Intervention de Olivia Gregoire

Réunion du jeudi 3 juin 2021 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable :

Je serai aussi brève que le sentiment est sincère. Il me tenait particulièrement à cœur de prendre quelques secondes du temps qui m'est imparti pour vous dire l'honneur, mais aussi le plaisir qui est le mien de vous retrouver à nouveau en commission cet après-midi. Je garde en mémoire tous les souvenirs du temps passé ensemble, durant plus de trois ans, temps si formateur pour la fonction qui est la mienne aujourd'hui. Cela m'est d'autant plus agréable que nous discuterons de sujets que j'avais eu l'honneur de suivre en tant que rapporteure spéciale.

L'efficacité de la dépense publique est au cœur des préoccupations du ministère de l'économie, des finances et de la relance. Nous portons un très grand intérêt à ce Printemps de l'évaluation, qui constitue un moment privilégié. C'est pourquoi plusieurs ministres de Bercy ont souhaité intervenir devant vous pour rendre compte au Parlement des politiques que nous conduisons.

Je vais vous présenter un rapide bilan de l'exécution 2020 des crédits des missions Économie et Investissements d'avenir, avant de répondre aux questions et points d'attention soulevés par les rapporteurs spéciaux et les porte-parole des groupes.

L'exécution budgétaire de la mission Économie a été fortement marquée par la crise sanitaire. Les dépenses traditionnelles ont été ralenties, tandis que plusieurs programmes ont été mobilisés pour soutenir l'économie française face à la crise.

Les programmes 220 Statistiques et études économiques et 305 Stratégie économique et fiscale ont connu un taux de consommation de leurs crédits plus faible que d'ordinaire, respectivement de 92,7 % et 96,2 % en CP. Cela s'explique par le confinement et ses effets, comme la réduction des frais de déplacement. Les administrations ont réalisé un effort inédit d'adaptation, que je salue avec force. Par exemple, elles se sont dotées d'équipements de mobilité permettant aux équipes d'assurer la continuité de leurs services en télétravail.

Le programme 134 Développement des entreprises et régulations a été le support de la mise en place des mesures d'urgence en faveur du monde économique et du financement de certaines mesures de prévention. Les 1,36 milliard d'euros d'AE et les 773 millions d'euros de CP ouverts en lois de finances rectificatives ont permis de financer les mesures rappelées par M. Roseren, comme l'achat de masques lavables à usage non sanitaire, les aides à l'investissement productif pour la production de masques à usage sanitaire, les aides à la filière équestre, aux zoos et aux cirques, ou le renforcement des fonds garantis de Bpifrance. Ce programme a aussi vu les premiers pas du plan de relance, avant qu'une mission ne lui soit entièrement dédiée.

Le plan France Très haut débit a lui aussi été renforcé : une loi de finances rectificative a abondé le programme 343 de 30 millions d'euros, auxquels s'ajoutent les 240 millions d'euros ouverts en loi de finances initiale pour 2021 dans le cadre du programme 364. En outre, ces programmes ont bénéficié d'importants reports, accordés en loi de finances pour 2021 pour poursuivre les politiques qui auraient été ralenties dans le contexte de l'année 2020.

À l'invitation de Mme Faure-Muntian et de M. Roseren, je m'arrête un instant sur le financement de l'activité d'apport de garanties de Bpifrance. Cette activité a fait l'objet d'une dotation budgétaire importante, alors que depuis deux ans le ministère de l'économie avait invité Bpifrance à assurer elle-même le financement des garanties. L'ancienne députée que je suis ne peut que se féliciter d'avoir défendu le maintien d'un cordon ombilical en préservant la ligne budgétaire concernée, dotée, à l'époque, d'une somme symbolique de 10 000 euros. Cette ligne a ainsi pu être facilement abondée.

Bpifrance connaît une activité importante depuis mars 2020, notamment à cause de sa nature de garant. D'abord, une offre de crise, de prêt de trésorerie et de soutien aux besoins en fonds de roulement a été lancée par Bpifrance et a nécessité des ressources publiques pour doter les fonds de garantie dans des proportions importantes. Des moyens internes ont été mobilisés, à hauteur de plus de 400 millions d'euros, en sus d'une dotation de 100 millions d'euros votée en loi de finances rectificative. Ensuite, dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2021, la mission Plan de relance a été mobilisée afin d'abonder les fonds de manière très volontariste, à savoir 409 millions d'euros en AE pour les années 2021 et 2022 et 305 millions d'euros en CP pour 2021. Ces enveloppes sont sans commune mesure avec les dotations budgétaires des années précédentes, qui étaient de 20 millions d'euros en moyenne entre 2015 et 2019. L'État continuera de jouer son rôle, comme il l'a déjà fait, et autant que le besoin s'en fera sentir.

M. Brun m'a interrogée sur la capacité des offres de Bpifrance et de sa filiale Bpifrance Assurance Export à répondre aux besoins des entreprises. Je rappelle que le soutien public à l'export obéit à trois grands principes : le soutien des projets en fonction de leur intérêt industriel et du potentiel d'emploi en France ; une intervention de l'État en subsidiarité du marché privé, uniquement lorsque celui-ci est défaillant ; en période de crise économique, un rôle contracyclique afin de stimuler une activité économique susceptible de se tarir.

Aujourd'hui, le dispositif français s'articule autour de trois stratégies, conduites par des opérateurs différents. L'accompagnement est assuré par la Team France Export, construite autour de Business France. Le financement prend essentiellement la forme de garanties publiques, via Bpifrance Assurance Export, sans oublier les outils de financement d'État à État gérés par la direction générale du Trésor. Enfin, le refinancement et le rehaussement de crédits export via la SFIL, la banque publique de développement au service des territoires et des exportations, sont désormais opérés par la Caisse des dépôts et consignations. L'État a donc mis en place un dispositif plutôt complet, qui couvre les besoins des entreprises dans toutes leurs dimensions.

J'en viens aux questions posées par M. Chassaing. Le retour de l'économie sociale et solidaire à Bercy s'est accompagné d'un changement de nom : il n'est désormais plus seulement question d'économie sociale et solidaire, telle qu'elle a été définie par la loi de 2014, mais aussi d'économie responsable, telle que la France est en train de la définir avec l'ensemble de ses partenaires européens. Profondément interministériel, le secrétariat d'État à l'économie sociale, solidaire et responsable place son action au cœur même de Bercy, ce qui n'est pas anodin. Ce ministère, à la croisée des politiques publiques, doit pouvoir compter sur des relais à travers tous les territoires, mais aussi au sein de toutes les administrations.

Les structures de l'économie sociale et solidaire sont des entreprises à part entière. À ce titre, le ministère de l'économie, des finances et de la relance a vocation à les accompagner pleinement, en particulier pour les aider à accéder à des dispositifs dont elles sont souvent moins coutumières que les entreprises classiques. L'économie sociale et solidaire est une économie à part entière, mais elle est aussi une économie à part, qui doit par nature bénéficier d'un soutien particulier – ce que j'ai fait, avec votre aide, dans le cadre du quatrième PLFR pour 2020, par le truchement du fonds d'urgence ESS doté de 30 millions euros.

Il faut aussi donner à cette économie des moyens afin qu'elle puisse prendre toute son envergure, dans le respect de ses objectifs sociaux et environnementaux. Le Gouvernement souhaite vraiment faire grandir les structures qui s'inscrivent en complémentarité des politiques publiques sociales et environnementales. Tel est l'objectif des contrats à impact, que j'ai relancés depuis mon arrivée à Bercy et qui permettent non seulement de renouveler l'approche de certaines politiques publiques, mais aussi de multiplier les collaborations nouvelles entre le public, le privé et la société civile. En un mot, l'État rembourse à l'aune du résultat, c'est-à-dire de la performance sociale ou environnementale, tous les investisseurs qui financent des projets écologiquement ou socialement utiles. Contrairement à ce qu'avaient prédit de nombreux esprits chagrins, les trois appels à manifestation d'intérêt (AMI) que nous avons lancés en matière d'économie circulaire, d'égalité des chances économiques et d'inclusion dans l'emploi – ce contrat à impact se termine aujourd'hui – ont rencontré un franc succès. Une enveloppe de 50 millions d'euros est mobilisée pour ces projets d'intérêt général, sélectionnés pour leur grande qualité et surtout pour les coûts qu'ils évitent à la puissance publique. Au total, le budget que l'État consacre à l'ESS triple entre 2020 et 2021.

Mme Dalloz a évoqué le PIA par le prisme des investissements réalisés en matière de résilience et de souveraineté sanitaires, ainsi que des innovations en matière de santé. Dès mars 2020, le PIA a été mobilisé pour répondre à la crise sanitaire, via la création de dispositifs spécifiques de soutien aux filières pertinentes, dans le respect de la doctrine d'intervention du PIA. Cette mobilisation a notamment pris la forme d'un AMI pour développer les capacités de production d'équipements et de produits de santé nécessaires à la lutte contre la pandémie et ses conséquences. Au total, à la date du 31 mai 2021, le PIA a été sollicité à hauteur de 528,3 millions d'euros.

À la lumière des constats réalisés lors de la crise du covid-19, le PIA 4 a toutefois été l'occasion d'une refonte. Il intervient désormais dans un cadre stratégique composé de deux volets. Le premier permet à l'État de concentrer son action autour d'un nombre limité d'investissements prioritaires, lesquels s'inscrivent dans une stratégie d'accélération : l'État fixe ainsi le cap dans les domaines où son intervention massive est indispensable. Le second volet permet, dans la tradition première du PIA, de financer les projets transformants qui émanent directement des écosystèmes d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation. Le PIA soutient les acteurs dans toute la chaîne de l'innovation, de la recherche à l'entreprise.

S'agissant spécifiquement de la recherche en santé, je partage tout à fait le constat de fragmentation – je reste modérée – dressé par Mme Dalloz. En revanche, c'est dans le cadre de la loi de programmation de la recherche que la simplification souhaitée pourra être menée. Des efforts sont également permis par le PIA 4.

J'ajoute quelques éléments pour répondre aux interrogations, aux préconisations et aux recommandations pertinentes de la rapporteure spéciale.

Sur la période 2021-2025, un renforcement des financements à destination des Labex les plus performants est rendu possible par le maintien des dotations non consommables et les nouveaux moyens budgétaires prévus dans le volet structurel du PIA 4. Ce dernier renforce aussi nettement les financements consacrés à l'aval : sur les 12,5 milliards d'euros du volet dirigé du PIA 4, un peu plus de 5,5 milliards y seront consacrés. De même, le passage à l'échelle est davantage pris en compte et mieux accompagné, dans le cadre de la stratégie d'accélération prévue dans le PIA 4.

La création d'une agence d'innovation en santé fait enfin l'objet de discussions, dans le cadre d'une mission de préfiguration. Il est difficile, à ce stade, de dessiner les contours de cette future agence, mais la réflexion que vous appelez de vos vœux est déjà en cours. Du reste, votre préconisation est tout à fait légitime : la création d'une agence d'innovation en santé permettrait de rationaliser, au service de l'efficacité de leurs recherches, les multiples acteurs de cet écosystème. La réflexion est alimentée par notre constat des défauts et limites du système actuel, tels que le manque de lisibilité que vous avez déploré.

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