Chacun tirera les conséquences de ce qu'il a vu et entendu.
Le groupe La France insoumise a déposé un amendement de suppression sur les deux premiers articles du projet de loi, car notre opposition aux dispositions issues de la loi SILT et de la loi relative au renseignement n'a pas varié.
L'examen du projet de loi SILT a donné plus de vigueur encore aux concepts de dangerosité, d'infra-judiciaire et de police administrative, ce qui n'a pas empêché, en vertu d'une logique implacable, la discussion de mesures de sûreté, et, demain, le débat sur la rétention de sûreté. Je fonde néanmoins quelque espoir sur la position qu'adoptera, ne vous en déplaise, le nouveau garde des Sceaux sur cette question.
S'agissant des techniques de renseignement fondées sur l'analyse algorithmique, le journal Le Monde, dans son édition du 8 juillet, fait état d'un rapport confidentiel qui permettra d'éclairer nos discussions lors de l'examen du futur projet de loi. Il révèle en effet que ces techniques n'ont jamais permis d'empêcher un seul acte terroriste. Un autre article indique que l'analyse en continu des données par les « boîtes noires » n'aurait permis de détecter qu'une petite dizaine de profils faiblement à risque. Il existe donc une disproportion complète entre ces résultats et les moyens mis en œuvre pour écouter et observer la société tout entière.
On pourrait en conclure que le dispositif est inopérant et que nous avons quand même mis fin à la menace terroriste, puisque des attentats ont été déjoués. Eh bien non, on nous propose d'aller encore plus loin ! Dans ce rapport, les services de renseignement expliquent que si personne n'a été attrapé grâce à ces moyens technologiques, c'est qu'il nous faut encore les accroître.
Éric Ciotti s'inscrit dans la même logique : selon lui, si le nombre d'attentats a baissé, ce n'est pas parce que moins de gens veulent en commettre, c'est parce que nous n'avons pas bien cherché ! À force de chercher des terroristes, on finira bien par en trouver… ou en fabriquer. La tendance des services de renseignement, c'est bien de trouver ce qu'ils cherchent ou, de façon indirecte, à le fabriquer.
L'analyse des URL pourrait donc nous indiquer qui consulte, et quel site ? Ce serait le Graal aux yeux de certains. Mais est-ce souhaitable dans une société démocratique et dans un état de droit ? Si, pour combattre la menace totalitaire, nous finissons par employer des moyens totalitaires, nous nous dévoierons et nous nous écarterons de l'idéal républicain.
Nous restons opposés à ces mesures. Non pas qu'il ne faille selon nous rien faire contre la menace terroriste : les pouvoirs de police ont été largement renforcés ; les moyens de la justice doivent être augmentés. Dans bien des cas, c'est notre capacité à judiciariser qui pose problème ; beaucoup de choses peuvent être faites dans le cadre d'une enquête préliminaire, n'allez donc pas raconter que la justice est désarmée !