Le programme 161 regroupe l'ensemble des moyens du ministère de l'intérieur consacrés à la protection des populations et à la gestion de crise. En 2020, ce programme a été exécuté à hauteur de 474,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 555,4 millions d'euros en crédits de paiement. Par rapport à 2019, ces montants progressent de 21,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 7 millions d'euros en crédits de paiement.
À l'échelle du programme, les écarts entre l'exécution 2020 et la prévision établie en loi de finances initiale reflètent les conséquences de la crise sanitaire. La consommation des autorisations d'engagement est inférieure à ce que prévoyait la loi de finances, puisque 96,1 % des crédits ont été utilisés ; cette sous-exécution est principalement due à des retards et à des reports de marchés. Les crédits de paiement connaissent une évolution inverse : ils progressent de 6,7 % par rapport à la loi de finances initiale. C'est la conséquence de la hausse des dépenses d'intervention et des subventions exceptionnelles attribuées aux associations et organismes concourant à la mission de sécurité civile pour compenser la perte de leurs recettes habituelles, toujours en raison de la crise sanitaire – j'y reviendrai dans quelques instants.
Je rappelle la forte mobilisation des personnels de la sécurité civile depuis le début de la crise sanitaire. Je souhaite saluer ici leur action, car celle-ci n'a pas toujours été visible du grand public. La sécurité civile a participé à l'évacuation des malades du covid-19, ainsi qu'à la réalisation de tests antigéniques dans les ports et aéroports français. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises reste aujourd'hui pleinement investie dans la lutte contre l'épidémie, étant chargée du financement des vaccinodromes gérés par les sapeurs-pompiers.
Nous nous rappelons aussi des inondations majeures connues par le département des Alpes-Maritimes suite à la tempête Alex, au début du mois d'octobre 2020. Les forces nationales de la sécurité civile y ont été déployées, aux côtés des colonnes de renfort des sapeurs-pompiers des départements voisins. Au total, 1 780 interventions ont été réalisées et 800 personnes ont pu être mises à l'abri.
Au programme 161 est également inscrite la subvention de l'État à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Je m'y attarde un instant car l'exécution 2020 est supérieure au montant prévu, en raison d'un budget supplémentaire adopté en juillet afin de prendre en compte les conséquences de la crise sanitaire. La dotation s'est élevée à 91,6 millions d'euros, contre 86,8 millions prévus. Pouvez-vous m'indiquer, madame la ministre déléguée, quelles conclusions seront tirées pour la préparation du PLF pour 2022, sachant que la brigade des sapeurs-pompiers de Paris a engagé un plan de modernisation sur dix ans, ô combien nécessaire au regard du vieillissement de ses infrastructures ?
Comme je viens de l'indiquer, l'exécution budgétaire 2020 a été fortement marquée par la crise sanitaire, avec des dépenses par nature non prévisibles. Des crédits supplémentaires ont été ouverts par les troisième et quatrième lois de finances rectificatives : ils ont permis de financer des subventions versées aux associations agréées de sécurité civile, qui ont perdu en 2020 une partie de leurs recettes habituelles du fait de l'annulation des grands événements culturels et sportifs, ainsi que l'achat de deux hélicoptères commandés dans le cadre du plan de soutien à l'industrie aéronautique, pour un montant 32 millions d'euros.
J'en viens à la question de la flotte aérienne de la sécurité civile. C'est le thème d'évaluation que j'ai choisi cette année, pour deux raisons. D'une part, le financement des moyens aériens représente la majeure partie des crédits du programme, et il est bien sûr important d'en vérifier l'usage. D'autre part, j'ai constaté depuis plusieurs années que la flotte est désormais de taille inférieure à sa taille habituelle ; or moins d'appareils, c'est aussi moins de moyens pour intervenir dans le cadre de crises, de feux de forêt, ou pour évacuer des personnes.
Pour la préparation de ce rapport, j'ai évidemment auditionné le responsable du programme, M. le préfet Thirion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises. Je le remercie de m'avoir invité à rencontrer les personnels du groupement aérien de la base de Nîmes et à échanger avec eux sur les questions du renouvellement de la flotte et de sa maintenance – j'y étais il y a tout juste une semaine.
J'ai constaté que les hélicoptères et les avions de la sécurité civile subissaient un vieillissement accéléré, du fait de leur forte utilisation. Aujourd'hui, la plupart de ces appareils sont âgés. Ainsi, l'année dernière, la sécurité civile a été contrainte de mettre un terme à l'utilisation de sa flotte d'avions Tracker, qui avaient en moyenne 63 ans. Les Canadair ont en moyenne 25 ans, les hélicoptères 16 ans.
Il est urgent d'investir, pour des raisons tenant à la sécurité des pilotes et des équipages, aux coûts de maintenance et aux conséquences de l'âge sur la disponibilité des appareils. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises estime que, pour pouvoir réaliser pleinement son contrat opérationnel, il lui faudrait disposer de trente-huit hélicoptères. Or, après plusieurs accidents, la flotte est désormais réduite à trente-quatre appareils. Dans ces conditions, la gestion de la flotte ne laisse plus apparaître de marges de manœuvre en cas d'incident technique : la seule solution est alors de fermer des bases. Ainsi, en 2020, la base de Quimper a été fermée durant tout le mois de février, et la sécurité civile n'a pas été en mesure d'armer deux détachements à Mende et Melun pendant toute la période estivale. Au Touquet, dans les Hauts-de-France, il n'y a plus d'hélicoptère depuis déjà plusieurs années.
L'achat de deux hélicoptères, grâce au plan de soutien à l'industrie aéronautique, est un excellent début. Il faut continuer dans cette direction. Toujours dans le cadre du plan de relance, la direction générale de la sécurité civile a posé une option sur deux hélicoptères supplémentaires. Je ne peux que soutenir cette opération, d'autant que le constructeur a très nettement baissé le prix d'achat, la chaîne de montage et de préparation étant déjà prête. Pouvez-vous m'indiquer, madame la ministre déléguée, si ces commandes pourront être rapidement confirmées ?
Acheter de nouveaux aéronefs, c'est modifier le visage de la flotte pour dix, quinze ou vingt ans. Il est donc nécessaire de réfléchir, d'un point de vue stratégique, aux missions qui seront, demain, celles de la sécurité civile.
Il est aussi urgent de réfléchir au remplacement des trente-quatre hélicoptères actuels. Nous devons prendre une décision dès maintenant et élaborer un plan d'acquisition étalé sur dix ou quinze ans.
Permettez-moi également d'insister sur la situation des Canadair. Si nous perdons l'un de ces avions, nous ne pourrons pas le remplacer, faute de chaîne de fabrication existante. Or la société canadienne Viking Air a besoin de vingt commandes pour remonter une chaîne. La France ne pouvant émettre à elle seule ces vingt commandes, nous devons y travailler au niveau européen. Je rappelle que le Canadair ne souffre aujourd'hui d'aucune concurrence.
J'ai constaté avec intérêt que la sécurité civile réfléchissait à une diversification de ses moyens aériens contre les feux de forêt. Un premier pas a été fait en 2020, après l'arrêt précipité des avions Tracker que je viens d'évoquer et la location en urgence d'un hélicoptère bombardier d'eau, un Puma de type EC225 qui s'est révélé très complémentaire des Canadair. C'est, à mon sens, une pratique à renouveler.
Pour rédiger ce rapport, j'ai aussi auditionné les administrations qui possèdent des flottes aériennes du même type afin de faire le point sur les mutualisations existantes et de réfléchir à ce qui pourrait être approfondi. Certaines flottes telles que celles de la gendarmerie nationale ou des HéliSmur des centres hospitaliers présentent en effet des caractéristiques communes, permettant d'envisager certaines mutualisations.
Du reste, certains aspects sont déjà mutualisés. Je pense notamment à la mutualisation de différents marchés orchestrée par la direction de la maintenance aéronautique du ministère des armées. Par ailleurs, à Nîmes, la sécurité civile et la gendarmerie nationale procèdent à la maintenance de leurs moyens aériens sur la même base, ce qui permet de réaliser des économies d'échelles et d'améliorer le taux de disponibilité des appareils. Je signale au passage que, sur la base de Nîmes, la sécurité civile sous-traite l'entretien et la maintenance de ses avions mais assure la maintenance de ses hélicoptères en régie. Ce système de maintenance en régie est assez rare, dans l'administration au sens large, pour être souligné ; il a des effets très positifs sur la disponibilité des appareils, condition essentielle de l'intervention de la sécurité civile, et il convient de le préserver.
Les administrations travaillent de concert à une amplification de ces mutualisations, lorsque c'est possible. Ainsi, les avions Dash-8 de la sécurité civile, qui permettent de transporter une quarantaine de passagers ou des malades reposant sur six civières, peuvent, moyennant quelques aménagements, être utilisés par les autres services du ministère de l'intérieur. Nous devons encourager ces efforts.