Intervention de Guillaume Vuilletet

Réunion du jeudi 15 octobre 2020 à 11h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Vuilletet :

Je tâcherai d'instiller un peu d'enthousiasme dans nos commentaires sur ce budget, car je pense qu'il le mérite. Même si Mme George Pau-Langevin porte une appréciation globale qui lui a inspiré un avis d'abstention, c'est à la lumière de ses commentaires que je formulerai les miens – avec beaucoup d'humilité, car c'est en écoutant et en lisant les discours de ceux qui connaissent bien le terrain que j'apprends progressivement à prendre la mesure des outre-mer.

Les fragilités des divers territoires d'outre-mer empêchent de mesurer l'ampleur qu'y prend la crise provoquée par le covid-19. Ce qui est sûr, c'est que leur situation est difficile et qu'elle mérite une mobilisation considérable. Celle-ci a été au rendez-vous ; la réactivité de l'État doit être soulignée. Des mesures d'urgence, à hauteur de 4 milliards d'euros, ont été prises en faveur des territoires ultramarins, ce qui représente une proportion significative de l'effort national. En matière de prêts garantis par l'État (PGE), on a constaté outre-mer un phénomène de surconsommation qui n'allait pas de soi initialement.

Je relève aussi que le projet de loi de finances s'inscrit dans les stratégies de long terme du Gouvernement, notamment celles développées dans le cadre des assises des outre-mer et du Livre bleu présenté au mois de juin 2018. Il consolide les contrats de convergence et de transformation prévus par la loi sur l'égalité réelle outre-mer – ÉROM – et il permettra de financer plusieurs plans d'envergure, tels que la trajectoire outre-mer 5.0, le plan logement outre-mer 2019-2022 et le plan SMA 2025.

Avec une augmentation de 6,39 % pour les autorisations d'engagement et de 2,64 % pour les crédits de paiement, les niveaux d'engagement restent ambitieux. Toutefois, les crédits de la mission « Outre-mer » ne représentent que 12 % de l'effort budgétaire global de l'État s'y rapportant, compris entre 20 et 25 milliards d'euros. Ce budget renforcé permettra d'augmenter les moyens affectés au soutien à l'emploi et la formation, ainsi qu'à l'accompagnement des collectivités territoriales, à l'équipement des territoires, au logement et à la continuité territoriale.

J'aimerais aborder la question de la sous-consommation des crédits de paiement, qui a fait l'objet d'explications diverses. Elle existe aussi ailleurs, mais il serait faux de nier la singularité de l'outre-mer en la matière.

En matière de logement, sur lequel je mène, avec notre collègue Serge Letchimy, un travail déjà ancien, je me réjouis de l'annonce d'autorisations d'engagement en augmentation de 8,71 %. Au passage, je salue l'action importante des partenaires de cette politique, CDC Habitat ainsi qu'Action Logement, qui a intégré dans son plan d'investissement volontaire 1,5 milliard d'euros au profit des outre-mer. Voilà de quoi relativiser les propos que j'ai pu entendre lors de l'examen d'autres missions budgétaires, selon lesquels son rôle était menacé ! La différence entre autorisations d'engagement et crédits de paiement est importante : 176 millions d'euros pour les premières, 224 millions pour les seconds. En 2019, la sous-consommation des crédits de cette action était de 49 millions d'euros ; elle était de 170 millions d'euros en 2018.

En dépit des efforts entrepris depuis 2019, qui ont permis l'amélioration de la consommation des fonds, notamment à La Réunion, cette situation témoigne de la difficulté à mobiliser des crédits nécessitant des instructions parfois longues et complexes auprès d'autorités de gestion locales pas toujours totalement efficientes. Il est essentiel d'adapter l'accompagnement des acteurs concernés. Comment améliorer l'utilisation des crédits, notamment en matière d'ingénierie ?

Au sein du plan de relance, 1,5 milliard d'euros sont fléchés vers l'outre-mer. Vous avez indiqué, monsieur le ministre, que cette somme constitue un socle. On lit dans le plan de relance qu'elle est proportionnelle au poids économique des outre-mer. Sincèrement, celui qui tenait la plume n'a pas fait là un choix très heureux. Il y a d'autres façons de présenter les choses, même si j'ai bien pris note que le reste de la somme mobilisée demeure ouvert aux outre-mer. En tout état de cause, pour que les collectivités d'outre-mer puissent répondre aux appels d'offres et aux appels à projets, elles doivent disposer d'une ingénierie adaptée. Il faut véritablement que l'État les accompagne davantage. Je sais que telle est votre préoccupation, monsieur le ministre.

Outre les problèmes d'ingénierie, de moyens financiers et de moyens humains, les outre-mer souffrent aussi d'un problème de normes. J'en profite pour vous transmettre le salut de Cyrille Melchior, président du conseil départemental de La Réunion, avec qui j'ai dialogué tout à l'heure en visioconférence. Il m'indiquait que, en matière de bâtiments agricoles, il est parfois complexe d'adapter à l'outre-mer les normes décidées pour la nation. Il en résulte de fréquents refus d'implantation de ces bâtiments. Autre exemple devenu un poncif : je ne suis pas sûr que la règle de la pente maximale de 15 %, dans la construction des parkings, pour éviter aux véhicules de pompiers de glisser sur le gel, corresponde à une nécessité outre‑mer. Nous devons faire un effort en matière d'adaptation des normes et des correspondances.

Monsieur le ministre, vous avez eu la bonté de me confier une mission sur le rayonnement régional des outre‑mer, dont je pense que le plan de relance doit être l'un des moyens. J'étais hier soir avec la French Tech Polynésie. Ces gens font un travail remarquable d'innovation et d'adaptation des technologies, avec un potentiel de développement économique fort. Il faut les accompagner. L'Agence française de développement (AFD) est d'ailleurs bien au rendez‑vous.

Dans le monde qui nous attend, avec le covid et ses fragilités sanitaires, les mobilités se restreindront un peu. L'équation se fera entre prospérité, qualité de vie et développement régional. Parce que ce budget y concourt largement, je le soutiendrai avec enthousiasme, ainsi que le groupe La République en marche.

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