Intervention de Catherine Pignon

Réunion du jeudi 16 avril 2020 à 14h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Catherine Pignon, directrice des affaires criminelles et des grâces :

Nous avons privilégié un dispositif qui rend possible le suivi des personnes bénéficiant d'une libération anticipée, ce que ne permet ni la grâce ni l'amnistie. Il est aussi apparu nécessaire d'individualiser les mesures, ce qui explique la possibilité d'une réduction de peine supplémentaire exceptionnelle de deux mois décidée par le juge de l'application des peines en fonction du comportement du détenu.

Nous constatons une augmentation sensible des interventions des services de police et de gendarmerie pour des violences conjugales et, concomitamment, la baisse du nombre de plaintes, qui s'explique par les conditions dans lesquelles elles sont recueillies. Les mis en cause sont jugés en comparution immédiate lorsque la gravité des faits le justifie et lorsque l'enquête le permet. Dans les autres cas, nous privilégions la comparution à délai différé ; dans l'intervalle, le parquet soumet le mis en cause à une mesure de suivi – en général un contrôle judiciaire. Dans l'ensemble, des réponses fermes sont maintenues. Les associations d'aide aux victimes ont intensifié les entretiens de prise en charge : pendant les vingt-quatre premiers jours de l'état d'urgence sanitaire, elles ont traité près de 7 000 situations, accompagné 2 529 nouvelles victimes et conduit plus de 20 000 entretiens à dominante juridique, psychologique ou sociale. On note aussi une forte augmentation d'attributions de téléphones « grand danger ».

Si l'allongement de plein droit des détentions provisoires a été décidé, notamment dans le cadre d'une information judiciaire, c'est que les informations sont ralenties, sinon paralysées, puisque les juges d'instruction ne peuvent travailler dans des conditions normales. Avec des services d'enquête à l'activité réduite, il n'est plus toujours possible de procéder aux perquisitions, réquisitions, auditions et confrontations utiles à la manifestation de la vérité. Le temps indispensable à l'achèvement des instructions et limité par le législateur devait être allongé – pour une durée déterminée et proportionnée – sans exiger systématiquement la vérification du bien-fondé de cette prorogation par le juge des libertés et de la détention (JLD). Cette disposition n'affecte en aucune manière le droit de demander à tout moment sa mise en liberté : le nombre de demandes a triplé par rapport à l'an dernier. Il ne s'agit nullement de priver un justiciable du droit d'accès à son juge. Par ailleurs, le code de procédure pénale continue d'imposer au magistrat instructeur et au ministère public de reconsidérer d'office la situation des personnes lorsque leur détention provisoire n'est plus nécessaire.

Dans deux décisions en référé du 3 avril dernier, le Conseil d'État a rejeté les recours formés par des associations d'avocats contre la circulaire du 26 mars, considérant que ces mesures présentent un caractère proportionné et ne portent pas une atteinte manifestement illégale aux libertés fondamentales.

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