Bruno, nous avons conduit ensemble une mission d'information sur les métiers du lien. À cette occasion, nous avons croisé Assia, Hayat, Martine, qui s'occupent de nos enfants, de nos personnes âgées, handicapées ou non. À chaque fois que je les croise, elles me demandent : « Ben alors, il est où ton copain Marcheur ? Il va y avoir une loi ou il va pas y en avoir ? » Je leur dis que non, il n'y aura rien pour les auxiliaires de vie sociale, rien pour les femmes de ménage, rien pour les assistantes maternelles, rien pour les accompagnantes d'enfants en situation de handicap. Et voilà que tu décroches une enveloppe de 34 milliards d'euros ! L'espoir renaît !
Mais je découvre que ces 34 milliards ne seront pas pour l'humain mais pour les robots ; ce seront 34 milliards pour la génétique, la robotique, le numérique, le nucléaire de proximité… J'éprouve alors une inquiétude immense : c'est la réponse macroniste au changement climatique, à ce défi immense qui est devant nous ! On renonce à changer la société, on fait le pari incertain du tout-technologique. On espère une innovation de rupture qui est un peu l'équivalent du deus ex machina dans la tragédie grecque : ça va nous tomber du ciel, ça va tout résoudre ! Moi, je pense qu'on va dans le mur.
Quel est le chemin du progrès ? Passe-t-il par l'innovation, les objets, la 6G, ou plutôt par l'humain, la qualité des relations, l'éducation qu'on offre à nos enfants et les soins qu'on apporte aux personnes âgées, avec Assia, Hayat et Martine ? La France de 2030, c'est aussi celle de ces femmes. Pour elles, on ne comptera jamais en milliards, tu le sais, Bruno. Je vais continuer à faire la manche au cours du prochain quinquennat, si les électeurs veulent bien de moi : j'irai gratter des millions, peut-être quelques dizaines de millions – pour ces femmes, cela fera quelques euros supplémentaires et je les prendrai. Mais ton combat pour l'humain d'abord, de la naissance à la mort, était-ce seulement le temps d'un film ?