Intervention de Paul Molac

Réunion du mercredi 23 septembre 2020 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

La recrudescence de la maladie ne change rien au problème que nous rencontrons, pas plus que l'avis du Conseil d'État. Une énième loi d'exception est-elle nécessaire et même souhaitable ? Le droit commun, en particulier celui posé par l'article L. 3131-1 du code de la santé publique, n'aurait-il pas suffi ?

Prenons l'exemple du Morbihan, un des trois premiers départements dans lesquels le virus a pris pied dans le pays. Le préfet a pris un arrêté pour fermer, dans les foyers d'infection, l'accès aux lieux publics – écoles ou marchés. La maladie est restée cantonnée dans ces seuls endroits et ne s'est pas répandue dans le reste du Morbihan : la partie où je réside n'a quasiment eu aucun cas de covid. Le préfet a pris cette décision avant même que le Gouvernement ne déclare l'état d'urgence sanitaire, ce qui prouve que le droit existant suffit. Ainsi, l'article L. 3131‑1 du code de la santé publique dispose que le ministre chargé de la santé peut prendre, par arrêté motivé, des mesures proportionnées. Ce faisant, il impose des limites à la puissance administrative, ce qui est important en démocratie. Rappelons que le manquement au respect du port obligatoire du masque est passible d'une peine d'amende de 135 euros, soit 12 % du salaire mensuel minimum, portée à 3 750 euros en cas de récidive, ce qui représente trois fois le salaire mensuel minimum, et six mois d'emprisonnement ! Ce sont des peines très sévères.

Nous disposons aujourd'hui de tout l'arsenal nécessaire pour endiguer cette pandémie sans recourir à une loi d'exception. La ministre du travail n'a-t-elle pas déclaré qu'il suffisait de se laver les mains et de porter un masque pour être parfaitement protégé ? Nous avons du gel, des masques, des tests – certes, pas en nombre suffisant, mais un million de tests ont tout de même été réalisés. Cela n'a rien à voir avec la situation de mars dernier.

Alors que nous sommes sur la bonne voie, vous voulez renforcer l'autorité administrative au détriment de la démocratie locale, ce qui se traduit par des décisions incompréhensibles. On ferme des marchés, qui se tiennent généralement dehors, mais pas les grandes surfaces où les clients se trouvent dans un espace clos à toucher tous les produits.

Alors que l'on nous avait assuré que le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire prendrait fin avec la pandémie, on en remet une couche et on demande de le proroger jusqu'à ce que le Parlement vote, en avril 2021, un projet de loi destiné à pérenniser ce type de mesures. Je crains que l'on n'aille un peu loin : vous êtes en train de casser le pacte passé autour de cet état d'urgence sanitaire. Qu'adviendra-t-il des élections départementales et régionales si nous prorogeons ces mesures d'exception pour six mois ? J'ai le sentiment que l'administration cherche à étendre son pouvoir au maximum, à tout contrôler, en s'expliquant le moins possible.

Vous commettez là une nouvelle erreur. M. Stanislas Guerini l'a lui-même admis avec le recul : le Gouvernement aurait dû reconnaître que seul le manque de masques expliquait qu'il faille les réserver à ceux qui étaient en première ligne. Mieux vaut dire la vérité et faire confiance à nos concitoyens !

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