Intervention de Aude Bono-Vandorme

Réunion du mercredi 16 juin 2021 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAude Bono-Vandorme, rapporteure pour avis :

L'article 41 vise à moderniser le régime national du financement participatif. C'est le seul article ayant fait l'objet de modifications substantielles par le Sénat, et il sera examiné en séance.

Dans le projet de loi déposé au Sénat, l'article 41 tendait à habiliter le Gouvernement à prendre diverses catégories de mesures par voie d'ordonnance.

Il s'agit tout d'abord de mettre en conformité le droit français avec le nouveau règlement européen du 7 octobre 2020, qui définit un cadre européen pour le financement participatif. Le règlement européen renforce notamment les exigences en matière de protection des porteurs de projet et des investisseurs ainsi que le pouvoir de contrôle des autorités nationales.

Il est ensuite prévu de moderniser et d'adapter les dispositions nationales qui ne sont pas couvertes par le règlement européen. Cette adaptation est nécessaire parce que le cadre européen ne couvre pas tout le champ du financement participatif et oblige à repenser l'économie générale du code monétaire et financier. Par exemple, les prêts avec intérêt, les prêts sans intérêt et les dons sont aujourd'hui proposés par les intermédiaires en financement participatif qui relèvent d'un agrément et de règles spécifiques. Les prêts sans intérêt et les dons ne sont pas couverts par le règlement européen mais les prêts avec intérêt le sont. Il faut donc redéfinir le régime d'intermédiaire en financement participatif pour distinguer ces différents cas.

Mais avec la formulation proposée, le Gouvernement pourrait aller plus loin. Il souhaite d'ailleurs modifier certaines dispositions qui pourraient continuer à exister telles quelles, indépendamment du nouveau cadre européen.

Pour ces raisons, le Sénat a souhaité, par un premier amendement, restreindre le champ d'habilitation de l'ordonnance pour les dispositions qui ne relèveraient pas du règlement européen. Le champ d'habilitation serait réduit à trois points : la supervision des activités de financement participatif, les conditions et modalités selon lesquelles les sociétés civiles agricoles peuvent bénéficier d'un financement participatif et les modalités de soumission des cagnottes en ligne aux mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

Si ces points précis sont légitimes, le Sénat a sans doute restreint trop fortement le domaine d'habilitation. Le Gouvernement proposera en séance une rédaction offrant un compromis entre l'habilitation initiale, trop large, et l'habilitation proposée par le Sénat, trop restrictive.

Un deuxième amendement du Sénat a créé la section I A de l'article 41. Aujourd'hui, le code général des collectivités territoriales autorise les collectivités à utiliser les plateformes de financement participatif pour trois services publics définis : le service public culturel, le service public éducatif et le service public social et solidaire. Pour les autres, la collectivité doit passer par une régie de recettes, une association ou une fondation, ce qui est source de complexité. Par ailleurs, les projets participatifs des collectivités ne sont actuellement financés que par des dons et des prêts.

La modification apportée par le Sénat élargit à tous les services publics la possibilité de mettre en œuvre un projet de financement participatif sans passer par une régie de recettes, et ouvre le financement participatif aux obligations.

Je ne suis pas certaine de l'intérêt d'investir dans des projets de financement participatif des collectivités au moyen d'obligations, qui constituent des titres de créance. Les obligations sont des produits complexes, nous avons tous en mémoire l'épisode des emprunts toxiques. Ce sont des titres qui pourraient intéresser un large panel d'investisseurs. L'esprit du financement participatif, pour une collectivité, est de mobiliser ses administrés pour un projet précis qui les concerne et qui a du sens. Prêts et dons suffisent dans ces cas.

Des interrogations existent sur l'élargissement du financement participatif à tous les services publics. Le Gouvernement n'est pas totalement convaincu de sa pertinence et envisage plutôt de le restreindre à quelques secteurs. Une réflexion doit être menée d'ici à l'examen en séance. Je souhaite rencontrer à nouveau les services du Trésor et de la direction générale des finances publiques pour approfondir le sujet. Ma porte est d'ailleurs ouverte à tous ceux qui souhaiteraient apporter leur expertise d'élu local.

Je propose donc, par mon amendement, de modifier le texte en retirant la possibilité offerte aux collectivités territoriales de recourir à des obligations pour leurs projets de financement participatif. Nous pourrons trancher en séance publique la question du champ des services publics dont les projets peuvent passer par une plateforme de financement participatif sans recourir à une régie de recettes.

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