Madame la ministre, faites savoir à M. Darmanin qu'avant d'être député, j'ai été comptable au ministère de l'Intérieur – on peut s'interroger sur les services de renseignement à propos de ma fiche... Je vais essayer d'être le plus pédagogique possible dans mes explications sur les augmentations et diminutions de crédits.
Vous avez mis en avant les secrétariats généraux communs et indiqué qu'il n'y aurait des suppressions d'emplois que dans les administrations centrales. Or force est de constater une baisse des effectifs en ETP plutôt qu'une hausse entre 2020 et 2021 dans le programme 354 « Administration territoriale de l'État » qui ne concerne que les postes des administrations déconcentrées, en raison de nombreux transferts entrants dans ce programme du fait des secrétariats généraux communs. Pour reconstituer le puzzle, il faut examiner ce qui se passe dans tous les autres ministères qui ont perdu des effectifs. Au global, il y a bien des réductions de postes à l'échelle de l'État ! Les transferts entrants représentent en effet 1 062 ETPT provenant de la Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRGSCS), de la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), de la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), etc. tandis que les transferts sortants sont de l'ordre de 119 ETPT. Cela fait un solde de 943 postes pour le programme 354. En comparant avec l'année précédente, on remarque qu'il y a un peu moins de 700 ETPT supplémentaires, ce qui fait qu'on perd plus de 250 postes sur le programme 354. Voilà pourquoi je ne vous applaudis pas et je ne vous remercie pas : contrairement à ce que vous avez annoncé, il y a bien des suppressions de postes en 2021 !
C'est le même combat pour le programme 216 qui enregistre une baisse de 148 ETPT par rapport à l'année dernière. Certes, il y a un petit rééquilibrage entre l'administration centrale et les administrations déconcentrées. On peut cependant s'en étonner car la revendication des agents de l'État dans les services déconcentrés ce n'est pas d'avoir moins d'interlocuteurs à Paris, c'est d'avoir au moins autant d'interlocuteurs à Paris et davantage de collègues en région. Vous réussissez la prouesse de faire les deux : ils sont moins nombreux localement et ils ont moins d'interlocuteurs à Paris. Si c'est cela l'action publique 2022, il est peut-être urgent de l'arrêter et de redonner aux agents de l'État les moyens de fonctionner, d'autant qu'ils ont été plus qu'essentiels lors de la crise de la covid-19.
J'ai noté une augmentation, hors titre 2, de l'action des services informatiques de 23 millions d'euros, mais je n'ai vu aucune ligne relative à l'achat de postes de télétravail. Or il serait peut-être urgent qu'ils puissent en bénéficier. Les retours de terrain montrent que beaucoup d'agents des différentes préfectures et sous-préfectures souhaiteraient que soit appliquée la dernière circulaire du Premier ministre les invitant à faire du télétravail deux à trois jours par semaine. Or pour ce faire, ils ont besoin d'un poste de télétravail, car on ne peut pas accéder au réseau sécurisé du ministère de l'Intérieur avec son ordinateur personnel. Comme la pandémie de covid-19 ne va visiblement pas s'arrêter au 31 décembre, il serait bon de prévoir une ligne budgétaire pour 2021.
Je m'interroge une fois de plus sur la véritable volonté politique du Gouvernement. On nous ressort à toutes les sauces les mêmes mots clés, rationalisation, amélioration de l'efficience, alors que l'objectif est en réalité d'avoir moins d'effectifs, moins d'agents de l'État. Contrairement à ce qui est avancé, cela ne se traduit pas par un renforcement des services au public. Tans mieux si la mise en place des secrétariats généraux communs nécessite moins d'agents pour faire le même travail, alors faisons-le. Mais alors, utilisons ces effectifs là où on en a besoin, dans les sous-préfectures, pour accueillir du public, pour accompagner nos concitoyens dans l'utilisation d'applications qui ne marchent pas si bien que cela, comme chacun s'en aperçoit assez régulièrement.
Je ne voterai pas ce budget, parce qu'au-delà des effectifs, le programme 354 n'augmente que de 40 millions d'euros entre 2020 et 2021. Avec les transferts entrants, vous prenez aux autres ministères 54 millions d'euros. En gros, on en perd 14. Si c'est encore pour faire des économies sur le dos des agents de l'État, y compris et surtout en 2021, ce sera sans La France insoumise.