Intervention de M'jid El Guerrab

Réunion du mercredi 20 janvier 2021 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaM'jid El Guerrab :

Nul besoin de rappeler l'importance, présente et future, de l'eau dans les grands enjeux géopolitiques du XXIe siècle. Le député des Français résidant en Afrique, que je suis, en sait quelque chose. Cette ressource est plus précieuse encore en milieu insulaire et lorsque les infrastructures sont vieillissantes.

En Guadeloupe, le service public de l'eau potable et de l'assainissement n'est pas à la hauteur de ce que nos compatriotes sont en droit d'attendre. Il présente des carences graves et structurelles qui entraînent des coupures fréquentes, d'ampleur et d'origine diverses. Ces difficultés de distribution sont exacerbées par la crise sanitaire. Le calendrier des « tours d'eau » censés pallier les coupures récurrentes n'est plus respecté et des secteurs entiers sont privés d'eau courante pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

La Guadeloupe est pourtant un territoire riche en eau, bénéficiant d'une pluviométrie élevée et de nombreuses rivières. Toutefois, la ressource est inégalement répartie sur l'archipel, la Basse-Terre représentant 90 % du volume d'eau prélevé, ce qui implique d'importantes infrastructures pour desservir la Grande-Terre et l'agglomération de Pointe-à-Pitre, centre économique du territoire. En 2016, la Guadeloupe a produit deux fois plus d'eau qu'elle n'en a consommé, mais le rendement de son réseau de distribution n'a été que de 50 % en moyenne, contre plus de 80 % au niveau national. Il est urgent d'agir et de rénover les équipements.

La résolution des dysfonctionnements administratifs et humains suppose une gouvernance forte, incompatible avec un paysage institutionnel éclaté. Les carences d'ordre technique ne peuvent être résorbées qu'au prix de lourds investissements ; les autorités organisatrices n'ont pas les capacités de les financer et les autres collectivités, au premier rang desquelles le département et la région, n'ont juridiquement pas vocation à y contribuer.

L'article 1er de la proposition de loi confie par conséquent la compétence à un syndicat unique mixte, composé du département et de la région Guadeloupe ainsi que de cinq communautés d'agglomération. Cet article est le fruit d'un long travail de concertation, engagé dès 2015. Nous pouvons nous réjouir que les établissements intercommunaux adhèrent à ce principe dans une quasi-unanimité.

L'article 2 permet d'associer la société civile à la supervision des activités du syndicat mixte en instituant une commission consultative. Ses membres pourront demander l'inscription à l'ordre du jour de toute proposition relative à l'amélioration des missions exercées par l'établissement. Alors qu'une certaine défiance envers la verticalité des décisions tend à s'installer, toute initiative visant à donner à la société civile voix au chapitre est bienvenue.

Nous devons préserver et entretenir cette ressource, ô combien vitale, source potentielle de tensions et de conflits entre nations. Antoine de Saint-Exupéry ne s'y était pas trompé en écrivant : « Eau, tu n'as ni goût, ni couleur, ni arôme, on ne peut pas te définir, on te goûte sans te connaître. Tu n'es pas nécessaire à la vie : tu es la vie. » J'ai toute confiance en l'expertise et la qualité du travail de fond de Mme Justine Benin. Le groupe Agir ensemble votera en faveur de la proposition de loi.

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