Je salue l'excellente initiative des membres du groupe Agir ensemble, notamment de mon collègue et ami très cher – je n'ose dire « peuchère » – Christophe Euzet, rapporteur de la proposition de loi visant à promouvoir la France des accents, en assurant leur défense contre toute discrimination.
À l'accent, on peut reconnaître un Belge ou un Suisse, et facilement distinguer un Anglais d'un Américain. On peut aussi distinguer immédiatement l'origine provinciale ou régionale d'un Français. L'accent, richesse de nos cultures et de leurs origines linguistiques, ne doit en aucun cas provoquer la moindre discrimination. Tel est l'objet de la proposition de loi présentée par le groupe Agir ensemble. Elle complète harmonieusement, à mes yeux, l'effort consenti de longue date contre les discriminations de toute nature, amplifié par le Président de la République. Le groupe La République en marche s'associe au groupe Agir ensemble dans cette démarche, en un consensus parfait.
Essayons, puisque l'occasion se présente, de nous évader de l'aspect purement législatif de nos débats pour les humaniser quelque peu. Natif de la région des Hauts-de-France, toute mon enfance s'est bâtie à l'écoute des accents picard et ch'ti. L'accent, comme les langues régionales, représente pour moi une richesse immense, une culture qu'il faut préserver. Le plus célèbre, le plus charmeur et souvent le plus utilisé dans les blagues, en France, est à coup sûr l'accent marseillais. Combien de soirées délicieuses n'avez-vous pas passé en compagnie des œuvres et des films du génial méridional Marcel Pagnol ? Rappelez-vous : Marius, César, Fanny ! Rappelez-vous, dans Jean de Florette ou Manon des Sources, Yves Montand et Daniel Auteuil s'appliquant avec réalisme à reproduire l'accent méridional, l'accent chantant, qui donne force et charme aux personnages ! Et n'oubliez pas Jean Giono, dont les œuvres ont notamment inspiré Angèle, La Femme du boulanger et Crésus, où joue Fernandel ! Je ne peux évoquer ici toute la diversité de nos accents, parmi lesquels l'accent créole, qui me procure toujours une forte émotion.
Les accents naviguent toujours de conserve avec la langue d'origine, et l'histoire en ajoute souvent de nouveaux. Tel est sans doute le cas, de nos jours, du parler très vivant de certains jeunes dans les banlieues de nos grandes villes. La présente proposition de loi vise à protéger de toute discrimination les accents pratiqués dans les territoires français. Depuis une vingtaine d'années, grâce à plusieurs lois dont je vous épargne les intitulés, le Parlement a ciblé toutes les formes de discrimination fondées notamment sur l'origine, la langue parlée, l'âge, le handicap, la religion et l'identité sexuelle, en matière d'accès à l'emploi et au logement, d'éducation et de fourniture de biens et de services, tels que l'obtention d'un crédit.
Pour en venir au détail du texte, il convient d'ajouter à la liste des discriminations dressée à l'article L. 225-1 du code pénal la discrimination par l'accent. De même, il est indispensable de compléter l'article L. 1132-1 du code du travail, en y intégrant l'accent comme critère de discrimination dans l'accès à l'emploi. Ainsi, mes chers collègues, si, dans votre sagesse, en faisant abstraction de toute considération politique, vous adoptez les deux articles de la proposition de loi, il sera désormais possible d'interdire, voire de sanctionner toute discrimination due à l'accent, et par là même de défendre les cultures régionales. Le groupe La République en Marche apporte son soutien total à cette proposition de loi du groupe Agir ensemble et à son rapporteur Christophe Euzet.