S'agissant de la composition des 20 milliards d'euros de recettes supplémentaires de l'État, cette somme s'élève en fait à 17,1 milliards déduction faite des fonds de concours, en hausse de 2,3 milliards, et des prélèvements sur recettes, en hausse de 300 millions. Parmi les 20 milliards d'augmentation brute, on observe une hausse des recettes fiscales nettes de 18,2 milliards, dont 9,9 milliards pour l'impôt sur les sociétés, 3,6 milliards pour la TVA et 1,6 milliard pour l'impôt sur le revenu. Pour le reste, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques a rapporté 900 millions supplémentaires, en raison notamment d'une mise à jour de la répartition entre affectataires. D'autres améliorations sont liées aux prélèvements sur les revenus des capitaux mobiliers ou sur les bons anonymes, en raison d'une opération exceptionnelle. À cela s'ajoute une augmentation des droits de mutation à titre gratuit d'un peu plus d'un milliard en 2021.
La dynamique de quelques recettes non fiscales est en revanche négative : la prévision sur les primes de prêts garantis par l'État est revue à la baisse de près de 800 millions et un prêt au Soudan qui n'a pas été réalisé nous fait perdre des intérêts à hauteur de quelques centaines de millions.
Les 9 milliards d'euros de dépenses non réalisées s'ajoutent bien aux annulations auxquelles nous avions procédé dans le PLFR 2 : nous en sommes à 2,9 milliards pour les dépenses pilotables, 2,3 milliards pour les dépenses d'urgence et 5,9 milliards pour les crédits de paiement du plan de relance – nonobstant 72 milliards en autorisation d'engagement : le décalage s'explique par le fait qu'acteurs publics et privés connaissent quelques retards de chantier et que l'ingénierie a pu faire défaut en raison des confinements.
Le reliquat budgétaire de la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire s'élève à 7,8 milliards, dont 3,4 milliards pour les participations de l'État, 2,5 pour le fonds de solidarité, 1,2 pour l'activité partielle et 500 millions pour les exonérations ; un milliard a déjà été reporté en 2022 en fonction des restes à payer au titre des dossiers de 2021 et de la consommation des mesures d'urgence. Dans le cadre des restrictions que nous connaissons, nous procéderons à d'autres reports d'ici le 31 mars, en espérant que nous n'aurons pas besoin de tout mobiliser.
S'agissant de la part structurelle ou conjoncturelle du déficit, comme les dépenses d'urgence et de relance sont intégrées au déficit structurel depuis 2021, la différence n'a plus véritablement lieu d'être. En 2021, les dépenses exceptionnelles de relance se sont élevées à 42 milliards, ce qui représente deux points de déficit, et les dépenses d'urgence à 64 milliards, soit trois points de déficit. Cela permet de mesurer ce que serait le déficit de l'État si nous n'avions pas connu une telle crise : le déficit de la sécurité sociale représentant environ 0,9 point, le déficit public serait en dessous de 2 % et inférieur encore si la sécurité sociale avait maintenu ses recettes.
L'examen préventif des dossiers d'aide à l'activité partielle ou du fonds de solidarité a évité le versement de plus de 10 milliards d'euros d'indus. Des examens a posteriori nous ont permis de repérer environ 8 000 dossiers faisant l'objet de trop-perçus sur le fonds de solidarité, ce qui est assez peu compte tenu des 2,2 millions de dossiers traités. Nous avons d'ores et déjà déposé 2 500 plaintes, un accord ayant été passé avec la Chancellerie pour les gérer. Depuis octobre 2020, nous avons également renforcé les contrôles a priori en matière d'activité partielle. S'agissant des prêts garantis par l'État, seuls six dossiers sont actuellement judiciarisés, pour un montant total de 2,5 millions d'euros.
J'insiste sur l'importance de ces contrôles a priori, qui sont très efficaces et qui ont évité le versement de sommes considérables. Le montant des fraudes constatées s'élève à quelques dizaines de millions d'euros.
S'agissant des collectivités territoriales, leurs recettes sont très dynamiques et le resteront en 2022. La part de TVA affectée aux régions augmentera d'un peu plus de 800 millions ; les parts affectées aux départements et aux intercommunalités augmenteront également, en l'occurrence de 400 millions, ce qui représente 2 milliards au total.
À cela s'ajoutent la dynamique des droits de mutation à titre onéreux – sans doute moins importante qu'en 2021, où elle a été de 27 %, mais qui sera tout de même très soutenue – et la révision forfaitaire des valeurs locatives, qui atteindra 3,4 % en 2022 afin de tenir compte de l'inflation glissante.
La perte de 4,6 % sur la CVAE est estimée entre 400 et 500 millions, ce qui est très faible eu égard à ces dynamiques de recettes.
La situation est donc plutôt bonne. Elle doit permettre de favoriser les investissements et de donner de la visibilité aux différents acteurs. Une loi de programmation des finances publiques sera utile pour l'État, les administrations de sécurité sociale et les administrations publiques locales.
Nous devons également mettre à profit ces lois de programmation et la loi organique défendue par M. le président de la commission et M. le rapporteur général pour améliorer la lisibilité des crédits. Beaucoup peut être fait pour simplifier les annexes et les informations budgétaires, pour rationaliser les taxes affectées et pour rebudgétiser les comptes spéciaux. Bien souvent – même si je ne connais pas parfaitement le budget de la recherche – la multiplication des fonds de concours sans personnalité morale et des extra-budgétisations interdisent la clarté.
Je souhaite enfin que le secrétariat général pour l'investissement – la nouvelle gouvernance de France 2030 – rende l'information beaucoup plus accessible pour ceux qui sont chargés de contrôler l'action du Gouvernement.
S'agissant des aides aux entreprises, les critères en vigueur ne permettent pas à chacune d'elles d'être éligible à la prise en charge des coûts fixes. Mais, dès lors qu'elles réalisent des bénéfices, une aide ne s'impose pas ! J'ajoute que si l'excédent brut d'exploitation est positif malgré une diminution du chiffre d'affaires de 60 % ou 80 %, c'est également parce que les coûts fixes sont pris en charge en matière d'activité partielle et de cotisations. Bref, nous n'avons pas de solution pour accompagner les entreprises bénéficiaires. Certaines collectivités demandent d'ailleurs aussi des compensations alors que leur propre épargne brute a augmenté entre 2020 et 2021, ce qui est un peu paradoxal.
Les difficultés de recrutement, bien sûr, sont un frein à l'activité économique et à la croissance. Nous n'avons pas les moyens de le mesurer quantitativement, mais cela fait systématiquement partie des retours de terrain.
Quant à la perte de TVA liée aux importations provenant d'États membres de l'Union, si nous disposons de chiffres à ce sujet, nous les communiquerons à M. Labaronne.
Enfin, je me réjouis de l'appréciation portée par Paul Krugman sur notre stratégie. Il est bon de rappeler ce qui fonctionne et c'est encore plus crédible quand cela vient de l'extérieur. Ce regard est précieux et encourageant.