Intervention de Marlène Schiappa

Réunion du lundi 19 octobre 2020 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Marlène Schiappa, ministre :

Mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur de vous présenter les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », qui sont fortement mobilisés pour répondre à une politique migratoire que nous voulons à la fois maîtrisée et équilibrée.

Cet équilibre, vous le savez puisque vous y contribuez, repose à la fois sur l'humanité dans l'accueil et l'intégration, et sur la fermeté vis-à-vis de celles et ceux qui entrent irrégulièrement sur le territoire national, ou s'y maintiennent bien que déboutés de leur demande d'asile.

Notre pays est une terre d'asile, et c'est l'honneur de la France de protéger celles et ceux qui, partout dans le monde, sont persécutés et ont besoin de sa protection. La République française les protège, mais elle doit aussi être respectée dans ses décisions.

Parce que les questions d'immigration, d'asile et d'intégration constituent l'une des grandes priorités du ministère de l'intérieur, le projet de loi de finances pour 2021 autorise une augmentation des crédits de 36,8 millions d'euros, soit + 2 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2020. En complément, des crédits « Compétitivité » de la mission « Relance » viennent abonder les efforts budgétaires de la mission à hauteur de 26,6 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Vous le voyez, nous réalisons un effort important, qui vise à nous donner les moyens d'agir plus et mieux, à travers les deux programmes de la mission, le programme 303 « Immigration et asile » et le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française ».

Le programme 303 illustre la volonté résolue du Gouvernement de mieux accueillir et de mieux lutter contre les réseaux et le phénomène d'immigration irrégulière.

Pour mieux accueillir, les principales dépenses en matière d'asile dans ce programme portent sur l'accueil et l'hébergement des demandeurs. Cela se traduit par une hausse significative du budget consacré à l'allocation pour demandeur d'asile (ADA), de 11,5 millions d'euros par rapport à la LFI de 2020, ce qui porte le budget à 459,4 millions d'euros. Ce budget est important et je voudrais, devant vous, souligner l'effort budgétaire que consent la Nation pour accueillir les demandeurs d'asile.

Bien que la demande d'asile ne puisse être chiffrée à l'avance, et que les projections soient difficiles, nous avons pris le parti, pour l'évaluer, de retenir les chiffres de 2019, année exceptionnellement haute en termes de demandes – vous le savez parce que vous avez travaillé dessus –, tout en anticipant une amélioration progressive des délais de traitement de la demande d'asile, qui, nous l'espérons, aura un effet mécanique à la baisse sur la dépense.

Les actions menées en matière d'hébergement, qui auront, elles aussi, un effet sur la dépense consacrée à l'ADA, portent d'abord sur la fluidité du parc d'hébergement. Il s'agit notamment de sortir des hébergements les déboutés qui s'y maintiennent indûment ; d'inciter au départ volontaire avec un accompagnement dédié – 1 500 places dans les dispositifs de préparation au retour (DPAR) seront créées – et d'introduire une gestion régionalisée des places, pour réduire la vacance frictionnelle.

À ces actions s'ajoutent des moyens financiers considérables. Le point fort du PLF pour 2021 est la création de 6 000 places supplémentaires : 4 000 places au titre de la présente mission et 2 000 dans le cadre de la mission « Relance ». Il s'agit pour la moitié de places en centres d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) ; pour 1 500, de places en centres d'accueil et d'examen des situations administratives (CAES) ; et pour 1 500, de places dans les DPAR.

Pour le financement du parc et la consolidation des capacités des CADA, des CAES et des hébergements d'urgence des demandeurs d'asile (HUDA), une dotation de 726,5 millions d'euros est prévue. S'y ajoutent 18,5 millions d'euros au titre de la mission « Relance » pour les 2 000 places créées grâce au plan de relance, que j'évoquais précédemment.

J'ai mentionné l'amélioration des délais de traitement de la demande d'asile. Il s'agit d'appliquer la loi du 10 septembre 2018 que vous avez votée : c'est une priorité de notre action en matière d'asile car elle permet d'accueillir dignement celles et ceux qui ont droit à la protection de la France ; et, a contrario, de répondre rapidement à celles et ceux qui n'ont pas vocation à rester sur notre territoire car il est inhumain de laisser sans réponse des personnes qui sont dans des situations difficiles, hors de leur pays. Elles ont le droit de savoir rapidement si, oui ou non, nous répondrons favorablement à leur demande.

Cette amélioration du délai de traitement de la demande d'asile à laquelle nous travaillons, notamment par l'octroi de 200 postes supplémentaires à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), aura une incidence sur le montant de l'ADA comme sur la fluidité de l'hébergement.

Cela passe par un effort en termes de moyens, notamment en direction de l'OFPRA. La subvention qui lui est accordée au titre du PLF pour 2021, de 92,8 millions d'euros, progresse de 1,3 % par rapport à 2020. Les 200 équivalents temps plein (ETP) accordés en 2020 sont pérennisés en 2021, pour poursuivre l'amélioration du travail, à la fois pour gagner en rapidité dans la réponse et améliorer les conditions d'accueil et de traitement des dossiers afin que les personnes qui se rendent à l'OFPRA soient traitées avec la plus grande humanité.

Nous voulons ensuite mieux lutter contre l'immigration irrégulière. L'investissement immobilier des centres de rétention administrative (CRA) témoigne de la volonté résolue du Gouvernement à pouvoir éloigner les personnes qui n'ont pas vocation à rester sur le territoire. Trop souvent, le manque de places en CRA fait obstacle à cet éloignement. Aussi, 29,4 millions d'euros seront consacrés au financement de la tranche 2021 du plan d'extension des CRA, notamment les opérations d'Olivet et de Bordeaux, ainsi que le nouveau CRA de Lyon, qui sera livré à la fin de l'année 2021. Six millions de CP sont prévus pour la création du CRA de Nice. À ces montants s'ajoute 1,4 million d'euros de CP au titre de la mission « Relance », pour la rénovation de CRA existants.

Par ailleurs, les préfets ont été invités à créer des locaux de rétention administrative (LRA) dans l'attente et en complément de la création de nouvelles places, pour ne pas rester sans solution.

Le budget de l'éloignement des étrangers en situation irrégulière illustre la volonté du Gouvernement de retrouver les niveaux d'éloignement comparables à ceux d'avant la crise sanitaire. Ce poste de dépenses couvre notamment les frais de billetterie centrale, le coût des aéronefs et des affrètements dédiés, à hauteur de 24,5 millions d'euros, un montant équivalent à celui budgétisé pour 2020.

Pour ce qui concerne le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française », depuis plus de deux ans, à la demande du Président de la République, le Gouvernement a engagé une refonte de la politique d'intégration. L'État se donne aujourd'hui les moyens de mener une politique volontaire et ambitieuse, à travers toutes les mesures du comité interministériel à l'intégration du 5 juin 2018, ainsi que par ce budget dédié qui se maintient à un niveau élevé et progresse même de 2 millions d'euros par rapport à 2020.

Parmi les actions prioritaires, je tiens à citer celles qui concernent le renforcement du parcours d'intégration sur les questions relatives à la laïcité, aux valeurs de la République et à l'égalité entre les femmes et les hommes, sur la maîtrise de la langue française et sur la formation civique. Ce parcours permet une meilleure diffusion de ces valeurs et favorise la participation à la vie de la société et l'accès à l'emploi. Je veux également mentionner la prise en charge de certaines situations particulières, notamment chez les réfugiés. Je pense notamment aux femmes yézidies ou aux femmes qui ont été victimes de violences sexistes et sexuelles dans leur pays d'origine.

Ces actions importantes sont menées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ainsi que par des porteurs de projets et des opérateurs. S'agissant de l'OFII, ses crédits d'intervention prévus pour 2021 s'élèvent à 11 millions d'euros, un montant identique à celui inscrit en LFI de 2020.

Quant aux actions d'intégration des primo-arrivants, elles augmentent de 9 %. Ces crédits sont destinés à financer des actions dans les territoires, notamment l'accompagnement global vers l'emploi. Les crédits consacrés à l'accompagnement des réfugiés restent prioritairement mobilisés pour le financement des centres provisoires d'hébergement des réfugiés, à hauteur de 8 710 places. Ils sont complétés par des actions d'accompagnement spécifiques, qui progressent de 1,1 million d'euros. Une des meilleures illustrations de cet accompagnement est le programme Hébergement, orientation, parcours vers l'emploi (HOPE) mais, vous le savez, partout en France, d'autres initiatives sont soutenues ou méritent de l'être.

Le ministère de l'intérieur accompagne aussi la rénovation et la modernisation des foyers de travailleurs migrants. Depuis 1997, ce travail est réalisé dans le cadre d'un plan pluriannuel. Il concerne 690 foyers pour 100 000 travailleurs et travailleuses immigrés en France. En 2021, ce budget est maintenu à hauteur de 8,14 millions d'euros pour que nous puissions poursuivre le projet de rénovation et de modernisation, parfois urgent.

Pour conclure, je veux réaffirmer la volonté qui est la nôtre, avec le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, d'être juste dans notre action en faveur de celles et ceux qui rejoignent notre pays. J'ai détaillé récemment certaines mesures : l'accélération de la naturalisation des travailleurs qui étaient en première ligne pendant la période de confinement, la solennisation des cérémonies de naturalisation dans le sillage du discours du Président de la République au Panthéon, ainsi que d'autres mesures importantes d'intégration et d'accompagnement des étrangers.

Nous voulons être justes dans l'action que nous menons en faveur de celles et ceux qui rejoignent la République française, et faire en sorte qu'elle soit comprise et soutenue par le plus grand nombre. C'est aussi ce que nous nous évertuerons à faire. Je reste donc à votre disposition.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.