Intervention de Rémy Rebeyrotte

Réunion du mercredi 3 février 2021 à 11h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRémy Rebeyrotte, rapporteur :

Je partage l'approche de Pacôme Rupin envers France 3. Nous avons une longue discussion avec les représentants de la chaîne. Pour l'instant, son organisation prévoit une chaîne nationale avec des décrochages régionaux, qui sont contraints. Mais le projet de Mme Ernotte comprend l'inversion de la logique pour aller vers des chaînes régionales, avec des décrochages nationaux, ce qui entraînerait de profondes modifications.

Pour l'instant, des choix doivent être faits. Tout ce qui serait donné à des clips serait enlevé aux débats, aux journaux télévisés ou à d'autres émissions. Nous avons préféré privilégier les débats, qui nous semblent être un élément clé, avec les messages institutionnels sur l'importance de se rendre aux urnes ou la date des élections. Au second tour des élections municipales, ils ont été l'élément de campagne, dans cette absence presque totale de campagne que nous avons vécue, la campagne ayant eu lieu avant le premier tour. Nous n'étions pas alors dans la même configuration.

Les enveloppes budgétaires sont de plus contenues.

En outre, si nous conseillons aux candidats d'avoir des clips et s'ils sont financés dans les comptes de campagne, quels montants seront fixés ? Cela nécessite un travail en amont. Je rappelle que le texte permet simplement de reporter de trois mois une élection, qui aurait dû se dérouler en mars.

Il s'agira, monsieur Schellenberger, de la première campagne en mode covid. Le Sénat et nos collègues ont fait certaines propositions. Nous devons trouver des voies un peu différentes pour faire campagne. Il sera difficile voire impossible de faire du porte-à-porte ou des meetings de campagne.

Les élections partielles, notamment municipales, sont à la main des préfets. Ce sont eux qui décident, en fonction des circonstances sanitaires locales, ce qui me paraît une très bonne chose. Nous avons toujours ce débat, y compris au sein de notre commission, et il conviendra de le trancher un jour : quand il y a une adaptation locale, on crie à l'inégalité dans le territoire ; quand il n'y en a pas, on pointe l'absurdité du niveau national, dont les décisions ne correspondent pas à la situation locale. Il faudra un jour que nous comprenions qu'adapter les dispositifs sur le terrain n'est pas forcément une ignominie épouvantable et une remise en cause de l'égalitarisme sacré. On peut se dire jacobin ou girondin, mais il faudra reconnaître que s'adapter au terrain – comme le fait le texte pour les élections partielles municipales –, n'est pas nécessairement une mauvaise décision.

Je remercie le groupe du Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés pour ses nombreuses propositions, qui pourront accélérer la réflexion sur l'évolution et l'adaptation de notre droit électoral. Mais, si nous innovions avec un tel texte, par exemple avec le vote par correspondance, dont on a vu les limites dans le passé, avec le vote à distance ou le vote par anticipation, nous pourrions être accusés de manœuvrer. Ces modes d'adaptation demandent du temps, de la pédagogie, de la publicité, au bon sens du terme, auprès des électeurs, pour franchir le pas en toute connaissance de cause, pour l'organisateur, les candidats et les électeurs. On touche là à l'expression du vote, de la démocratie.

Je ne repousse donc pas ces propositions. La crise actuelle a d'ailleurs accéléré la réflexion du ministère de l'Intérieur, en particulier sur les machines à voter, le vote par correspondance ou un scrutin anticipé – on l'a vu faire dans d'autres pays. Il faut sécuriser le dispositif, notamment pour le vote numérique, afin d'être certains que l'expression ne puisse pas être truquée et dévoyée.

Pour ce qui concerne l'allongement de la campagne officielle, nous avons retenu et élargi des propositions du MoDem. De même, madame Karamanli, sur l'élargissement de la période de dépôt des candidatures, nous avons tenté de tenir compte de vos propositions pour sécuriser et améliorer l'organisation des élections dans cette période de covid-19. M. Lamirault avait également soulevé ces problèmes.

S'agissant de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, nous ne pourrons donner qu'un peu plus de temps, en raison du télescopage avec les élections présidentielle et législatives – M. Lachaud l'a rappelé. Nous n'avons pas de solution. Nous espérons que ce télescopage sera le plus réduit possible.

Nous souhaiterions qu'un remboursement des frais de campagne puisse intervenir dans des délais raisonnables, s'il n'y a pas contentieux. Cela est essentiel pour les candidats. Actuellement, des candidats aux élections municipales attendent encore des remboursements, ce qui est problématique tant pour les candidats que pour l'expression de la démocratie. À nous de veiller à ce que les frais de campagne soient remboursés le plus rapidement possible, s'il n'y a pas contentieux. Dans le cas contraire, il nous revient de limiter au maximum les répercussions sur d'autres campagnes électorales. C'est le problème du report : nous sommes bien conscients des limites en la matière.

Jean-Louis Debré a bien dit qu'il avait reçu une variété de points de vue, par exemple sur les dates des élections. Son travail a consisté à trouver un consensus. D'ailleurs, le texte que nous proposons se rapproche de la proposition du rapport Debré. En réalité, le Sénat s'en est largement exonéré. En disant que le rapport du Conseil scientifique devait porter sur le mode d'organisation des élections, non sur un point de la situation sanitaire du pays au 1er avril 2021, le Sénat a transformé l'esprit qui était celui de Jean-Louis Debré.

Pour Jean-Louis Debré, un point sanitaire est nécessaire, qui n'est pas une clause de revoyure automatique. Le Gouvernement et le Parlement en tirent les conséquences qu'ils souhaitent. Le Sénat voudrait que, même si l'état sanitaire est épouvantable, le Conseil scientifique, en lieu et place du ministère de l'Intérieur, se penche tout de même sur l'organisation d'élections à tout prix.

Certains ont plaidé pour un report plus long des échéances électorales des régionales et des départementales. D'autres sont obsédés par l'idée que le scrutin devrait se tenir au mois de juin, quoi qu'il arrive. C'est le cas de la majorité sénatoriale, qui semble vouloir favoriser les sortants. Nous ne sommes là ni pour favoriser les sortants, ni pour favoriser d'autres candidats, mais pour trouver un cadre, qui permettra l'expression, dans les meilleures conditions possibles, de la diversité du pluralisme politique à l'occasion de ces élections. Il nous revient d'avoir un texte qui n'écarte pas la question sanitaire et qui ne contienne pas de clause de revoyure automatique. Le Conseil scientifique n'est pas le Parlement, ni le Gouvernement, ni le ministère de l'Intérieur. Il aura un avis à donner mais c'est à l'exécutif et au législatif d'en tirer ou non les conséquences. Tel est l'esprit du rapport de Jean-Louis Debré.

Nous rappelons que nous souhaitons que les deux tours aient lieu en juin. On ne peut pas faire mieux. Le Gouvernement fera ensuite des propositions sur les dates retenues. Je rejoins ce que disait M. Lamirault, il faut que l'on sache assez vite quand les élections se tiendront, tant pour les candidats que pour les électeurs.

Quant au télescopage des élections qu'a évoqué M. Lachaud, nous sommes dans une logique de report, qui nous est imposée par la situation.

J'ai aussi répondu à M. Jumel, qui souhaitait « Debré, tout Debré, rien que Debré », – comme quoi les temps changent – et l'égalité entre les candidats.

Monsieur Molac, nous retenons votre proposition d'un guide harmonisé ou d'un mémento, également évoqués par Arnaud Viala. Il faut que les candidats sachent exactement comment les élections s'organiseront, et qu'ils connaissent les délais qui les concernent et les recours possibles. Sans préciser de date de publication, nous avons discuté avec la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, d'un guide bien fait répondant à votre sollicitation.

Nous sommes bien partis pour organiser les élections en juin. Nous espérons que la situation sanitaire et le constat qu'en fera le Conseil scientifique permettront l'organisation des deux tours en juin.

Enfin, nous avons discuté avec les associations d'élus pour déterminer la date de début des frais de campagne. La grande difficulté est que certaines personnes ont déjà engagé des frais de campagne depuis le 1er septembre, parce qu'elles pensaient, légitimement, que les élections se tiendraient en mars. Il serait délicat de changer les règles en cours de route et de leur demander de prendre ces frais à leur charge.

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