot et moi-même, d'approfondir ce thème. À l'issue de nos travaux, nous constatons qu'en dépit des efforts consentis la situation actuelle n'est pas satisfaisante. Si le déploiement progressif d'une nouvelle application numérique doit permettre d'apporter une amélioration, des mesures complémentaires nous paraissent nécessaires.

Je commencerai par quelques éléments statistiques. Chaque année, les préfectures délivrent plus de 950 000 documents de séjour, sous la forme de premiers titres ou de titres renouvelés. Pour faire face à cette tâche, les services des étrangers des préfectures comptaient, en février 2021, 3 725 équivalents temps plein (ETP), dont un peu plus de 2 000 affectés aux services chargés du séjour, c'est-à-dire de l'accueil et de l'instruction des demandes.

Les moyens humains ont été renforcés ces dernières années, alors même que les effectifs globaux des préfectures ont été réduits. Depuis 2016, 375 ETP ont été créés dans les services des étrangers. Selon la Cour des comptes, néanmoins, seule une partie limitée de ces effectifs a concerné les services chargés du séjour.

Par ailleurs, les moyens techniques ont été rénovés. Des plateformes numériques sont utilisées pour la prise de rendez-vous et des systèmes d'information ont été déployés afin d'enregistrer les démarches les plus courantes et les demandes de titres de séjour formulées par les ressortissants britanniques après le Brexit. En parallèle, le principal programme numérique du ministère de l'intérieur, dit ANEF (administration numérique pour les étrangers en France), se déploie. Il concerne depuis peu les étudiants étrangers et devrait couvrir 80 % des demandes de titres de séjour d'ici la fin de l'année.

La refonte des moyens s'est également accompagnée d'une rénovation du cadre juridique destinée à favoriser la délivrance des titres de séjour pluriannuels.

En dépit de ces avancées, la situation n'est pas satisfaisante : il existe de réelles difficultés d'accès au droit. Les préfectures font face à de fortes tensions, apparues avant la crise sanitaire mais aggravées par elle. Ces tensions se concentrent principalement sur l'accès aux préfectures, qui est difficile voire dégradé, notamment dans les grandes métropoles. Le nombre des rendez-vous proposés étant insuffisant, des étrangers peinent à en obtenir. En avril dernier, le Conseil d'État a examiné une affaire dans laquelle un requérant fournissait 228 captures d'écran attestant son incapacité à obtenir un rendez-vous en ligne. Des associations, la Défenseure des droits mais aussi la Cour des comptes et le Conseil d'État ont pointé du doigt ces difficultés, qui ne sont pas apparues avec la crise sanitaire mais se sont amplifiées avec elle.

Ces difficultés sont symbolisées par un phénomène de revente frauduleuse de rendez-vous pris par voie électronique et surtout par l'apparition d'un nouveau contentieux de l'accès aux préfectures. Celles-ci ont été fermées durant le premier confinement et, en dépit d'un plan très important de recrutement de vacataires, elles peinent à faire face aux besoins. Cela affecte les étrangers, en particulier ceux qui sont peu à l'aise avec les outils numériques et ceux qui désirent déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Un contentieux de masse est en train de se développer. Le Conseil d'État nous a fourni des statistiques concernant six tribunaux administratifs : on est passé, en leur sein, de 139 requêtes pour accéder aux préfectures en 2018 à 1 200 en 2020, et le rythme actuel devrait porter leur nombre à 3 500 en 2021. Ces statistiques inquiétantes ne concernent que six tribunaux administratifs, qui ne sont pas nécessairement les plus grands, sur quarante-deux.

À mon sens, les services chargés du séjour sont dans un entre-deux intenable. Les difficultés d'accès sont fortes et la modernisation des préfectures n'a pas encore produit tous ses effets. Le ministère de l'intérieur attend beaucoup du développement du programme ANEF et de ses dérivés. Le premier bilan de ce programme est encourageant. Le module développé pour les étudiants étrangers a bien fonctionné, mais il s'adressait à un public habitué au numérique. L'application développée pour les Britanniques a également bien fonctionné : plus de 115 000 demandes de titres de séjour ont été enregistrées depuis son ouverture. Malgré cela, l'absence de possibilité de déposer une demande papier a été regrettée, et des publics vulnérables, comme les résidents britanniques en EHPAD, n'ont pas bénéficié d'aménagements procéduraux et ont donc dû se déplacer en préfecture.

Je considère, avec Jean-Noël Barrot, que si la dématérialisation des procédures répond aux besoins de certains publics, elle ne répond pas à ceux de tous. Nous croyons que les gains de temps permis par le traitement des demandes dématérialisées ne suffiront pas pour faire disparaître toutes les tensions concernant l'accès aux préfectures. Nous appelons donc à compléter la politique qui a été engagée par trois mesures principales.

La première est de lancer un plan exceptionnel de recrutement de 250 contractuels afin de traiter le trop grand nombre de demandes en instance et de permettre une transition sereine avec l'ANEF, tant pour les demandeurs que pour les agents des services en charge du séjour au sein des préfectures, qui sont soumis à de fortes tensions depuis de très nombreux mois et même depuis des années. Nous proposons de recruter des personnes bénéficiant de contrats de deux ou trois ans, et non des vacataires engagés pour une durée maximale d'un an, comme à l'heure actuelle. Le coût de ce plan est estimé à 18 millions d'euros sur deux ans et à 27 millions sur trois ans. Cette dépense serait largement autofinancée par les économies attendues pour l'État grâce à la réduction des contentieux.

Nous recommandons également d'accompagner la dématérialisation croissante des procédures en donnant des rendez-vous physiques à certains publics vulnérables.

Enfin, nous sommes favorables à une réforme des titres de séjour visant à accroître encore le nombre de titres pluriannuels.

À titre personnel, je soutiens d'autres mesures, telles que la remise automatique d'un document provisoire de séjour lors de tout dépôt de demande de manière dématérialisée.

Nous espérons que vous pourrez nous éclairer, madame la ministre déléguée, sur vos intentions.

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La Cour des comptes a relevé, dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission Immigration, asile et intégration, que l'exercice 2020 a été marqué par la crise sanitaire mais aussi qu'il y a eu, pour la quatrième année consécutive, une sous-budgétisation des dépenses liées à l'asile, ce qui conduit à s'interroger. Vous aviez, en effet, l'ambition de sincériser le budget, en particulier s'agissant de l'aide aux demandeurs d'asile (ADA).

Les dépenses liées à cette allocation sont plus importantes que les crédits ouverts en loi de finances initiale, de presque 40 millions d'euros, alors que la crise sanitaire a largement empêché de nouveaux demandeurs d'asile de venir en France et de bénéficier de l'ADA durant l'instruction de leur demande. Chaque année, les différents rapporteurs lancent des alertes sur cette sous-budgétisation. L'exercice 2020, malgré la crise sanitaire, n'échappe pas à la règle.

La Cour des comptes invite le Gouvernement à « revoir en profondeur les hypothèses sur lesquelles est construite la programmation initiale ». C'est un appel à repenser les prévisions en suivant un principe de prudence et non en s'appuyant sur vos espoirs ou sur les signaux politiques que vous désirez envoyer. S'agissant de l'année prochaine, sur quelles hypothèses allez-vous fonder votre programmation budgétaire pour l'ADA ? Partirez-vous enfin de la réalité ? La France est un des deux premiers pays d'Europe pour l'accueil des demandeurs d'asile et donc pour le versement d'une allocation : en 2019, en année pleine et hors impact de la crise sanitaire, 178 000 demandes ont été déposées. Continuerez-vous à envoyer des signaux politiques en 2022, année un peu particulière puisqu'elle sera électorale, en sous-budgétisant massivement l'ADA, comme vous le faites depuis le début du quinquennat ?

J'en viens à la situation dans le Calaisis à la suite du Brexit. L'année 2020 a été marquée par la sortie définitive du Royaume-Uni de l'Union européenne. J'avais lancé une alerte sur les conséquences du Brexit dans mon dernier avis budgétaire, en particulier sur la sortie du Royaume-Uni du système de Dublin, qui supprime les possibilités de regroupement familial de l'autre côté de la Manche pour les mineurs et donne un attrait supplémentaire au Royaume-Uni pour les migrants et les passeurs, puisqu'il n'y a plus de risque de renvoi dans les pays de première entrée. Tous ceux dont les empreintes ont été prises en Grèce, en Italie, à Malte ou à Chypre sont attirés par les passeurs et tentent des traversées insensées de la Manche, de nuit, sur de petits canots pneumatiques, au péril de leur vie. Il en résulte un afflux et un blocage des migrants dans le Calaisis, ainsi qu'une augmentation du nombre de traversées. J'ajoute que le Royaume-Uni a exprimé sa volonté, par la voix de sa ministre de l'intérieur, de durcir sa législation en matière d'asile, ce qui augmentera les situations de clandestinité.

Malheureusement, rien n'a été anticipé par le Gouvernement, et il se produit à Calais des scènes que nous n'avions plus vues depuis le temps de la « jungle », à savoir des blocages de la rocade portuaire par des migrants qui tentent de monter dans des camions, ce qui leur fait prendre, ainsi qu'aux chauffeurs de poids lourds, des risques insensés et détruit l'image du territoire dont je suis le député.

Quels moyens financiers et matériels supplémentaires comptez-vous orienter vers le Calaisis pour faire face aux conséquences du Brexit, s'agissant du nombre et des actions des migrants mais aussi des conséquences pour les habitants de ma circonscription ? Par ailleurs, quelles discussions avez-vous eues avec vos homologues britanniques en vue de débloquer la situation ? Je pense en particulier aux mineurs désormais sans solution du fait de la sortie du Royaume-Uni du système de Dublin et à la situation dont souffrent les entreprises et les habitants de mon territoire.

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Je me réjouis d'intervenir dans le cadre de cette CEPP.

Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration se sont établis en 2020 à 1,85 milliard d'euros en autorisations d'engagement et à 1,75 milliard en crédits de paiement, hors fonds de concours, ce qui représente une sous-exécution budgétaire d'environ 4 %. L'exécution du programme 303, Immigration et asile, qui regroupe 80 % des crédits de la mission, se caractérise par une légère sur-exécution, de l'ordre de 17,2 millions d'euros en crédits de paiement. Cela s'explique par une augmentation des dépenses liées à l'ADA et aux structures d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile. Le programme 104, Intégration et accès à la nationalité française, a été, au contraire, fortement sous-exécuté en 2020, de 83 millions d'euros. Cette situation, qui concerne presque toutes les lignes budgétaires, tient notamment au retard pris dans la mise en œuvre du contrat d'intégration républicaine (CIR), en raison de la diminution du nombre de contrats signés et au retard pris dans l'application de ceux déjà conclus.

Je m'arrêterai plus particulièrement sur deux thématiques : l'accès au travail des étrangers primo-arrivants et les délais de traitement des demandes d'asile.

S'agissant du premier point, l'action 11, Accueil des étrangers primo-arrivants, du programme 104, concerne l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui est notamment chargé de l'accueil et de l'intégration des étrangers autorisés à séjourner durablement en France. Plus de 191 millions d'euros ont été dépensés dans le cadre de cette action en 2020. La politique d'accueil et d'accompagnement s'appuie sur le contrat d'intégration républicaine (CIR), qui a été créé par la loi du 7 mars 2016 et en partie modifié par celle du 10 septembre 2018. Ce contrat retrace les différentes actions qu'une personne immigrante doit effectuer pendant un an et comprend un volet relatif à l'accès à l'emploi.

L'année 2020 a été marquée par la poursuite de la mise en œuvre des mesures décidées le 5 juin 2018 par le comité interministériel à l'intégration, qui a prévu de mettre l'accent sur l'insertion professionnelle des primo-arrivants, sous la forme d'un conseil en orientation professionnelle et d'un accompagnement personnalisé en association avec le service public de l'emploi. À cet égard, je salue le nouvel accord entre l'État, l'OFII et les acteurs du service public de l'emploi qui sera décliné en 2021 dans les territoires. Je salue également la création d'un nouvel indicateur, relatif à la part des personnes ayant bénéficié d'une orientation vers le service public de l'emploi qui s'y sont inscrites pendant la durée du CIR. Cette part s'est établie en 2020 à 46,7 %, alors que la cible fixée dans le projet annuel de performances (PAP) était de 75 %. Si le résultat atteint est en deçà de la prévision, il reste encourageant.

Je souhaiterais connaître plus précisément les intentions du Gouvernement en ce qui concerne l'accès à l'emploi des étrangers primo-arrivants. L'emploi est, en effet, le meilleur vecteur d'intégration sociale pour ces personnes.

J'en viens à la question des délais d'examen des demandes d'asile. L'impératif de rapidité de traitement ne doit pas remettre en cause la sérénité de la décision, gage de sa qualité, mais doit constituer un objectif partagé par tous les acteurs. Un allongement des délais provoque, en effet, un accroissement du budget de l'ADA et contribue à la saturation des places d'hébergement. Enfin, et surtout, les personnes qui se trouvent dans une situation difficile, hors de leur pays, ont le droit de savoir rapidement si nous pouvons répondre favorablement à leur demande d'asile. C'est une question de dignité.

Si les flux de demandes d'asile ont diminué, tant à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) que dans les guichets uniques, la crise sanitaire a eu pour effet paradoxal de faire progresser de 10 % le stock de dossiers en instance au cours de l'année 2020. D'une part, l'OFPRA et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ont été contraints de suspendre les entretiens de demande d'asile et les audiences pendant le premier confinement, leur activité ayant seulement repris au cours du second semestre de l'année dernière. D'autre part, le recrutement et la formation des effectifs supplémentaires prévus tant à l'OFPRA qu'à la CNDA ont été retardés. Au total, l'OFPRA n'a pu rendre que 89 602 décisions en 2020, soit 26 % de moins qu'en 2019. La CNDA, quant à elle, a enregistré 45 903 recours et n'en a traité que 42 027. Ces évolutions ont mécaniquement entraîné un retard dans les trajectoires de réduction des délais moyens de traitement des demandes d'asile. Le délai moyen de traitement d'un dossier par l'OFPRA est ainsi passé de 166 jours en 2019 à 262 en 2020.

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J'irai dans le même sens que Pierre-Henri Dumont au sujet de la sous-budgétisation de l'ADA, qui aurait dû être moindre dans la période actuelle. Il y a 37 millions d'euros d'écart entre l'exécution et les crédits budgétés. Que prévoyez-vous pour 2021 ? Vous avez ouvert 460 millions d'euros de crédits, ce qui est inférieur à l'exécution en 2020.

Je n'ai pas très bien compris ce qui s'est passé avec les fonds de concours. La France a-t-elle perdu 48 millions d'euros de recettes ? S'agit-il d'un gel et, si c'est le cas, quelles en sont les raisons ?

On observe un phénomène de revente des rendez-vous, qu'il est difficile de chiffrer complètement mais qui est assez inquiétant, et un nouveau contentieux, concernant l'accès aux préfectures, a vu le jour. Quel est, selon vous, le coût pour l'État des contentieux engagés dans ce domaine ? L'État ne ferait-il pas mieux d'investir dans les effectifs des préfectures plutôt que dans des frais de justice ? Je ne pousse pas à l'augmentation des effectifs d'une manière générale, mais on peut se poser la question, d'une façon pragmatique, si les frais de contentieux sont plus élevés. Le mieux serait quand même d'éviter un phénomène d'attente et de revente de rendez-vous.

Vous renforcez régulièrement par des vacataires les effectifs chargés des questions de séjour. Le turn-over est donc très important. Vous avez toujours quelqu'un, mais sous contrat de vacation, ce qui peut coûter plus cher et s'accompagne probablement de moindres compétences. Pensez-vous continuer à travailler de cette manière ou recourir à des contrats plus pérennes, comme le ministère de la justice vient de le faire pour les tribunaux ?

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Marlène Schiappa, ministre déléguée

La mission Immigration, asile et intégration est une mission très importante, qui a été soumise à de nombreuses contraintes ces dernières années et dont les évolutions depuis le début du quinquennat montrent bien l'engagement du Gouvernement en matière de politique migratoire. L'année 2021 a encore confirmé cet engagement fort, malgré la crise sanitaire.

Je commencerai par répondre aux questions posées par les rapporteurs spéciaux, que je remercie pour la qualité des échanges que nous avons régulièrement sur ces sujets, puis je reviendrai sur la façon dont le ministère de l'intérieur a pu répondre à la crise sanitaire et assurer ses missions – je parlerai notamment de la réouverture des guichets après le confinement du printemps 2020.

Je tiens à souligner l'effort massif réalisé par le Gouvernement en faveur de la qualité des services des étrangers au sein des préfectures, dans un contexte migratoire tendu. Ces services restent une priorité du ministère. Des renforts sont régulièrement alloués, cela a été dit, pour leur permettre d'assurer leurs missions et de réduire les délais de traitement des dossiers – c'est une des réformes prioritaires du ministère de l'intérieur.

Depuis dix ans, l'ensemble des services des étrangers ont connu une hausse de 55 % de leurs effectifs, alors que les préfectures ont connu, quant à elles, une baisse de 25 % sur la même période. Près de 400 emplois ont été pérennisés dans ces services au cours des quatre dernières années. Ils ont également été soutenus tous les ans entre 2017 et 2019 par des vacations, dans le cadre de différents plans. Cet effort de long terme en faveur des services des étrangers dans les préfectures s'est ensuite vraiment accru en 2020.

L'activité au sein des préfectures a été totalement atypique, tant en matière d'asile et d'intégration que de lutte contre l'immigration irrégulière.

Environ 82 000 demandes, mineurs inclus mais hors réexamens, ont été enregistrées dans les guichets uniques. Le flux de la demande d'asile a diminué – de 41 % – pour la première fois depuis plusieurs années, en raison de la crise sanitaire. Quelque 95 600 demandes, mineurs et réexamens compris, ont été introduites auprès de l'OFPRA en 2020, ce qui représente une baisse de 28 %.

S'agissant de la lutte contre l'immigration irrégulière, la France a maintenu sa politique d'éloignement : 15 950 étrangers ont quitté le territoire national, dans le cadre d'éloignements et de départs volontaires, aidés ou spontanés. Par ailleurs, les non-admissions aux frontières ont augmenté de 40 % par rapport à 2019.

À la sortie du confinement, il a fallu faire face à un pic de demandes que le ministère de l'intérieur s'est mis en position d'instruire. L'effort de renforcement des effectifs par des vacations a été doublé en 2020 pour accompagner la sortie du confinement et la bosse d'activité de l'automne : 2 800 mois de vacations supplémentaires ont été attribués aux services des étrangers sur l'ensemble de l'année. Au total, ces services ont bénéficié de 7 320 mois de vacations l'année dernière. Un tiers des renforts contractuels du programme 354 ont été fléchés vers les services des étrangers.

Les préfectures et les services territoriaux de l'État assurent un rôle absolument central dans la politique d'accueil et de relocalisation des demandes d'asile. La France a tenu ses engagements, même dans le contexte exceptionnel de la crise sanitaire.

En ce qui concerne la délivrance des titres de séjour, l'asile ou l'acquisition de la nationalité française, nous ne nous limitons pas à une approche quantitative. Le Gouvernement travaille aussi à la qualité du service rendu : le ministère de l'intérieur mène une politique permettant de fluidifier et de moderniser les demandes de titres de séjour, notamment en améliorant l'accueil aux guichets des préfectures.

Une dizaine d'audits ont été menés à partir des retours d'expérience, et nous avons mis à la disposition des préfectures, fin 2019, un guide méthodologique destiné à les aider à optimiser leur organisation et leur fonctionnement. L'amélioration de l'accueil aux guichets passe également par une diminution du nombre de passages en préfecture grâce à la dématérialisation des démarches. C'est l'objectif du déploiement de l'ANEF, qui se poursuit et s'accélère en 2021 en ce qui concerne les demandes d'autorisation de travail, les demandes de renouvellement des titres de séjour pour les passeports talents, les changements de situation ou les duplicatas. Fin 2021, 80 % des demandes de titres de séjour seront prises en charge directement par l'ANEF, ce qui limitera l'obligation de se déplacer dans les préfectures et répondra à divers problèmes qui ont été évoqués.

Cette modernisation concernera progressivement tous les publics, à la fois pour simplifier les démarches des usagers mais aussi pour améliorer la lutte contre la fraude documentaire, qui est absolument fondamentale.

Notre politique d'immigration comprend aussi une politique d'intégration dont l'ambition a été revue à la hausse. Des mesures fortes ont été prises. Le parcours d'intégration a ainsi été refondu : le nombre d'heures de français et de formation civique a été doublé et nous avons considérablement renforcé les programmes permettant l'insertion professionnelle. Le ministère de l'intérieur soutient des actions en faveur des femmes, qui font l'objet d'une attention particulière. Les moyens budgétaires dédiés aux politiques d'intégration ont été portés en deux ans à des niveaux sans précédent dans l'histoire de notre pays.

Afin d'améliorer la qualité de l'accueil, le nouveau téléservice NATALI pour les demandes d'accès à la nationalité française sera ouvert à l'été 2021 s'agissant des plateformes pilotes et début 2022 pour les autres. Nous avons également pu concrétiser notre volonté de naturaliser les travailleurs dits covid de première ligne : environ 3 000 personnes ont été naturalisées à la suite de leur engagement dans la période de la pandémie.

La crise sanitaire a conduit les préfectures en général, et les bureaux en charge du séjour en particulier, à s'adapter. Le constat de leur capacité à se réinventer pour maintenir la qualité de l'accueil et du service est largement partagé. Tout cela s'inscrit dans la politique menée tout au long du quinquennat pour renforcer les services des préfectures chargés de la politique de lutte contre l'immigration irrégulière et de l'intégration des étrangers en France.

J'en viens à l'impact budgétaire de la crise sanitaire. Du fait de celle-ci, mais également de reports pour rembourser les fonds européens, la mission Immigration, asile et intégration a été sous-exécutée : 161 millions d'euros n'ont pas été consommés. Cela représente 8 % des montants initialement prévus par la loi de finances pour 2020.

La crise sanitaire a eu plusieurs conséquences. Elle a, tout d'abord, retardé les effets attendus de plusieurs mesures adoptées en loi de finances en vue de réduire les délais de traitement des demandes d'asile. Je pense, par exemple, aux renforts de 200 ETP qui étaient attendus à l'OFPRA : ils n'ont pas pu être recrutés ou formés tout de suite. Cette mesure devrait, sauf circonstances exceptionnelles, avoir son plein effet en 2021. Par ailleurs, la crise sanitaire a fait baisser fortement les flux de demandes à instruire par les services du ministère de l'intérieur. Enfin, une partie de l'activité habituelle n'a pas pu avoir lieu, ce qui a conduit à limiter des dépenses initialement budgétées. Cela concerne, par exemple, les formations civiques et linguistiques de l'OFII, qui ont été arrêtées lors du premier confinement.

Le principe que nous avons retenu était que les moindres dépenses réalisées d'un côté devaient couvrir les postes pour lesquels, d'un autre côté, des dépenses supplémentaires étaient engagées.

Les dépenses liées à l'ADA n'ont pas connu la baisse attendue en 2020, pour plusieurs motifs. Il y a la question des effectifs que l'OFPRA devait recruter – mais c'est déjà en train d'être corrigé. D'autre part, les transferts de demandeurs d'asile au titre du protocole de Dublin ont été freinés par les différentes restrictions qui ont été instaurées aux frontières pour réduire la propagation de l'épidémie de covid-19.

La crise sanitaire a également contraint les opérateurs de l'accueil et de l'hébergement à engager des dépenses exceptionnelles pour protéger les personnes qu'elles hébergent et leurs salariés lors du premier confinement.

Troisièmement, le ministère de l'intérieur a été confronté à des dépenses exceptionnelles résultant de corrections financières décidées par la Commission interministérielle de coordination des contrôles, qui est chargée de l'audit des fonds européens en France, sur les comptes de 2018. Ces correctifs ont pu être financés par de moindres dépenses en 2020.

Quatrièmement, les moindres dépenses ont aussi permis de compenser la non-réception d'une partie des fonds de concours.

Mme Jacquier-Laforge m'a interrogée sur la baisse du nombre de signatures de contrats d'intégration républicaine. Je confirme cette diminution, qui est de 24 % ; il n'en demeure pas moins que 78 800 contrats ont été conclus.

Il n'y a pas de nouveau blocage des fonds européens, que nous avons reprogrammés sur d'autres dossiers. À l'issue des audits que j'évoquais précédemment, la commission interministérielle de coordination des contrôles a décidé de procéder à certaines corrections financières qui ont été déduites des remboursements de la Commission européenne au titre de l'année 2020. Aucun bénéficiaire n'a vu sa subvention diminuer, puisque ces corrections ont été prises en charge par des crédits nationaux votés en LFI : ainsi, 39 millions d'euros ont été prélevés sur la mission Immigration, asile et intégration en 2020. Les reports de crédits sur l'exercice 2021 permettent d'apurer ces opérations afin de limiter le risque de nouvelles corrections forfaitaires. L'autorité responsable a pris les mesures nécessaires et renforcé notamment ses moyens humains.

Au niveau central, nous n'avons pas une connaissance exhaustive des contentieux engagés par les étrangers pour obtenir un rendez-vous en préfecture, que ce soit en termes de volume, de nature ou de résultats, dans la mesure où les préfectures assurent elles-mêmes leur défense. Il s'agit essentiellement de référés « mesures utiles », le Conseil d'État ayant récemment jugé que cette voie juridictionnelle était adaptée. Par ailleurs, les statistiques relatives au contentieu des étrangers transmises par les préfectures ne nous permettent pas de distinguer ce contentieux très spécifique, plutôt récent, des autres dossiers. Le nombre de contentieux engagés dans le cadre de la procédure d'acquisition de la nationalité française reste très limité au regard du nombre de rendez-vous accordés et d'arrêtés pris chaque année. Certes, un collectif a engagé des recours contestant l'impossibilité d'accès aux guichets des préfectures, dans plusieurs départements, et l'obligation de passer par des modules de rendez-vous sur internet pour y être reçu ; il a obtenu gain de cause devant le tribunal administratif de Montreuil.

Pour remédier à cette situation, la direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT) et la direction générale des étrangers en France (DGEF) du ministère de l'intérieur ont mis en place un accompagnement au déploiement de la dématérialisation à destination des préfectures. Chaque préfecture recevant du public étranger installera un point d'accès numérique permettant de mieux orienter les usagers dans leurs démarches.

Au sein du programme 216, les dépenses liées au contentieux des étrangers – procédures amiables comprises – se sont élevées à 17,24 millions d'euros en 2020 et à 20,73 millions d'euros en 2019. Il s'agit essentiellement de frais d'avocats. Le contentieux des étrangers représente 20 % de l'ensemble des dépenses de contentieux payées par le programme 216.

La question de M. Dumont relative à l'ADA est fondamentale ; elle montre bien la difficulté que nous avons à nous projeter vers l'année à venir et à évaluer le nombre de personnes qui auront recours à l'allocation. L'ADA a été budgétée au meilleur niveau possible : alors que la prévision la plus récente, qui date du mois de mai, table sur une dépense de 461 millions d'euros, 455 millions avaient été votés en loi de finances ; l'écart pourra être comblé sans difficulté par redéploiement au sein de notre enveloppe budgétaire.

Cette prévision, que nous essayons toujours d'établir au plus juste, s'appuie sur trois éléments.

Premièrement, elle tient compte d'une reprise modérée des flux migratoires. Nous prévoyons ainsi une hausse de 56 % des premières demandes en guichet unique par rapport à 2020. Concrètement, nous faisons l'hypothèse que 127 600 premières demandes d'asile – hors réexamen et mineurs inclus – seraient déposées en 2021, contre 81 700 en 2020 et 138 400 en 2019. Ce sont des chiffres que je vous livre en toute transparence.

Deuxièmement, cette prévision tient compte du contexte actuel et des restrictions liées à la pandémie de covid-19 au niveau des frontières. Ainsi, nous prévoyons une baisse du taux de transfert dans le cadre du protocole de Dublin, car nous convenons tous qu'il sera moins facile de transférer les demandeurs d'asile vers l'État responsable du traitement de leur demande. Nous intégrons également le taux de décision de l'OFPRA, dont nous anticipons qu'il sera moindre que prévu : dans l'attente d'une décision, les demandeurs d'asile resteront probablement plus longtemps dans notre dispositif.

Troisièmement, cette prévision tient compte de la décision rendue par le Conseil d'État le 12 mars 2021, qui oblige l'État à offrir aux demandeurs d'asile à Mayotte des conditions matérielles d'accueil adaptées.

Le Brexit a évidemment nécessité un renfort de policiers et de gendarmes important. Le ministre de l'intérieur s'entretient régulièrement avec son homologue britannique, et nous discutons de tous ces sujets avec les autorités du Royaume-Uni.

S'agissant enfin de la prévision budgétaire pour l'année prochaine, je renvoie la question à l'examen du projet de loi de finances pour 2022 : c'est à ce moment que nous aurons l'occasion d'en débattre tous ensemble.

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Permettez-moi de vous interroger, madame la ministre déléguée, sur l'exécution du programme 303, où sont imputées les dépenses relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière. Au sein de l'objectif 3, l'indicateur 3.1 porte sur le nombre de retours forcés exécutés. En 2020, il est en baisse de 47,8 % : sur 500 000 étrangers en situation irrégulière, selon les chiffres du ministère de l'intérieur lui-même, nous avons reconduit 9 111 personnes à la frontière, dont seulement 3 329 personnes vers des pays tiers. De même, le taux d'éloignement des personnes placées en centre de rétention administrative (CRA) est tombé à 42 %. Ces chiffres ridiculement faibles sont très préoccupants : ils montrent que les politiques de reconduite à la frontière et de lutte contre l'immigration clandestine sont inefficaces, tout à fait lacunaires, et qu'elles ne sont pas menées comme il convient. Je dénonce cette situation. Quelles mesures correctives comptez-vous prendre pour y remédier ? Combien de places supplémentaires allez-vous créer dans les CRA cette année ? Comment allez-vous renverser la tendance ?

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Je tiens à excuser Marietta Karamanli, qui participe actuellement aux débats dans l'hémicycle.

D'une manière générale, la Cour des comptes regrette qu'en dépit des augmentations budgétaires, la mission Immigration, asile et intégration demeure sous-financée pour la quatrième année consécutive. En effet, la prévision de stabilité des demandes d'asile en 2020, sur laquelle était fondée la budgétisation en LFI, était plus qu'optimiste. C'était, au demeurant, sans compter sur la crise sanitaire.

La Cour des comptes relève qu'au titre de l'exécution 2020, du fait de cette sous-budgétisation, le programme Intégration et accès à la nationalité française a été mobilisé à hauteur de 50 millions d'euros pour contribuer au financement du programme Immigration et asile et des actions liées à la maîtrise des flux migratoires. Concrètement, cela signifie que ce sont nos politiques d'accueil des étrangers primo-arrivants qui ont pâti de cette sous-budgétisation, alors que 2020 devait être la première année complète d'application du contrat d'intégration républicaine renforcé. Les dépenses de formation linguistique et civique apparaissent en sous-exécution de 44,6 millions d'euros, soit 38 %. De fait, si le nombre de signatures de CIR a augmenté de plus de 3 % au cours des mois de janvier et février par rapport à la même période en 2019, le confinement et la crise sanitaire ont rompu cette dynamique.

Faute d'avoir financé la construction d'un nouveau centre d'accueil pour les demandeurs d'asile dans les PLF pour 2019 et 2020, la mise à l'abri des personnes concernées est financée par le budget dédié à l'hébergement d'urgence alors qu'elle devrait relever du programme 104 consacré à l'intégration des personnes immigrées.

En conséquence, la Cour relève qu'en dépit des effets exceptionnels de la crise sanitaire, qui a conduit à une sous-exécution des crédits de la mission dans son ensemble, la programmation budgétaire de la LFI pour 2020 apparaît rétrospectivement fragile et paradoxale. Qu'entend faire le Gouvernement pour tenir compte des recommandations de la Cour des comptes, qui observe ces mêmes défaillances depuis quatre ans ?

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Je félicite nos collègues Stella Dupont et Jean-Noël Barrot pour leur intervention. Je salue également le travail mené par Élodie Jacquier-Laforge.

La mission Immigration, asile et intégration finance l'une des politiques publiques les plus importantes que nous devons mettre en œuvre, à savoir le droit d'asile, auquel nous sommes tous attachés et dont nous pouvons être fiers, ainsi que l'intégration des primo-arrivants, un défi important que nous devons encore davantage relever aujourd'hui. Sur ce dernier sujet, 2020 a été la première année complète d'application de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, dont nous pouvons ainsi commencer à analyser les effets.

Nos collègues ont souligné que les préfectures continuent de faire face à de nombreuses tensions, que la crise a même aggravées, s'agissant notamment de la prise de rendez-vous. Nous saluons le renforcement des moyens consacrés à l'instruction des demandes de titres de séjour, l'amélioration de l'attractivité des services des étrangers et l'augmentation des moyens techniques mis à la disposition de ces derniers. Néanmoins, nous ne pouvons que regretter l'apparition d'un phénomène de revente de rendez-vous, ainsi que le développement d'un nouveau contentieux portant sur l'accès aux préfectures. Quelles leçons pouvons-nous tirer de ces dysfonctionnements ?

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M. le président a évoqué tout à l'heure la problématique des contentieux. En juillet 2019, le Premier ministre avait demandé au Conseil d'État de passer en revue l'ensemble des règles relatives au contentieux des étrangers en vue d'élaborer des mesures réglementaires susceptibles de rendre les procédures plus efficaces et plus simples. Dans son rapport, le Conseil d'État avait effectivement conclu qu'il fallait instaurer des procédures simples, fluides, exhaustives. Il préconisait de rationaliser le contentieux, de réduire le nombre de procédures juridictionnelles, de procéder dès le stade administratif à un examen plus complet de la situation des étrangers au regard du droit de séjour, de renforcer l'efficacité du juge et d'améliorer le fonctionnement de la chaîne administrative afin de prévenir d'inutiles contentieux coûteux en temps et en argent. Où en sommes-nous ?

Je m'associe aux propos des rapporteurs spéciaux concernant l'amélioration de l'instruction du renouvellement du titre de séjour. Cependant, il reste encore beaucoup de progrès à faire. Derrière chaque dossier, il y a des personnes : on peut donc attendre une plus grande efficacité et une plus grande humanité de la part de l'administration. Nous vous avions interpellée, madame la ministre déléguée, au sujet des droits des étudiants étrangers pendant la période de confinement. Je salue votre réaction rapide : grâce à l'ouverture d'un site internet dédié, leur situation s'est notablement améliorée. Que pouvons-nous faire de plus pour améliorer encore l'humanité du traitement administratif des dossiers de titres de séjour ?

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Marlène Schiappa, ministre déléguée

M. Ciotti m'a interrogée sur la baisse du nombre de reconduites à la frontière en 2020. Compte tenu de la fermeture des frontières, dans le contexte de la pandémie de covid-19, le nombre de retours forcés exécutés a évidemment diminué. Cependant, chacun connaît l'engagement du ministre de l'intérieur, qui mène une politique très rigoureuse en la matière – c'est d'ailleurs l'une des priorités qu'il a assignées aux préfets. Ainsi, 15 950 personnes ont quitté le territoire en 2020, que ce soit en exécution d'un éloignement forcé ou grâce aux aides au retour.

L'année 2020 a vu la création de quatre-vingt-onze places dans les CRA. Sur la période 2017-2020, 480 places ont été créées, ce qui correspond aux objectifs que nous nous étions fixés.

Pour répondre à M. Ledoux, je rappelle que les dépenses liées au contentieux des étrangers se sont élevées à 17,24 millions d'euros en 2020 et qu'elles étaient 20 % plus élevées en 2019. Je partage votre remarque concernant les axes de progrès : nous devons nous améliorer d'année en année en fonction des retours que nous recevons du terrain.

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Je dresserai le bilan de l'exécution 2020 du budget des forces de sécurité intérieure, avant de vous présenter les conclusions du travail d'évaluation que j'ai mené ce semestre, portant sur la politique de mutualisation des achats du ministère de l'intérieur.

Les crédits exécutés en 2020 pour la police et la gendarmerie nationales atteignent 20,02 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 0,7 % par rapport à 2019. Cette augmentation est principalement due à des dépenses de personnel qui restent dynamiques, pour deux raisons.

Tout d'abord, le plan de recrutement de 10 000 policiers et gendarmes sur la durée du quinquennat poursuit sa montée en charge. En 2020, 1 398 emplois ont été créés dans la police nationale, à périmètre constant, permettant le respect du schéma d'emploi voté en loi de finances initiale. De même, 516 emplois ont été créés dans la gendarmerie nationale.

En outre, des mesures catégorielles aux effets budgétaires massifs sont financées par les programmes 176 et 152. Elles contribuent à hauteur de 92,74 millions d'euros à la croissance de la masse salariale de la gendarmerie nationale et à hauteur de 170,90 millions d'euros à la croissance de la masse salariale de la police nationale.

Si les crédits des programmes 176 et 152 voient leur augmentation confirmée, ils ont fait l'objet d'une légère sous-exécution par rapport à la programmation. En crédits de paiement, cette sous-exécution représente 0,68 % des crédits votés pour la police nationale et 0,03 % des crédits votés pour la gendarmerie nationale. Elle concerne notamment les dépenses de personnel, sous-exécutées à hauteur de 165 millions d'euros dans la police et de 76,5 millions d'euros dans la gendarmerie.

Deux phénomènes expliquent cette sous-exécution. D'une part, la crise sanitaire a provoqué des retards dans les incorporations, entraînant une sous-exécution des plafonds d'emplois de chacun des programmes et des économies directes et indirectes sur les dépenses de personnel. D'autre part, dans la police nationale, la mise en œuvre de certaines mesures catégorielles a été repoussée à l'exercice 2021 afin de finaliser et d'optimiser leur contenu, ce qui a conduit à une moindre dépense de 22,5 millions d'euros. Les économies ainsi dégagées ont notamment permis le financement de la prime dite covid, pour 14,1 millions d'euros dans la police et 10,7 millions d'euros dans la gendarmerie. Si je souscris évidemment à la philosophie de cette mesure, je me fais ici l'écho des policiers et gendarmes rencontrés, qui ont parfois regretté les modalités de sa mise en œuvre sur le terrain.

L'année 2020 est tout à fait spécifique : contrairement aux années précédentes, l'effet d'éviction des dépenses de personnel sur celles de fonctionnement et d'investissement ne s'est pas produit. En effet, la sous-exécution des dépenses de personnel, les possibilités ouvertes par la fongibilité asymétrique dans la police, le dégel de la réserve de précaution en crédits de paiement et l'ouverture de crédits en loi de finances rectificative pour les deux forces ont permis de réaliser des dépenses attendues et saluées par les forces de sécurité intérieure. Le plan « poignées de porte » a permis de financer plus de 5 000 opérations d'entretien et de petite maintenance dans les commissariats et les groupements de gendarmerie, améliorant ainsi grandement le quotidien des deux forces. Des équipements ont pu être acquis en grande quantité, notamment 3 000 pistolets à impulsion électrique, des systèmes radio, 627 Renault Zoe et 657 Peugeot 5008. Enfin, des dépenses d'investissement portant sur les hélicoptères de la gendarmerie et le parc roulant des deux forces ont permis de réaliser un effort de renouvellement majeur en 2020, ainsi que d'engager le verdissement du parc par l'acquisition de véhicules hybrides et électriques de marques françaises.

Je souhaite maintenant vous présenter les principales conclusions de mon travail d'évaluation portant sur la mutualisation de la fonction achat au ministère de l'intérieur, plus particulièrement sur son fonctionnement et ses conséquences pour les forces de sécurité intérieures.

Le service de l'achat, de l'innovation et de la logistique du ministère de l'intérieur (SAILMI) a été créé il y a un peu plus d'un an, prenant la succession du service de l'achat, de l'équipement et de la logistique de la sécurité intérieure (SAELSI). Il s'agit d'abord d'une évolution de périmètre, puisque l'on passe d'une politique d'achat mutualisée entre la police et la gendarmerie à une politique d'achat mutualisée pour l'ensemble du ministère.

J'ai structuré mon analyse autour de quelques grands axes de réflexion.

D'un point de vue opérationnel, tout d'abord, le SAILMI semble satisfaire à un grand nombre de ses objectifs et apporter ainsi une réponse aux limites du SAELSI, relevées par la Cour des comptes en 2018. En effet, la chaîne logistique est désormais intégralement mutualisée et a gagné en efficacité. La logique de performance est pleinement intégrée et la fonction achat a fait l'objet d'une professionnalisation importante. Une stratégie structurée semble appliquée, ce qui contraste avec la logique de renouvellement strict appliquée autrefois par le SAELSI. L'innovation et la veille technologique sont désormais des aspects structurants de la politique d'achat. De manière générale, les personnels sont satisfaits : les délais de livraison s'améliorent et les équipements commandés correspondent très largement aux attentes. Ces bons résultats ont été permis par une association systématique des personnels au processus d'achat et par un dialogue de qualité entre le SAILMI et les directions métiers. Cet état de fait doit perdurer, et la définition du besoin doit rester la prérogative des directions métiers.

D'un point de vue budgétaire, les résultats sont un peu plus contrastés. Dans la lignée des recommandations du rapport « Action publique 2022 », la mutualisation des achats du ministère répondait, entre autres, à un objectif d'économies. Toutefois, en amont, les économies anticipées ne sont que très peu documentées au stade de l'autorisation budgétaire. Les programmes 176 et 152 ont été « désoclés » des économies anticipées. L'évaluation en aval des économies réalisées est également lacunaire : qu'il s'agisse des économies budgétaires ou des économies d'achats, il semblerait que la réalité des deniers publics économisés ne soit pas encore évaluée avec précision. Il est nécessaire de mener ces évaluations, ainsi que de créer un indicateur de performance retraçant les économies d'achats et les économies budgétaires permises par les mutualisations. L'amélioration qualitative résultant de la réforme doit également faire l'objet d'un suivi rigoureux dans les années à venir, afin de garantir la performance et la cohérence des achats des forces de sécurité intérieure avec les attentes du terrain.

Enfin, j'ai souhaité apprécier l'effet d'entraînement et de stimulation créé par le SAILMI sur le tissu industriel français de la sécurité intérieure. Si les fournisseurs du SAILMI reconnaissent et saluent son attention à l'innovation, cet aspect devra faire l'objet d'une approche stratégique dans les années à venir. En effet, 80 % des fournisseurs du SAILMI sont français, mais un grand nombre d'entre eux importent en réalité des équipements fabriqués à l'étranger. J'espère que les prochaines années nous donneront l'occasion de nous pencher avec attention sur la densité, l'autonomie et la performance du tissu industriel français de la sécurité intérieure. Alors que les crédits dédiés à l'équipement et à l'investissement en faveur des forces de sécurité intérieure augmentent, sous l'effet des choix politiques réalisés et du plan de relance, il serait souhaitable que cet argent public puisse profiter encore plus à l'industrie française, dans le respect, bien sûr, des principes de la libre concurrence.

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Le programme 161 regroupe l'ensemble des moyens du ministère de l'intérieur consacrés à la protection des populations et à la gestion de crise. En 2020, ce programme a été exécuté à hauteur de 474,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 555,4 millions d'euros en crédits de paiement. Par rapport à 2019, ces montants progressent de 21,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 7 millions d'euros en crédits de paiement.

À l'échelle du programme, les écarts entre l'exécution 2020 et la prévision établie en loi de finances initiale reflètent les conséquences de la crise sanitaire. La consommation des autorisations d'engagement est inférieure à ce que prévoyait la loi de finances, puisque 96,1 % des crédits ont été utilisés ; cette sous-exécution est principalement due à des retards et à des reports de marchés. Les crédits de paiement connaissent une évolution inverse : ils progressent de 6,7 % par rapport à la loi de finances initiale. C'est la conséquence de la hausse des dépenses d'intervention et des subventions exceptionnelles attribuées aux associations et organismes concourant à la mission de sécurité civile pour compenser la perte de leurs recettes habituelles, toujours en raison de la crise sanitaire – j'y reviendrai dans quelques instants.

Je rappelle la forte mobilisation des personnels de la sécurité civile depuis le début de la crise sanitaire. Je souhaite saluer ici leur action, car celle-ci n'a pas toujours été visible du grand public. La sécurité civile a participé à l'évacuation des malades du covid-19, ainsi qu'à la réalisation de tests antigéniques dans les ports et aéroports français. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises reste aujourd'hui pleinement investie dans la lutte contre l'épidémie, étant chargée du financement des vaccinodromes gérés par les sapeurs-pompiers.

Nous nous rappelons aussi des inondations majeures connues par le département des Alpes-Maritimes suite à la tempête Alex, au début du mois d'octobre 2020. Les forces nationales de la sécurité civile y ont été déployées, aux côtés des colonnes de renfort des sapeurs-pompiers des départements voisins. Au total, 1 780 interventions ont été réalisées et 800 personnes ont pu être mises à l'abri.

Au programme 161 est également inscrite la subvention de l'État à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Je m'y attarde un instant car l'exécution 2020 est supérieure au montant prévu, en raison d'un budget supplémentaire adopté en juillet afin de prendre en compte les conséquences de la crise sanitaire. La dotation s'est élevée à 91,6 millions d'euros, contre 86,8 millions prévus. Pouvez-vous m'indiquer, madame la ministre déléguée, quelles conclusions seront tirées pour la préparation du PLF pour 2022, sachant que la brigade des sapeurs-pompiers de Paris a engagé un plan de modernisation sur dix ans, ô combien nécessaire au regard du vieillissement de ses infrastructures ?

Comme je viens de l'indiquer, l'exécution budgétaire 2020 a été fortement marquée par la crise sanitaire, avec des dépenses par nature non prévisibles. Des crédits supplémentaires ont été ouverts par les troisième et quatrième lois de finances rectificatives : ils ont permis de financer des subventions versées aux associations agréées de sécurité civile, qui ont perdu en 2020 une partie de leurs recettes habituelles du fait de l'annulation des grands événements culturels et sportifs, ainsi que l'achat de deux hélicoptères commandés dans le cadre du plan de soutien à l'industrie aéronautique, pour un montant 32 millions d'euros.

J'en viens à la question de la flotte aérienne de la sécurité civile. C'est le thème d'évaluation que j'ai choisi cette année, pour deux raisons. D'une part, le financement des moyens aériens représente la majeure partie des crédits du programme, et il est bien sûr important d'en vérifier l'usage. D'autre part, j'ai constaté depuis plusieurs années que la flotte est désormais de taille inférieure à sa taille habituelle ; or moins d'appareils, c'est aussi moins de moyens pour intervenir dans le cadre de crises, de feux de forêt, ou pour évacuer des personnes.

Pour la préparation de ce rapport, j'ai évidemment auditionné le responsable du programme, M. le préfet Thirion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises. Je le remercie de m'avoir invité à rencontrer les personnels du groupement aérien de la base de Nîmes et à échanger avec eux sur les questions du renouvellement de la flotte et de sa maintenance – j'y étais il y a tout juste une semaine.

J'ai constaté que les hélicoptères et les avions de la sécurité civile subissaient un vieillissement accéléré, du fait de leur forte utilisation. Aujourd'hui, la plupart de ces appareils sont âgés. Ainsi, l'année dernière, la sécurité civile a été contrainte de mettre un terme à l'utilisation de sa flotte d'avions Tracker, qui avaient en moyenne 63 ans. Les Canadair ont en moyenne 25 ans, les hélicoptères 16 ans.

Il est urgent d'investir, pour des raisons tenant à la sécurité des pilotes et des équipages, aux coûts de maintenance et aux conséquences de l'âge sur la disponibilité des appareils. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises estime que, pour pouvoir réaliser pleinement son contrat opérationnel, il lui faudrait disposer de trente-huit hélicoptères. Or, après plusieurs accidents, la flotte est désormais réduite à trente-quatre appareils. Dans ces conditions, la gestion de la flotte ne laisse plus apparaître de marges de manœuvre en cas d'incident technique : la seule solution est alors de fermer des bases. Ainsi, en 2020, la base de Quimper a été fermée durant tout le mois de février, et la sécurité civile n'a pas été en mesure d'armer deux détachements à Mende et Melun pendant toute la période estivale. Au Touquet, dans les Hauts-de-France, il n'y a plus d'hélicoptère depuis déjà plusieurs années.

L'achat de deux hélicoptères, grâce au plan de soutien à l'industrie aéronautique, est un excellent début. Il faut continuer dans cette direction. Toujours dans le cadre du plan de relance, la direction générale de la sécurité civile a posé une option sur deux hélicoptères supplémentaires. Je ne peux que soutenir cette opération, d'autant que le constructeur a très nettement baissé le prix d'achat, la chaîne de montage et de préparation étant déjà prête. Pouvez-vous m'indiquer, madame la ministre déléguée, si ces commandes pourront être rapidement confirmées ?

Acheter de nouveaux aéronefs, c'est modifier le visage de la flotte pour dix, quinze ou vingt ans. Il est donc nécessaire de réfléchir, d'un point de vue stratégique, aux missions qui seront, demain, celles de la sécurité civile.

Il est aussi urgent de réfléchir au remplacement des trente-quatre hélicoptères actuels. Nous devons prendre une décision dès maintenant et élaborer un plan d'acquisition étalé sur dix ou quinze ans.

Permettez-moi également d'insister sur la situation des Canadair. Si nous perdons l'un de ces avions, nous ne pourrons pas le remplacer, faute de chaîne de fabrication existante. Or la société canadienne Viking Air a besoin de vingt commandes pour remonter une chaîne. La France ne pouvant émettre à elle seule ces vingt commandes, nous devons y travailler au niveau européen. Je rappelle que le Canadair ne souffre aujourd'hui d'aucune concurrence.

J'ai constaté avec intérêt que la sécurité civile réfléchissait à une diversification de ses moyens aériens contre les feux de forêt. Un premier pas a été fait en 2020, après l'arrêt précipité des avions Tracker que je viens d'évoquer et la location en urgence d'un hélicoptère bombardier d'eau, un Puma de type EC225 qui s'est révélé très complémentaire des Canadair. C'est, à mon sens, une pratique à renouveler.

Pour rédiger ce rapport, j'ai aussi auditionné les administrations qui possèdent des flottes aériennes du même type afin de faire le point sur les mutualisations existantes et de réfléchir à ce qui pourrait être approfondi. Certaines flottes telles que celles de la gendarmerie nationale ou des HéliSmur des centres hospitaliers présentent en effet des caractéristiques communes, permettant d'envisager certaines mutualisations.

Du reste, certains aspects sont déjà mutualisés. Je pense notamment à la mutualisation de différents marchés orchestrée par la direction de la maintenance aéronautique du ministère des armées. Par ailleurs, à Nîmes, la sécurité civile et la gendarmerie nationale procèdent à la maintenance de leurs moyens aériens sur la même base, ce qui permet de réaliser des économies d'échelles et d'améliorer le taux de disponibilité des appareils. Je signale au passage que, sur la base de Nîmes, la sécurité civile sous-traite l'entretien et la maintenance de ses avions mais assure la maintenance de ses hélicoptères en régie. Ce système de maintenance en régie est assez rare, dans l'administration au sens large, pour être souligné ; il a des effets très positifs sur la disponibilité des appareils, condition essentielle de l'intervention de la sécurité civile, et il convient de le préserver.

Les administrations travaillent de concert à une amplification de ces mutualisations, lorsque c'est possible. Ainsi, les avions Dash-8 de la sécurité civile, qui permettent de transporter une quarantaine de passagers ou des malades reposant sur six civières, peuvent, moyennant quelques aménagements, être utilisés par les autres services du ministère de l'intérieur. Nous devons encourager ces efforts.

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Je voudrais tout d'abord saluer les engagements budgétaires majeurs pris par le Gouvernement en 2020 en faveur de nos forces de sécurité. Cet effort inédit a été salué par l'ensemble des acteurs que nous avons auditionnés.

Madame la ministre déléguée, j'aimerais vous poser plusieurs questions concernant l'exécution du budget 2020.

Dans le cadre du plan de relance et de la troisième loi de finances rectificative pour 2020, nous avons ouvert 200 millions d'euros en autorisations d'engagement et 20 millions d'euros en crédits de paiement afin d'acquérir dix hélicoptères H160. Où en est ce programme d'acquisition ? J'ai en effet noté que, suite à un décalage dans la notification du marché conclu entre la direction générale de l'armement et Airbus, la gendarmerie avait demandé le report de ces crédits sur l'exercice 2021.

Toujours dans le cadre de la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020, nous avons décidé de commander quelque 1 300 véhicules pour un montant d'environ 37 millions d'euros. A également été prévu le financement de bornes électriques et d'équipements du quotidien. Je tiens à saluer cet effort budgétaire majeur en faveur de l'équipement de la gendarmerie. La Cour des comptes note une augmentation de 34 % des crédits d'équipement des gendarmes par rapport à 2019. Pourriez-vous nous fournir des éléments d'appréciation concernant cette commande de véhicules électriques ? J'ai cru comprendre que l'installation de bornes électriques dans les casernes, en particulier dans les casernes locatives, n'était pas toujours évidente.

En septembre dernier, vous avez lancé un plan d'opérations d'entretien et de petits travaux intitulé « poignées de porte ». Sur les 26 millions d'euros budgétés, 15 millions sont destinés à la gendarmerie. Quel bilan tirez-vous de ce plan ? Il me semble, pour ma part, qu'il procède d'une bonne méthode, qui a permis d'apporter rapidement des améliorations très appréciables pour la vie quotidienne en caserne.

Ce plan, très bien accueilli par les gendarmes, a été financé grâce à un dégel de la réserve de précaution. Cette réserve appliquée au budget de la gendarmerie ne devrait-elle pas être imputée aux seules dépenses manœuvrables ? En effet, le taux de mise en réserve de 4 % appliqué à la totalité des dépenses hors titre 2 passe à 11 % une fois les dépenses obligatoires déduites. Il serait intéressant d'évoquer cette question avec le ministère du budget.

J'aimerais, comme MM. Grau et Duvergé, revenir quelques instants sur les mutualisations opérées au ministère de l'intérieur. La mission Sécurités a connu, en 2020, diverses mesures de transferts vers le programme 216, qui traduisent des mutualisations de fonctions support. Les mesures les plus significatives sont la création de la direction du numérique et du service de l'achat, de l'innovation et de la logistique du ministère de l'intérieur, ainsi que le rattachement des secrétariats généraux de l'administration du ministère de l'intérieur, hors Île-de-France, au programme 216. Comme le souligne la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire, si la création du SAILMI se justifie par la recherche d'économies d'échelle, les gains devront être vérifiés et documentés, y compris pour les programmes de la mission Sécurités. Les mutualisations opérées au ministère de l'intérieur font-elles l'objet d'une évaluation a priori et a posteriori ?

Conformément au souhait du Président de la République, le ministre de l'intérieur a annoncé que les forces de sécurité intérieure seraient équipées de nouvelles caméras-piétons. Après publication d'un appel d'offres, la société Motorola a remporté le marché. Je souhaiterais m'assurer que l'usage de ces nouvelles caméras ne posera pas les difficultés soulevées par le modèle précédent.

Enfin, une mission d'information de la commission de la défense a rendu, la semaine dernière, ses conclusions sur la question des réserves. C'est un sujet qui me tient à cœur et sur lequel j'aimerais recueillir votre sentiment, madame la ministre déléguée. Je note que la réserve opérationnelle a connu un engagement fort à compter du premier confinement, notamment dans le cadre de la sécurité du quotidien, du contrôle aux frontières et de la lutte antiterroriste. La Cour des comptes constate un report de charges exceptionnel de 21 millions d'euros sur l'exercice 2021. Il serait opportun de sanctuariser les crédits de la réserve opérationnelle.

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Au-delà de l'examen général de l'exécution des crédits au cours de l'année passée, j'aimerais vous interroger, madame la ministre déléguée, sur trois sujets d'actualité qui touchent de façon différente le cœur de l'activité des forces de l'ordre : le renouvellement des équipements dont elles disposent, le paiement des heures supplémentaires qu'elles effectuent et le recours croissant aux dispositifs d'amende forfaitaire.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, j'avais consacré la partie thématique de mon rapport pour avis à l'utilisation des nouvelles technologies par les forces de l'ordre. Il s'agit d'un enjeu majeur, car en permettant aux policiers et aux gendarmes d'accomplir à l'extérieur des commissariats et des gendarmeries une grande partie des tâches actuellement effectuées dans les services, nous pourrons accroître leur présence sur le terrain.

Il s'agit aussi de gagner du temps, d'être plus efficaces, tout en améliorant le mode de gestion des crises et les capacités de résilience. Les réseaux de nouvelle génération nous aident à y parvenir.

Quel est le bilan de l'utilisation des tablettes depuis le lancement du projet NEO en 2015 ainsi que des applications mobiles mises à la disposition de la gendarmerie et de la police ?

Concernant les équipements directement liés à l'activité opérationnelle des forces de l'ordre, en particulier les caméras-piétons, il apparaît nécessaire de faire évoluer le cadre juridique afin de garantir la pleine efficacité de ces outils, dans le respect des libertés individuelles. Quel bilan tirez-vous de leur utilisation ? Quels sont vos objectifs ?

J'en viens au paiement des heures supplémentaires dans la police nationale. La Cour des comptes a relevé, le mois dernier, que des risques financiers pesaient sur la soutenabilité des dépenses de personnel. En 2020, deux campagnes de régularisation du flux ont certes permis d'indemniser 2,2 millions d'heures mais la dette du stock d'heures supplémentaires évaluées au coût d'heures travaillées, soit 825 millions d'euros au 31 décembre 2019, grève les capacités opérationnelles de la police nationale. La Cour des comptes souligne qu'il en résulte un effort budgétaire considérable au regard des exigences de soutenabilité budgétaire, dont il faut tenir compte, bien évidemment. Comptez-vous accélérer la politique d'indemnisation des heures supplémentaires ?

Quant aux amendes forfaitaires, si elles représentent la peine contraventionnelle de droit commun, elles tendent à se développer en matière délictuelle depuis les lois des 18 novembre 2016 et 23 mars 2019. Le recours à cette procédure permet de renforcer l'efficacité et la rapidité de la réponse pénale, d'alléger l'activité des juridictions tout en favorisant une action systématique et plus dissuasive. Comment ces dispositifs sont-ils perçus sur le terrain ? À quels enjeux opérationnels les forces de l'ordre sont-elles confrontées lorsqu'elles constatent des infractions susceptibles de faire l'objet d'une amende forfaitaire ?

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La loi du 13 août 2004 relative à la modernisation de la sécurité civile dispose que l'État est garant de la cohérence de la sécurité civile au plan national, qu'il en définit la doctrine et en coordonne les moyens. Cette doctrine est appliquée à l'échelle nationale par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. Au cours des deux dernières années, j'ai eu l'honneur d'être rapporteur pour avis pour le programme Sécurité civile et j'ai choisi, à chaque fois, de tenir compte, dans mon propos, du contexte dans lequel s'inscrivait le débat relatif à la loi de finances. Ainsi, fin 2019, le rapport mettait en lumière les nombreuses questions que se posaient les acteurs de la sécurité civile quant aux modalités pratiques de l'organisation de leurs interventions et aux moyens alloués à leur exercice. En 2020, tout naturellement, j'ai préféré examiner avec toutes les parties prenantes les conséquences de la crise sanitaire sur le déploiement de la sécurité civile.

Vous avez rappelé, monsieur Duvergé, le rôle et la doctrine de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises ainsi que les actions exceptionnelles que cette direction a menées l'année dernière, qu'il s'agisse de l'évacuation sanitaire de malades, du transport d'équipes médicales et de matériel ou de la mise en place de la campagne de tests antigéniques dans les ports et les aéroports. Ces activités se sont ajoutées à celles, plus ordinaires, dévolues aux personnels de cette direction, en particulier face aux attaques terroristes perpétrées l'an dernier et aux catastrophes qui ont frappé les Alpes-Maritimes. Ces questions sont au cœur des débats en hémicycle, cette semaine, puisque la proposition de loi que de nombreux députés ont signée pour faire évoluer le soutien et la reconnaissance apportés à nos sapeurs-pompiers y est examinée. Je ne reviendrai pas sur les nombreuses mesures de ce texte, qui vont toutes dans le bon sens.

Mes questions, ce soir, concernent les moyens que l'État entend mobiliser pour relever les défis de la sécurité civile de demain, à la lueur des événements que nous venons de vivre. Le rôle de coordonnateur des actions concourant à la sécurité civile dans nos territoires échoit aux préfets, qui peuvent solliciter police, gendarmerie, sapeurs-pompiers, SAMU… La sécurité civile repose également sur d'autres acteurs, notamment les maires et les présidents de conseil départemental. C'est en effet à l'échelle départementale que les services d'incendie et de secours réalisent leurs missions. Le Gouvernement a d'ailleurs poursuivi l'an passé sa politique de décentralisation visant à laisser aux administrations centrales l'élaboration de la doctrine et à transférer aux acteurs des territoires les mesures de gestion.

Quelles sont les conséquences, en particulier budgétaires, de cette décentralisation pour les conseils départementaux ? Les avez-vous évaluées précisément ? Comment compenserez-vous, à l'avenir, la hausse de ces coûts pour les collectivités départementales ?

De quels moyens dispose l'État pour former et coordonner les autres acteurs de la sécurité civile ? Comment ces moyens ont-ils évolué au cours des dernières années ? De nombreuses associations agréées de sécurité civile s'inquiètent de leur devenir et de la pérennité de leurs moyens. Certaines ont été exceptionnellement aidées pour faire face aux pertes massives de ressources qui ont résulté de la crise sanitaire. Ces solutions, hélas, ne sont pas durables. Que comptez-vous faire ?

Enfin, en tant que coordinateur, l'État a-t-il constaté que les politiques de sécurité civile devaient être renforcées dans certains territoires ? Le cas échéant, comment travaille-t-il avec les territoires concernés ?

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Vous aviez l'objectif de recruter 10 000 policiers et gendarmes : où en êtes-vous ?

Par ailleurs, vous avez repoussé les mesures catégorielles pour la police. Quelles en seront les conséquences budgétaires en 2021 et 2022 ?

Concernant l'équipement des forces de police et de gendarmerie, j'ai bien compris que vous aviez augmenté les moyens, ce qui vous avait permis d'acquérir des hélicoptères et des caméras-piétons – qui présentaient encore récemment des problèmes de fonctionnement. Il est probable qu'une mutualisation de ces moyens sera nécessaire. Quelles sont les perspectives ?

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Marlène Schiappa, ministre déléguée

La sécurité est l'une des priorités du Gouvernement. Au cours de l'année 2020, les forces de sécurité intérieure ont été mobilisées d'une manière exceptionnelle, du fait de la menace terroriste mais aussi de groupes violents et imprévisibles, sans parler de l'insécurité du quotidien qui nécessite une attention de chaque instant. Enfin, les forces de l'ordre comme celles de sécurité civile ont été en première ligne pour lutter contre la pandémie.

Après avoir répondu à vos rapporteurs spéciaux, j'expliquerai comment les priorités de la mission Sécurités se reflètent dans l'exécution budgétaire de l'année 2020. Tout d'abord, je salue le travail approfondi des rapporteurs spéciaux tant pour les programmes Police nationale et Gendarmerie nationale que pour le programme Sécurité civile. Les rapports de MM. Romain Grau et Bruno Duvergé concernent des missions support de soutien à nos forces de sécurité intérieure. Ces missions sont essentielles, qu'il s'agisse des achats, de la maintenance ou de la logistique. C'est le nerf de la guerre. Sans une fonction soutien efficace, les forces de sécurité intérieure ne pourraient remplir leurs missions.

Vous avez commencé par examiner la fonction achat du ministère de l'intérieur, qui a connu une évolution majeure en 2020 du fait de la création d'un service mutualisé d'achats au bénéfice de la police et de la gendarmerie. Cela a permis de mener une politique de l'achat rénovée, plus ambitieuse et efficace, rattachée au secrétariat général, au sein de la direction de l'évaluation de la performance, de l'achat, des finances et de l'immobilier (DEPAFI), qui regroupe l'intégralité des fonctions achat et approvisionnement logistique, pour l'ensemble des directions régionales, directions et délégations du ministère de l'intérieur.

Le ministre de l'intérieur et moi-même lui avons fixé comme objectif d'acheter aux meilleures conditions économiques, d'harmoniser les activités d'achat et logistiques au niveau national. Ces efforts de mutualisation permettent de concilier les gains budgétaires et les besoins des utilisateurs.

Dans le cadre de la mission d'évaluation, je partage votre objectif de contrôler que ce nouveau service ait bien répondu aux attentes. Il s'agissait tout d'abord de dégager des économies en optimisant les achats pour l'ensemble du ministère. La trajectoire initiale d'économies budgétaires a été fixée à 106 millions d'euros entre 2020 et 2021. À ce jour, 71 millions ont pu être économisés. Sans les achats rendus nécessaires pour affronter la crise sanitaire, notre objectif aurait été dépassé.

Pour ce qui est de l'équipement et de la logistique, la mutualisation entre la gendarmerie nationale et la police nationale est systématique puisque seuls les besoins spécifiques sont traités de manière autonome. Les achats mutualisés d'habillements, de moyens mobiles, d'équipements, de protections balistiques, d'armements, de munitions, permettent de réaliser des économies.

Nous avons souhaité, par ailleurs, mutualiser les achats entre la police, la gendarmerie, voire la sécurité civile. Aujourd'hui, cinq marchés sont mutualisés pour une trentaine de produits – casques et tenues moto, tenues de combat de la force d'intervention de la police nationale (FIPN) et du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), tenues de montagne, matériel pare-coups. Pour l'habillement, plus de quatre-vingts produits sont totalement mutualisés et une vingtaine le sont partiellement. Le Gouvernement est soucieux d'accélérer cette politique afin de raccourcir les délais de mise à disposition des équipements aux forces sur le terrain.

Nous voulons enfin que l'argent public consacré à ces achats alimente une filière française d'excellence, dans le respect de la commande publique telle qu'elle est réglementée au niveau européen. Nous tenons à acheter le meilleur produit au meilleur coût.

J'en viens à une fonction dite support : l'entretien et le renouvellement de la flotte aérienne de la sécurité civile, constituée de vingt avions et de trente-quatre hélicoptères. Les avions reposent sur trois types de vecteurs qui ont chacun une finalité : trois avions de commandement et d'investigation, douze avions bombardiers d'eau amphibies, cinq avions polyvalents ravitaillés au sol Dash-8. Trois supplémentaires seront livrés d'ici fin 2022. La flotte des hélicoptères est constituée de trente-quatre hélicoptères du même type et deux hélicoptères supplémentaires ont été acquis grâce au plan de relance. Ils seront livrés dès cet automne pour approcher le nombre des trente-huit appareils qui constituaient la flotte des années antérieures.

L'activité de la flotte hélicoptère a augmenté de 70 % depuis 2002 puisque nous sommes passés de 10 000 à 17 000 missions par an. Le ministère de l'intérieur consacre chaque année environ 75 millions d'euros à leur maintenance – 46 millions pour les avions, 28 millions pour les hélicoptères. Afin d'améliorer la politique d'entretien, le marché du maintien opérationnel des hélicoptères a été mutualisé entre la sécurité civile et la gendarmerie. Ainsi, la base aérienne de la sécurité civile à Nîmes accueille deux emplacements, au profit de la gendarmerie, pour l'entretien des hélicoptères. Les deux directions mutualisent aussi les pièces, les outils et le savoir-faire des techniciens. Le Gouvernement attache une grande importance aux moyens aéroportés de la sécurité civile. La question de poursuivre leur renouvellement, du fait de l'âge de la flotte des avions et des hélicoptères, se posera dans le cadre des futures lois de finances et au regard des équilibres budgétaires d'ensemble, même si j'ai bien noté votre soutien à cette dépense.

L'année 2020 fut affectée par la crise sanitaire, sans pour autant que les grandes priorités ne soient abandonnées. Pour l'ensemble de la mission, l'écart entre les prévisions et l'exécution est faible, de l'ordre de 0,2 %, notamment parce que le Gouvernement a proposé au Parlement, en loi de finances rectificative, de compléter les crédits nécessaires à la lutte contre la pandémie. La police nationale a veillé à poursuivre ses actions de police de sécurité du quotidien, de lutte contre la délinquance, afin de respecter les priorités engagées en faveur de la sécurité des Français. Les effectifs ont bien été consolidés par le plan de création de 10 000 postes. La lutte contre les stupéfiants, priorité du Gouvernement, s'est concrétisée grâce au déploiement progressif de la forfaitisation des amendes pour usage de stupéfiants, qui a été généralisée à l'ensemble du territoire national en 2020. Les retours sont positifs. Le nouveau schéma national du maintien de l'ordre, instauré le 1er septembre et qui a commencé à se déployer, s'est traduit par un renforcement du renseignement en amont des événements de voie publique, la clarification des sommations, la pratique d'intervention rapide pour interpeller les auteurs de violences et l'encadrement de l'usage des armes intermédiaires. Le programme a également soutenu ces différents investissements budgétaires dans les équipements, l'immobilier, le numérique, l'action sociale, au profit des agents. Grâce aux crédits de la loi de finances rectificative, le renouvellement de 25 % du parc automobile a pu être engagé dès 2020. Nous en avons reçu des échos positifs. Le ministre de l'intérieur a également engagé le plan de rénovation de l'immobilier du quotidien dit « poignées de porte », pour améliorer les conditions de travail des policiers.

La crise sanitaire a rendu nécessaires des dépenses supplémentaires en 2020, de l'ordre de 55 millions d'euros, notamment pour équiper les forces en protections sanitaires et accompagner leur télétravail par la fourniture de terminaux mobiles. Les policiers ont renforcé, durant le confinement, la lutte contre les violences intrafamiliales, qui est l'une des trois priorités du ministère de l'intérieur. À cela s'ajoute l'accueil dédié, dans les commissariats, aux victimes de violences conjugales par des services spécialisés, qui associent policiers référents et psychologues, grâce à l'engagement de quatre-vingts intervenants sociaux en brigades de gendarmerie et dans les commissariats. C'était l'un des objectifs du Grenelle des violences conjugales, qui a été rempli et dépassé puisque nous en sommes à quatre-vingt-quinze intervenants.

De même, pour ce qui est de la gendarmerie, les missions prioritaires ont été assurées, malgré le surcoût. La crise nous a conduits à prendre des mesures exceptionnelles. Dans le domaine immobilier, le plan « poignées de porte », lancé à l'initiative du ministre de l'intérieur, a permis d'engager 3 000 opérations localement.

Par ailleurs, les lois de finances rectificatives ont permis d'acquérir dix hélicoptères et de poursuivre en 2021 le renouvellement des véhicules par un plan d'équipement à hauteur de 13 millions d'euros. Pas moins de 3 500 véhicules, dont 636 véhicules électriques, ont ainsi pu être commandés.

La sécurité civile a, elle aussi, été très mobilisée du fait de la crise sanitaire. Des crédits complémentaires ont été affectés à la prise en charge des tests antigéniques dans les aéroports. Ainsi, 4,5 millions d'euros ont été transférés du ministère de la santé. Ce dernier a souhaité, en outre, attribuer plus de 21 millions aux associations agréées de sécurité civile, qui ont subi de lourdes pertes du fait de l'annulation des manifestations sportives et culturelles mais qui ont, malgré tout, continué à accompagner l'État. Je salue leur engagement et leur travail.

La pandémie a également frappé la politique de sécurité routière. D'un côté, des économies ont été réalisées en raison de la baisse du nombre d'activités évènementielles, de la diminution des frais de déplacement des inspecteurs du permis de conduire et de la baisse du nombre de prêts financés pour le passage du permis de conduire – 64 000 en 2020 contre 84 000 en 2019. Ces moindres dépenses ont permis, de l'autre côté, d'apporter un soutien exceptionnel aux associations et de financer des vacations pour les inspecteurs du permis de conduire à l'automne afin de résorber le retard accumulé dans le passage de cet examen, du fait des mesures de distanciation physique.

Je remercie l'ensemble des forces de sécurité intérieure qui ont témoigné d'un engagement et d'un professionnalisme exceptionnels : policiers, gendarmes, pompiers volontaires et professionnels, mais aussi fonctionnaires des services en soutien, en administration centrale comme en territoriale. La sollicitation du ministère de l'intérieur comme d'autres services de l'État fut exceptionnelle, ce qui n'a pas empêché de poursuivre les actions prioritaires en dehors de la crise sanitaire. De nombreux nouveaux chantiers ont été engagés.

J'en viens aux questions qui m'ont été posées. Concernant les heures supplémentaires de la police, en deux ans nous avons indemnisé 5,6 millions d'heures supplémentaires, ce qui représente un montant de 71,3 millions d'euros. Nous rattrapons un niveau de stocks équivalent à celui de 2015. Les campagnes sur les heures supplémentaires sont efficaces.

Les caméras-piétons devraient être généralisées à partir du 1er juillet. Des policiers et des gendarmes ont relevé les limites techniques de ces dispositifs mais les forces de l'ordre disposaient jusqu'à présent d'un modèle dont l'autonomie était jugée insuffisante et la fixation de mauvaise qualité. Nous avons lancé, avec le ministre de l'intérieur, un nouveau marché. De nouvelles caméras seront distribuées dès le 1er juillet 2021. Les modèles ont été définis et sélectionnés en lien étroit avec les policiers et les gendarmes. Ils ont été testés, à la demande du ministère de l'intérieur, par ces policiers et gendarmes, sur le terrain, en conditions réelles. Je tiens à votre disposition les critères qui ont présidé à leur sélection.

Par ailleurs, nous souhaitons atteindre l'objectif de 50 000 réservistes dans la gendarmerie nationale et créer 30 000 postes de réservistes dans la police nationale, suivant le même modèle.

S'agissant du plan de recrutement quinquennal de 10 000 policiers et gendarmes, nous sommes au rendez-vous de l'annonce du Président de la République puisque 6 214 postes nets de policiers et de gendarmes ont été créés entre 2018 et 2020. Vous en retrouverez la trace dans le rapport annuel de performance qui rend compte de l'exécution budgétaire pour les programmes 176 et 152 . C'est bien la notion d'emplois à périmètre constant que nous devons retenir. L'engagement sera tenu, au prix d'un effort budgétaire pour rattraper les suppressions d'emplois entre 2007 et 2012 et d'une forte mobilisation de l'appareil de formation. Pas moins de 30 300 recrutements ont été réalisés depuis 2018, dont 12 800 gardiens de la paix et 9 500 adjoints de sécurité, afin de remplacer les effectifs partants – départs en retraite, missions – mais aussi d'assurer les créations nettes d'emploi prévues dans le plan du ministre de l'intérieur. C'est une priorité du Gouvernement. La répartition initiale de ce plan est régulièrement revue en fonction de l'évolution des priorités opérationnelles. L'accent sera mis sur les créations restant à réaliser en 2021 et en 2022 en matière de sécurité publique.

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Concernant les heures supplémentaires, vous pouvez vous référer au rapport remis l'an dernier par la Cour des comptes à notre commission sur le fondement du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances.

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Merci, madame la ministre déléguée, pour votre présence devant notre commission, d'autant plus indispensable que la représentation nationale est attentive au quotidien de ceux qui nous protègent et qui, au sein des institutions républicaines de la police et de la gendarmerie, sont engagés pour la sécurité de nos concitoyens.

Bien loin des paroles de tribune ou des postures politiciennes de ceux qui promettent pour demain, tout en oubliant qu'hier et avant-hier, ils ont supprimé des dizaines de milliers de postes, notre majorité est celle qui agit comme jamais aucune ne l'avait fait auparavant.

Nous avons voté, en loi de finances pour 2021, des crédits en augmentation de 200 millions d'euros par rapport à l'année dernière, auxquels s'ajoute près d'un milliard d'euros dans le cadre du plan de relance. Le plan de création de 10 000 emplois de policiers et de gendarmes supplémentaires, lancé en 2017, pour cinq ans, par le Président de la République, est poursuivi puisque, cette année, ce sont près de 2 000 recrutements qui compléteront les effectifs des forces de sécurité. Indemnités liées au travail de nuit, renforcement des moyens et équipements de protection et de prévention de la gendarmerie et de la police nationale, rénovation des infrastructures immobilières, nouvelles technologies sont autant de domaines dans lesquels nous investissons. Nous le devons aux femmes et aux hommes qui nous protègent, nous le devons au pays.

J'aimerais vous interroger au sujet d'un problème qui touche particulièrement les Hauts-de-France et le Nord : la coopération transfrontalière en matière de police. Les zones transfrontalières sont soumises à des législations, des protocoles, des pratiques différents. Le ministère a-t-il dédié des moyens financiers à ce secteur ? Quels sont vos objectifs en matière de coopération européenne pour la sécurité, alors que de janvier à juin 2022, la France présidera le Conseil de l'Union européenne ?

Alors que le Beauvau de la sécurité vient de reprendre, envisagez-vous des mesures pour renforcer la coopération entre la police et la justice ?

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J'ai entendu les polémiques récurrentes qui nous rappellent la période 2007-2012. Lorsque le président Sarkozy a quitté le pouvoir, notre pays déplorait 1 867 homicides, tentatives d'homicide ou règlements de compte. Près de dix ans plus tard, après cinq années de gestion Macron-Hollande et quatre années Macron, ce nombre est monté à 4 472. Les chiffres ne peuvent se résumer à des effectifs de police, qui étaient autrefois davantage présents sur le terrain. Depuis, malgré les hausses de personnels, ils le sont beaucoup moins, sans doute en raison d'une nouvelle organisation.

Le rapport d'exécution de la Cour des comptes évalue la dette à l'égard des policiers à 825,5 millions d'euros d'heures supplémentaires non payées. C'est gigantesque et scandaleux. Vous avez évoqué une forme de rattrapage : 5,6 millions d'heures supplémentaires payées, 72 millions d'euros. Si je compte bien, il resterait 754 millions d'euros d'heures supplémentaires à payer aux policiers. Nous sommes très loin du compte. Pourriez-vous nous donner un calendrier précis ? Il en va de la reconnaissance de la nation envers ces hommes et ces femmes qui se sacrifient, ne comptent pas leurs heures, subissent des tensions énormes, du fait de la menace terroriste, de la crise sociale, de l'explosion de la violence dans les quartiers. Il est paradoxal que l'État doive à ces hommes et à ces femmes exceptionnels encore 825,5 millions d'euros.

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La mission Sécurités comprend plusieurs programmes : Police nationale, Gendarmerie nationale, Sécurité et éducation routières, Sécurité civile. S'y ajoute, dans le cadre de cette commission d'évaluation des politiques publiques, le contrôle de la circulation et du stationnement routiers.

Concernant le champ de la mission Sécurités, nous nous félicitions, à l'automne 2019, d'une hausse des crédits qui devrait nous permettre d'assurer mieux encore ces missions régaliennes fondamentales. Du fait de la crise sanitaire, nous observons une sous-consommation d'une partie de ces crédits, notamment pour ce qui concerne les dépenses de personnel. Je salue au passage l'effet rebond observé au cours des premiers mois de 2021, au cours desquels sont arrivés dix-sept nouveaux policiers au commissariat de Nanterre.

Les dépenses d'équipement ont bondi de plus de 2,8 % en 2020, notamment pour le financement du plan « poignées de porte » qui permet de réaliser de petits travaux dans les commissariats et locaux de gendarmerie, ce qui améliore le cadre et la qualité de vie au travail des fonctionnaires et des militaires. Ce financement, qui permet de rattraper les économies liées à une politique du rabot budgétaire réalisée entre 2010 et 2017, n'est cependant dû qu'à une réallocation des crédits libérés par des économies conjoncturelles. Ne faudrait-il pas intégrer ces dépenses dans un plan plus large et pluriannuel ?

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La Cour des comptes relève que l'exécution 2020 est marquée par une sous-consommation des dépenses de personnel, du fait de la crise sanitaire, mais cela ne permet pas d'éviter les risques financiers, en raison du maintien d'un stock d'heures supplémentaires non payées pour la police nationale. J'ai bien compris qu'il trouvait son origine en 2015, dans des circonstances que nous aurions aimé éviter, mais en 2019, la somme a atteint 825,5 millions d'euros. Comment pourrons-nous honorer cet engagement ?

Nous saluons la création de 10 000 postes – nous nous étions déjà employés à augmenter les effectifs des forces de sécurité en 2012. Pour autant, comment peut-on organiser la formation de ces policiers et gendarmes fraîchement recrutés ? Ne se fait-elle pas à marche forcée ? Je vous pose la question sans malice.

Enfin, où en êtes-vous de l'investissement immobilier ? La vétusté de certaines gendarmeries impose d'agir rapidement.

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Nous pouvons nous réjouir de la hausse des crédits, qui permet de renforcer les moyens sur le terrain et de moderniser les équipements. Quand on visite le commissariat de Tourcoing, qui rayonne dans toute son agglomération, on ne peut que se féliciter de ses locaux neufs et de la mutualisation des moyens avec la police municipale, en particulier du contrôle en commun du système de vidéo-protection.

Je salue le travail des rapporteurs spéciaux, au sujet duquel je poserai quelques questions. Nous avons réfléchi, la semaine dernière, avec le président Woerth, à la politique d'innovation et nous avons remarqué que la commande publique était faible. Le ministère de l'intérieur semble vertueux à cet égard. Quelle part ces achats d'innovation représentent-ils dans la commande publique du ministère ? Est-elle amenée à progresser ?

Enfin, j'observe qu'à l'étranger, on mutualise au maximum les fonctions support. Irons-nous plus loin, de notre côté ?

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Je salue à mon tour le travail des rapporteurs spéciaux. La Cour des comptes remarque qu'en dépit des hausses salariales annoncées, les crédits alloués à la rémunération des policiers et gendarmes a été marquée par une sous-exécution assez atypique. Comment l'expliquez-vous ?

Quant à la lutte contre les feux de forêt, je me réjouis de l'annonce, par le Président de la République, de l'achat de six avions de type Dash en 2018. Où en est la livraison ? Nos forêts brûlaient encore récemment dans le Médoc et la situation ne peut que s'aggraver du fait du réchauffement climatique.

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Saisissant l'occasion du plan France relance, mais aussi du constat unanimement partagé du besoin d'investissement pour notre gendarmerie, la loi de finances a prévu des crédits exceptionnels, notamment pour l'immobilier et la sécurisation du parc domanial de la gendarmerie nationale.

C'est le cas, également, pour le renouvellementdu parc automobile. Les livraisons régulières de nouveaux véhicules dans nos compagnies de gendarmerie comme dans les unités territoriales sont bienvenues et témoignent de l'efficacité de l'action publique.

Pour autant, le contexte sécuritaire appelle une même attention et un effort accru pour le troisième pilier : l'équipement de sécurité et de protection individuelle des personnels. En effet, les gendarmes des unités territoriales sont de plus en plus sollicités, notamment dans des situations particulièrement tendues où le rapport de force leur est souvent défavorable. Or les dotations collectives affectées aux compagnies et brigades ne permettent pas de doter tous les gendarmes engagés sur le terrain d'un équipement personnel de protection et de défense suffisant, leur assurant de remplir leur mission en sécurité dans l'attente d'éventuels renforts de la départementale ou de la mobile en cas de troubles à l'ordre public. Je pense aux violences urbaines ou aux free parties. Il s'agirait donc d'attribuer, en plus du gilet pare-balle, à chaque élève promu gendarme et à chaque gendarme départemental ou mobile, un équipement durable comprenant casque et protection des membres.

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Marlène Schiappa, ministre déléguée

Concernant la coopération transfrontalière en matière de police, le Gouvernement s'appuie sur les dix centres de coopération policière et douanière (CCPD) placés sous la responsabilité de la France et sur les cinquante-neuf déployés dans l'ensemble du territoire européen. La direction centrale de la police aux frontières, chargée de la coordination de ces centres, alloue un budget de 430 000 euros par an pour couvrir leur fonctionnement et permettre l'implantation du système d'information environnementale à l'échelle nationale, dit SIENA, outil indispensable pour fluidifier et sécuriser la circulation des informations. Ainsi, chaque CCPD se verra attribuer des objectifs spécifiques en fonction des circonstances locales. En Belgique et en Italie, les problématiques sont essentiellement liées à la lutte contre l'immigration irrégulière tandis qu'en Suisse et au Luxembourg, elles concernent plus particulièrement la criminalité financière.

Pour ce qui est de la formation, rappelons l'engagement du ministre de l'intérieur d'en allonger la durée de huit à douze mois. C'est l'un des enjeux du Beauvau de la sécurité. Nous prenons ce sujet très à cœur, qu'il s'agisse de la formation initiale et globale ou de formations plus spécifiques des forces de l'ordre, en particulier pour mieux accueillir les femmes victimes de violences conjugales. Nous avons dépassé l'objectif des 88 000 policiers et gendarmes formés.

Le paiement des heures supplémentaires est l'une de nos priorités. Les campagnes d'indemnisation sont efficaces puisqu'en deux ans, nous avons indemnisé 5,6 millions d'heures et nous avons poursuivi cette dynamique en 2021. Nous réduisons le stock de manière pragmatique, en fonction des contraintes opérationnelles et des souhaits individuels de chacun.

S'agissant de la coopération entre la police et la justice, une table ronde du Beauvau de la sécurité, consacrée à ce sujet, se tiendra jeudi matin. D'ores et déjà, le Gouvernement a identifié des pistes pour répondre aux attentes de la population comme des policiers, notamment l'installation de l'Observatoire de la réponse pénale dès le 1er juillet 2021. Les agressions commises à l'encontre des forces de l'ordre doivent être traitées plus rapidement et plus fermement, comme l'a rappelé le Premier ministre. Les réductions de peine doivent être limitées plus strictement et il convient de porter à trente ans la peine de sûreté pour les personnes condamnées à la perpétuité. Un amendement en ce sens a été adopté le 20 mai dernier au projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire.

Quant à la sous-exécution des crédits alloués à la rémunération des policiers et des gendarmes, elle s'explique par la crise sanitaire qui a conduit à décaler à la fin de l'année les recrutements, à réduire les dépenses liées à l'opérationnel, et à reporter les mesures catégorielles.