Je m'associe évidemment aux collègues qui ont rendu hommage à M. Samuel Paty, comme nous l'avons fait hier lors de l'examen d'autres crédits. Il ne faut pas oublier que ce qui fait vivre la fonction publique, ce sont avant toute chose des fonctionnaires, qui se lèvent chaque matin, non pas juste pour percevoir leur salaire à la fin du mois, mais pour faire vivre une idée du vivre ensemble et du bien commun que, j'espère, nous partageons tous dans le pays.
Pour en venir au programme 148, j'ai bien compris que chacun ici souhaite tenir un propos général sur la fonction publique. Je ne serai pas très long à ce sujet : je rappelle que j'étais en totale opposition avec la loi de transformation de la fonction publique, et je ne suis donc pas, non plus que le groupe de La France insoumise, pressé qu'elle soit mise en application. Que certains se plaignent de ne pas être associé à des ordonnances me fait sourire puisque c'est un peu leur principe… Si vous ne voulez pas vous trouver dans la position de l'arroseur arrosé, soyez donc plus prudent avant d'accepter le recours à des ordonnances !
S'agissant du programme 148, je note tout d'abord l'arrêt du déploiement du RIFSEEP, le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel, et la modification de l'indicateur de suivi. On nous dit que cela tient à un changement de politique. Il est vrai qu'au début de la législature, M. Gérald Darmanin, alors ministre du Budget, nous avait expliqué que le RIFSEEP n'était pas un bon système et qu'on allait sans doute le revoir. Où en est-on ? Êtes-vous vous-même satisfaite du RIFSEEP ? Produit-il ce que l'on escomptait : favoriser la mobilité au sein de la fonction publique de l'État ? Je ne le pense pas, mais peut-être avez-vous des éléments à ce propos.
Par ailleurs, c'est par ce biais du programme 148 que sont financés les IRA et de l'ÉNA. Je connais assez bien les IRA puisque j'en suis issu. Je ne suis pas le seul député à en être issu, et c'est tant mieux puisque c'est une formation de qualité. Le document budgétaire se contente de montrer qu'avec la réforme, les IRA coûtent un peu moins cher et qu'il y a deux sessions par an. Pouvez-vous être dresser un bilan plus précis ? Pour ma part, j'ai le sentiment qu'on a basculé vers six mois de formation initiale sans donner aux IRA les moyens suffisants pour un accompagnement individualisé lors des six mois suivants, passés au sein d'une administration dans laquelle il est prévu que l'élève stagiaire soit recruté à la fin. Au terme des six premiers mois, on lui dit en quelque sorte « au revoir, pourvu que la suite se passe bien ». Avant, les élèves effectuaient deux stages et acquéraient une petite expérience. On faisait preuve d'une certaine souplesse, en étudiant le profil des agents pour leur proposer les postes qui semblaient les mieux adaptés pour eux-mêmes comme pour l'administration, et cela débouchait sur une titularisation. Aujourd'hui, si vous ne convenez pas à l'administration dans laquelle vous êtes pré-affecté, vous en êtes exclus.
Vous avez donné au journal « Le Monde » une interview dans laquelle vous déploriez qu'il n'y ait toujours pas assez d'ouverture au sein de l'ÉNA et constatiez un certain conformisme sociologique. Je peux partager cette opinion, mais quelles sont vos perspectives ? Le financement des IPAG, les instituts de préparation à l'administration générale, des autres organismes de préparation et des classes préparatoires relèvent du programme 148. Que proposez-vous en la matière ? Souhaitez-vous que l'ÉNA puisse prendre sur dossiers des personnes issues des quartiers populaires ? Ou êtes-vous favorable au renforcement des dispositifs égalitaires afin que des gens issus des quartiers réussissent le concours et puisse accéder par cette voie à cette école prestigieuse ? C'est un vrai sujet et nous n'avons pas d'indications à cet égard.
Enfin, du fait de la covid-19, le nombre de contractuels explose dans un certain nombre d'administrations pour faire face à de nombreuses problématiques. Quelles sont les intentions de la DGAFP ? S'agit-il seulement de satisfaire un besoin ponctuel, avant de rouvrir au concours autant de postes que les années précédentes ? Ou s'agit-il d'atteindre le véritable objectif de la loi de transformation de la fonction publique en profitant de la crise sanitaire pour remplacer d'un coup tous les titulaires par des contractuels ?