Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du mercredi 3 novembre 2021 à 14h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics :

Le projet de loi de finances rectificative que nous vous soumettons renoue avec la définition et la nature des projets de loi de finances rectificative que nous avions l'habitude de présenter. Dépourvu de mesures d'urgence, il accompagne la sortie de crise, se bornant à proposer un ajustement de la répartition des budgets votés et à financer des mesures nouvelles apparues au cours de l'exercice.

Trois points peuvent caractériser le projet de loi que nous vous présentons. Le premier point concerne les mesures d'urgence. Au mois de juillet dernier, le Parlement a voté des crédits d'urgence dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2021. Toutefois, le fait que la croissance soit plus élevée et que le chômage soit moins important que prévu a entraîné une moindre consommation, d'environ 8,1 milliards d'euros, des crédits consacrés à l'urgence.

Sur cette somme, nous vous proposons de considérer que 4 milliards sont des restes à payer du fonds de solidarité et d'indemnités au titre de l'activité partielle, qui ne seront payés qu'en 2022, ou des exonérations de cotisations, à hauteur de 500 millions. Nous souhaitons également maintenir 2 milliards d'euros à titre prudentiel : s'ils ne sont pas mobilisés, nous en serons heureux car cela signifiera que nous serons véritablement sortis de la crise, et cela pourra donner lieu à une annulation à la fin du premier trimestre. Enfin, nous proposons l'annulation de 2,1 milliards d'euros, ce qui ne devrait pas entraîner de risque particulier. Les 6 milliards que nous proposons de laisser ouverts – 4 milliards pour des restes à payer, 2 milliards par prudence – s'ajouteront, au début de l'exercice 2022, aux 200 millions crédités sur la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire pour le financement de quelques mesures particulières.

Le deuxième point qui caractérise ce PLFR tient au traitement et à la gestion des crédits inscrits dans le cadre de la mission Plan de relance. Au 31 décembre prochain, les redéploiements de cette mission atteindront 8 milliards d'euros. Après un premier redéploiement de 600 millions d'euros dans le cadre de la première loi de finances rectificative et un deuxième redéploiement de 1,2 milliard d'euros dans la loi de finances pour 2022, nous vous en proposons un troisième redéploiement de 2,3 milliards d'euros, soit un total de 4,1 milliards. Les 3,9 milliards restants n'apparaissent pas dans ce décompte car ils sont redéployés de manière réglementaire, dans le cadre de la fongibilité des crédits au sein des programmes.

Ces mouvements permettent de financer des mesures comme le renouvellement du fonds pour le recyclage des friches, dont le deuxième appel à projets est en cours ; l'appel à manifestation d'intérêt pour les infrastructures de transport en site propre des autorités organisatrices de mobilité, pour 400 millions ; la prorogation des aides au recrutement d'apprentis ou d'alternants tout au long de l'année 2022 ; le plan Vélo, pour 150 millions d'euros.

Pour financer ces prorogations ou ces nouvelles mesures, nous procédons à des annulations de mesures qui sous-consomment – c'est le cas de la prime à la conversion en 2021 –, en raison principalement de la bonne tenue de l'économie. Ainsi, le fait qu'il y a eu très peu voire pas de défaillance en matière de remboursement des prêts garantis par l'État (PGE) en 2021 nous autorise à annuler 750 millions d'euros de crédits sur les appels en garantie PGE dans le cadre de la loi finances pour 2021.

Enfin, le troisième point caractérisant le PLFR touche au schéma classique d'ouverture et d'annulation de crédits. Nous allons vous proposer l'ouverture de 12,8 milliards d'autorisations d'engagement et de 9,1 milliards de crédits de paiement – hors mission Remboursements et dégrèvements, dont les actions sont de nature particulière – et l'annulation de 8,8 milliards d'autorisations d'engagement et de 7,3 milliards de crédits de paiement. Ainsi hors indemnité inflation et compensation spécifique des opérateurs, la norme de dépenses pilotables est tenue à hauteur de 290,5 milliards : c'est un signal de sérieux et de maîtrise de la gestion des comptes publics.

Les annulations concernent les crédits placés en réserve de précaution, donc sans conséquence sur les activités des ministères concernés. Elles visent également les sous-consommations de crédits et la diminution de la sinistralité de certains produits qui permettent de réduire les appels en garantie. En outre, nous vous proposons d'annuler 1,5 milliard consacrés aux dépenses accidentelles et imprévues car nous n'avons pas eu besoin de mobiliser ces dotations – et c'est heureux !

Les principales ouvertures de crédits concernent donc la mission Travail et emploi, à hauteur de 2,54 milliards d'euros. Nous finançons une partie du plan d'investissement dans les compétences pour les personnes les plus éloignées de l'emploi, annoncé par le Premier ministre, à hauteur de 1,4 milliard d'euros – 900 millions d'autorisations d'engagement (AE) dans ce PLFR, pour 480 millions de crédits de paiement (CP), le reste devant être financé par le PLF pour 2022.

Il s\'agit aussi d'une aide de 2 milliards d'euros à France compétences, en plus des 750 millions d'euros de subventions de la loi de finances initiale de 2021. L'attrition de l'assiette de masse salariale et l'accélération des recrutements d'apprentis du fait d'une politique dynamique, notamment dans le cadre du plan de relance, se traduisent, pour la partie conjoncturelle, par un déficit de 2 milliards d'euros au titre de l'exercice 2021.

Nous ouvrons 565 millions de crédits au ministère de la transition écologique, non seulement pour compenser certaines pertes de recettes de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) mais aussi pour financer le chèque énergie, à hauteur de 600 millions d'euros. Parfois, les dépenses annoncées sont supérieures aux ouvertures de crédits, mais il faut considérer en plus les annulations de crédits.

Nous vous proposons d'ouvrir 500 millions d'euros pour compléter les crédits prévus pour l'indemnisation des agriculteurs après l'épisode de gel du printemps ; un peu moins de 280 millions au profit du ministère de la culture pour la compensation d'opérateurs culturels, notamment en matière de billetterie ; et 200 millions d'euros au profit du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la fois pour garantir le niveau du fonds de stabilisation des départements et pour poursuivre le paiement des opérations d'aide à l'achat de masques par les collectivités.

Nous ouvrons aussi des crédits au profit du ministère des solidarités et de la santé pour financer un surcoût de la prime d'activité, de 130 millions d'euros, ainsi que de l'allocation adulte handicapé, à hauteur de 90 millions d'euros.

Nous ouvrons des crédits au titre de l'aide publique au développement, pour tenir les engagements pris, notamment pour financer le programme ACT-A (dispositif pour accélérer l'accès aux outils de lutte contre le covid-19) et certaines opérations humanitaires en lien avec l'Afghanistan.

Enfin, nous vous proposons d'inscrire 3,6 milliards d'euros pour le financement de la presque totalité de l'indemnité inflation, dont le coût est évalué à 3,8 milliards d'euros – les 200 millions d'euros restants seront inscrits dans le PLF pour 2022 pour le paiement de l'indemnité aux fonctionnaires d'État ainsi qu'aux retraités de la fonction publique d'État, et à certains pensionnés des régimes spéciaux. Les autres bénéficiaires verront les crédits qui les concernent inscrits en PLFR car nous envisageons de décaisser cet argent auprès des organismes qui remboursent les employeurs dès la fin de l'exercice 2021.

S'agissant du ministère des armées, nous avons tenu les engagements de la loi de programmation militaire, à la fois sur le volume d'augmentation des crédits – 1,7 milliard d'euros –, et sur la montée en puissance du budget consacré aux opérations extérieures (OPEX). Ce budget, de 1,2 milliard d'euros en 2021, a atteint un plus haut historique. Malgré cela, les opérations d'évacuation de l'Afghanistan et la réorganisation de l'opération Barkhane, notamment, ont conduit à un surcoût, estimé à près de 350 millions d'euros. Comme les années précédentes, une partie sera financée par des annulations de crédits de programmes sous-consommés, sans qu'aucun engagement pris par le ministère des armées ne soit remis en question. Contrairement aux années précédentes, nous ouvrons 150 millions d'euros auprès du ministère des armées pour participer au paiement du surcoût lié aux OPEX.

Avec ces ouvertures et ces annulations, hors indemnité inflation et hors compensations aux opérateurs – 2 milliards d'euros pour France compétences ; 600 millions d'euros pour d'autres opérateurs –, nous tenons la norme de dépense telle qu'elle avait été votée en loi de finances pour 2021. Avec les nouvelles recettes liées à la révision de croissance de 6 % à 6,25 %, l'ensemble de ces opérations n'empêche pas une amélioration du déficit public, de 8,4 % à 8,1 % du PIB, ni de tenir l'objectif de 5 % en 2022, comme nous l'avions annoncé au début de l'examen du projet de loi de finances pour 2022.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.