Les objectifs principaux du projet de loi sont, d'une part, d'adapter notre législation à la création du Parquet européen et, d'autre part, d'améliorer les dispositifs actuels relatifs à la justice pénale spécialisée. Comme cela a été rappelé, le Parquet européen est chargé de rechercher, poursuivre et renvoyer devant la justice les auteurs d'infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union européenne – la fraude, la corruption ou la fraude transfrontalière à la TVA supérieure à 10 millions d'euros. Il sera aussi compétent pour diligenter des enquêtes, effectuer des actes de poursuite ou exercer l'action publique. Le groupe Agir ensemble, attaché au renforcement de notre identité européenne, se réjouit de la création de cette entité dotée de moyens et d'outils pour lutter contre la criminalité financière. C'est une nouvelle preuve de l'utilité de l'Union européenne, à l'heure où certains la remettent violemment en cause. La Commission européenne estime que la fraude transnationale représente une perte de 50 milliards d'euros de recettes de TVA pour les États membres et que les détournements de fonds européens sont estimés à 700 millions d'euros.
Avant d'aborder le projet de loi, nous souhaitons mentionner le rapport effectué par la commission des Affaires européennes, lequel rappelle quelques éléments fâcheux qu'il convient de citer. D'une part, cinq membres de l'Union européenne manquent à l'appel – la Hongrie, la Pologne, l'Irlande, la Suède et le Danemark. D'autre part, bien qu'aucun des vingt‑deux participants à ce Parquet européen ne soit anglophone, l'anglais sera la langue de travail. Même si le rapport précise que la maîtrise du français était irréalisable, la langue de Molière a encore perdu des points. Alors que 80 % des fonctionnaires européens sont francophones, le nombre de documents rédigés en français par la Commission européenne ne dépassait pas 3,7 % en 2016 contre 35 % en 1999.
Pour revenir au projet de loi, notre groupe relève qu'il assure un juste équilibre entre l'efficacité de la répression contre une délinquance astucieuse, largement internationale, et la préservation de l'autonomie et de la souveraineté de notre ordre judiciaire, puisque les juges du tribunal judiciaire de Paris demeureront compétents pour juger ces infractions et, le cas échéant, condamner leurs auteurs aux peines prévues par le code pénal. On constate une évolution pragmatique des compétences du procureur européen délégué, qui reprendrait des compétences du procureur de la République et du juge d'instruction dans certains cas. Cette évolution est‑elle un premier pas vers une remise en cause progressive du statut du juge d'instruction à la française ?
S'agissant de la lutte contre les atteintes à l'environnement, le projet de loi hisse notre organisation judiciaire à la hauteur de notre ambition politique et des attentes de nos concitoyens. Notre justice tient un rôle incontournable de régulation, en prévenant, en sanctionnant et en réparant les atteintes écologiques. Cependant, à ce jour, le contentieux environnemental représente seulement 1 % des condamnations pénales et 0,5 % des condamnations civiles, des chiffres qui ne reflètent pas la réalité des atteintes quotidiennement portées. Certaines exigent une réponse judiciaire effective, car elles constituent des dommages graves et irréversibles pour lesquels une réponse administrative est insuffisante.