Je serai bref car beaucoup de ces questions ont déjà été débattues, soit lors de l'audition des ministres sur ce projet de loi, soit pendant l'examen du décret d'avance, qui a permis de donner des explications sur le report des crédits de l'année 2020.
S'agissant des dépenses de fonctionnement, il faut entrer dans le détail : financer des recrutements et du matériel pour les policiers et les gendarmes, ou pour une justice de proximité plus efficace, cela relève de la dépense de fonctionnement. On ne peut pas considérer que nos enseignants ne sont pas assez rémunérés et leur consacrer un effort budgétaire de 400 millions d'euros, inédit et nécessaire, pour ensuite laisser dénoncer un dérapage des dépenses de fonctionnement : il faut être cohérent. Les dépenses de fonctionnement n'augmentent que pour les politiques publiques que nous estimons prioritaires, à savoir la sécurité, l'éducation, la justice, la transition écologique, etc. Nous aurons l'occasion de tenir à nouveau ce discours de cohérence lors de l'examen des prochains projets de loi de finances.
Concernant la sous-exécution de la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire, je rappelle que c'est le Parlement qui a voté l'autorisation du report des crédits non consommés. L'ouverture de crédits initiale était très large et, pour éviter une sous-exécution en 2020, nous avons adopté un amendement du Gouvernement à l'article 102 du projet de loi de finances pour 2021 autorisant le report de ces crédits sur l'exercice suivant. Cela a ensuite permis au Gouvernement de présenter un projet de décret d'avance dûment. Tout cela a naturellement été fait sous le contrôle du Parlement.
La dette publique de notre pays a considérablement augmenté, à la fois en pourcentage de PIB et en valeur – elle avait déjà très fortement augmenté, de quarante points, lors de la crise précédente, en 2008. C'est une des conséquences de la gestion de la crise. Le financement massif pour sauver notre économie et les salariés, et pour aider les plus fragiles d'entre nous, coûte beaucoup d'argent et impose de recourir à l'endettement public. Il est nécessaire de définir les trajectoires de stabilisation puis de réduction de la dette, mais celle-ci est indispensable pour faire face à la situation. Je partage en outre l'idée qu'il ne faut surtout pas augmenter les impôts en réponse à la crise.
Par ailleurs, l'actif net de l'État est négatif par construction : un État n'est pas une entreprise ! L'État ne peut pas inscrire à l'actif certaines immobilisations en regard de ses dépenses, comme le ferait une entreprise, car il a des services publics à gérer et des fonctionnaires à payer. La situation n'est pas tout à fait comparable. C'est d'ailleurs pour cela qu'on nous prête alors que la situation financière nette de l'État est négative.
Financer des entreprises, c'est d'abord sauver des emplois, monsieur Dufrègne, et je suis sûr qu'au fond, vous êtes d'accord avec cela. Nous devons faire attention à ne pas répandre l'idée qu'au nom du « quoi qu'il en coûte », tous les crédits votés en 2020 auraient été alloués à « l'entreprise », comme si celle-ci était un objet flottant, sans vie à l'intérieur. L'activité partielle ne consiste pas à sauver des entreprises, mais avant tout à permettre à notre économie de maintenir les niveaux de salaire alors que les activités économiques sont à l'arrêt. On évoque souvent la « politique de l'offre » ou la « politique de l'entreprise » : s'il est important de maintenir en vie notre économie, ce sont d'abord les emplois qui ont été sauvés pendant la crise grâce au maintien de la trésorerie des structures qui les accueillent, c'est-à-dire, pour beaucoup d'entre elles, des entreprises. Je veux vraiment que l'on prenne garde à ce discours : l'on n'oppose pas le sauvetage des entreprises à la vie des gens ; sauver les entreprises, c'est d'abord préserver les emplois, donc éviter aux ménages de sombrer dans la précarité.
Enfin, en 2020, nous avons accordé à deux reprises des aides exceptionnelles aux publics les plus fragiles, notamment par le versement d'une aide de 150 euros plus 100 euros par enfant. La collectivité a consacré beaucoup d'argent au soutien des plus précaires, au maintien de notre économie, de la trésorerie des entreprises et donc des emplois en 2020 : nous pouvons nous en satisfaire collectivement. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans les prochaines semaines, lors de l'examen du prochain PLFR, et de poursuivre en 2021 le soutien à notre pays.