La complexité de ce texte financier est liée à la diversité des situations économiques et à notre volonté de faire du sur-mesure, c'est-à-dire de trouver des réponses adaptées à la situation économique à laquelle chaque entreprise est confrontée.
Ce texte établit une dégressivité des aides et une sortie progressive de la politique du « quoi qu'il en coûte ». L'intégralité des aides d'urgence représente environ 15 milliards. En période de crise, c'est ce que nous consommions sur une période d'un peu plus d'un mois, tandis que ces 15 milliards devraient couvrir les dépenses de juin, juillet et août, c'est-à-dire le prochain trimestre.
Je veux vous rassurer, monsieur le président : il n'y a aucune « ambiance dépensière » au Gouvernement. Notre volonté est d'apporter des réponses concrètes aux seules entreprises qui en ont besoin. Les deux maîtres-mots de cette période de transition sont la protection, pour les entreprises qui en ont encore besoin, et l'investissement, afin de nous permettre de redémarrer le plus rapidement possible, avec le décaissement rapide du plan de relance. Le fonds de solidarité est une bonne illustration de cette dégressivité des aides, puisque nous prenons comme référence la perte de chiffre d'affaires des entreprises, mais que l'indemnisation sur cette perte de chiffre d'affaires par rapport à 2019 est dégressive de 40 %, 30 % ou 20 %, de manière à marquer cette sortie progressive. Cela étant, il n'est pas illégitime d'aider un restaurant à reprendre son activité dans les meilleures conditions, sachant qu'il ne peut ouvrir que sa terrasse pour l'instant et qu'à partir du 9 juin, il ne pourra servir que la moitié de ses couverts, tout en supportant des charges supplémentaires, puisqu'il doit s'approvisionner et recruter des salariés. Le pragmatisme impose parfois de créer des dispositifs complexes, mais il permet de répondre aux besoins des entreprises.
Si le niveau d'endettement s'améliore par rapport au programme de stabilité (PSTAB) alors que le déficit se dégrade, c'est principalement en raison d'une revalorisation du dénominateur : en effet, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a revu le premier trimestre de croissance 2021 à la hausse. Dans le même document, il a révisé de manière très significative les chiffres de la croissance en 2018, où la croissance s'est élevée à 1,9 %, et en 2019, où elle s'est élevée à 1,8 %, soit 0,3 point de plus que ce qui avait été retenu par le Gouvernement. L'augmentation de ce dénominateur entraîne l'amélioration du niveau d'endettement par rapport au niveau indiqué dans le PSTAB, alors que le déficit se dégrade. Cet écart s'explique donc par de bonnes performances de l'économie française en 2018 et 2019, qui résultent de la politique économique du Gouvernement.
Vous connaissez mes convictions en ce qui concerne la maîtrise de la dépense. Un État qui fonctionne bien est un État qui maîtrise ses dépenses. Nous avons la responsabilité de constituer des réserves pour faire face à tout aléa futur, économique ou sanitaire. Or cette maîtrise de la dépense publique demande des règles nouvelles, que plusieurs rapports ont tâché d'élaborer. Il convient d'assurer une meilleure évaluation de l'efficacité de la dépense, une évaluation à laquelle les parlementaires doivent prendre toute leur part, et de suivre une règle pluriannuelle des dépenses publiques, dont la durée pourrait être celle du quinquennat, et qui, à mon sens, devrait avoir valeur constitutionnelle. Mon expérience de ministre des finances me fait penser que si nous voulons réellement maîtriser la dépense publique en France et donner de la visibilité à nos compatriotes sur les investissements et les économies que nous voulons faire, il est préférable d'avoir une règle constitutionnelle de dépense sur cinq ans qui nous permette de garantir à nos compatriotes que nos dépenses seront conformes à nos engagements.
Monsieur le rapporteur général, d'un point de vue comptable, la charge de la dette est effectivement rehaussée de 1,9 milliard par rapport à la loi de finances initiale. Cela s'explique pour une part importante par l'inflation dans la zone euro, puisqu'une partie des titres émis par la France sont indexés sur l'inflation dans la zone euro.
En ce qui concerne le fonds de transition de 3 milliards pour les grandes entreprises et les ETI, 2,4 milliards viennent du redéploiement des crédits du FDES, et 600 millions sont financés par des mesures nouvelles. L'objectif est de mettre des moyens à disposition des plus grandes entreprises qui, dans des secteurs comme le tourisme ou l'aéronautique, sont parfaitement viables mais ont été fragilisées par la crise, de sorte qu'elles ont besoin de quasi-fonds propres pour se redresser. Nous les leur apportons, afin d'éviter que ces entreprises parfaitement viables, mais dont la trésorerie est dans une situation intenable, ne se retrouvent dans une situation très difficile. Il est légitime que ces financements transitoires leur soient apportés par l'État. Les entreprises choisiront entre une durée de maturité sans limite, mais avec des taux d'intérêt plus élevés, ou une durée de maturité plus brève avec des taux d'intérêt plus faibles. Précisons qu'il ne s'agit pas pour l'État de devenir actionnaire de ces entreprises ni de rentrer dans leur gouvernance : l'État n'a pas vocation à devenir l'actionnaire universel de notre économie. Il s'agit simplement d'apporter un soutien financier transitoire bien calibré et bien adapté.