Au moment d'aborder le sujet sensible de la prescription, je rappelle qu'en 2018, nous avons allongé le délai de sorte que l'action publique peut désormais être engagée jusqu'aux 48 ans de la victime, étant précisé qu'il n'y a pas de limite dans le temps pour porter plainte. Il est important de le dire à nos concitoyens car les mécanismes de prescription sont devenus si complexes qu'on ne sait jamais à première vue si des faits sont prescrits ou non.
Cet allongement recouvre de nombreuses situations. Lors des auditions que j'ai menées, il est apparu que, sur la prescription, les avis sont divisés. Mais la quasi-totalité des magistrats et juristes rencontrés sont réservés quant à un nouvel allongement, voire une imprescriptibilité, à cause des difficultés pratiques auxquelles les confronte déjà l'allongement du délai lorsqu'il s'agit d'apporter la preuve des faits. Le vrai combat est celui-là : apporter la preuve et mobiliser la société, libérer la parole. Le véritable enjeu est que les gens parlent. S'ils l'avaient fait, dans de nombreuses affaires médiatisées, nous ne nous poserions pas la question de la prescription. C'est d'ailleurs, rappelons-le, une obligation lorsque des mineurs sont en jeu.
Je proposerai un mécanisme de prescription pour les infractions sérielles, commises par un auteur sur une multitude de victimes, dont il faut mieux tenir compte.
N'oublions pas, enfin, l'absence d'effet rétroactif : les faits qui sont prescrits le resteront. Dans l'affaire Duhamel, comme pour de nombreux faits révélés aujourd'hui, les faits ne seraient pas prescrits si la loi de 2018 avait été en vigueur à l'époque. Nous avons vraiment fait un pas en avant en 2018 ; il me paraît difficile d'aller plus loin.