Monsieur Le Fur, vous partez du principe que tous les jeunes vont être imposés à un taux neutre et, pour reprendre votre expression, qu'ils vont « y perdre », parce qu'ils paieront immédiatement leurs impôts. Je suis tenté de vous renvoyer à l'exemple de la caissière de supermarché qui a été évoqué au cours des débats de la nuit dernière : on peut penser que beaucoup de jeunes ne paieront pas d'impôts en commençant à travailler. Mais ne relançons pas ce débat !
Il y a trois cas de figure. Soit le jeune travailleur ne paie pas d'impôt. Soit il se voit appliquer un taux neutre et peut, comme vous l'évoquez, se trouver dans une situation qui n'est pas des plus favorable, sans pour autant rencontrer de réelles difficultés. Soit – et c'est sans doute ce que les intéressés choisiront très majoritairement de faire – , le jeune contribuable se rendra sur le site internet de l'administration fiscale. La démonstration vous a été apportée en commission des finances mais M. le directeur général des finances publiques est tout à fait prêt à passer un après-midi avec vous pour vous apporter toute précision complémentaire concernant ce site, qui est très évolutif. De cette manière, le jeune salarié pourra calculer ses revenus et son taux d'imposition, pour se voir appliquer le taux réel et non le taux neutre.
Surtout, je vous dirai que, selon moi, cette réforme aura des conséquences inverses de celles que vous évoquez. Que se passe-t-il quand on entre dans la vie active ? Je l'ai expérimenté comme bon nombre de mes camarades, lorsque vous commencez à travailler, vous ne savez pas toujours le montant de l'impôt que vous aurez à payer l'année suivante : autant votre revenu de l'année est une source de satisfaction, autant votre taxe d'habitation et votre impôt sur le revenu – dont les montants peuvent être très élevés – sont susceptibles de constituer une très mauvaise surprise. Je suis certain, monsieur Le Fur, que comme député de terrain, vous avez rencontré dans vos permanences beaucoup de jeunes qui ont découvert, un an après avoir commencé à travailler, qu'ils devaient acquitter quelques milliers d'euros d'impôts, alors même qu'ils avaient commencé à assumer des charges de famille en ne vivant plus chez leurs parents ou en se mettant en ménage, qu'ils avaient passé leur permis et acheté leur voiture, et terminé de rembourser leur prêt étudiant auprès de la banque. Certains jeunes se trouvent ainsi contraints de prendre un prêt à la consommation pour payer l'impôt.
De ce même exemple de ceux qui commencent à travailler, vous auriez pu tirer un argument différent : l'impôt à la source, en leur permettant de payer leur impôt au moment où ils perçoivent leur rémunération, leur épargnera de mauvaises surprises. Chacun n'a pas, en effet, la possibilité de recevoir un prêt gratuit de ses parents pour payer ses impôts l'année d'après. Votre argument est donc réversible.
En tout cas, ne vous inquiétez pas, le jeune aura la possibilité, au moment où il percevra sa rémunération, d'aller sur le site impôts. gouv. fr pour modifier, en temps réel, sa rémunération. Il n'y a donc pas de problème à cet égard.