Nous sommes appelés à examiner un texte qui apportera sans nul doute une nouvelle pierre à l'édifice de la décentralisation. L'objet du projet de loi organique est, ni plus ni moins, de permettre de recourir enfin – et réellement – à l'expérimentation territoriale, en ouvrant le cadre de la procédure de 2003. Celle-ci est trop restrictive : elle a considérablement limité le recours à l'expérimentation locale. En la matière, la loi organique de 2003, c'est un peu « je t'aime… moi non plus » ou la « Javanaise » : « J'avoue j'en ai bavé pas vous (…) / Avant d'avoir eu vent de vous » (Sourires).
Le premier des quatre axes du texte consiste à simplifier les conditions de déclenchement de l'expérimentation, en mettant fin au régime de l'autorisation préalable, pour lui substituer une procédure en vertu de laquelle toute collectivité pourra décider d'entrer dans une expérimentation par une délibération motivée, au lieu de demander au Gouvernement l'autorisation de le faire, en prévoyant que le préfet, et non plus le Gouvernement, vérifie, au titre du contrôle habituel de légalité, que la collectivité remplit les conditions législatives ou réglementaires de participation, en assouplissant le contrôle spécial de légalité sur les expérimentations, et en restreignant strictement aux délibérations des collectivités la faculté du préfet d'assortir son recours d'une demande de suspension.
Le deuxième axe vise à organiser davantage selon le droit commun le régime juridique des actes pris dans le cadre d'une expérimentation. La publication au Journal officiel sera réalisée à titre informatif, et les actes seront soumis au contrôle de légalité dans les conditions de droit commun.
Troisièmement, le texte ouvrira d'autres possibilités, comme madame la ministre l'a rappelé, à la suite des expérimentations locales, en sortant de la logique binaire actuelle – abandon ou généralisation. L'expérimentation pourra également aboutir au maintien des mesures prises à titre expérimental, pour les collectivités ayant participé à l'exercice et souhaitant le poursuivre, ainsi qu'à une extension à d'autres collectivités volontaires. La loi pourra également modifier les dispositions régissant l'exercice d'une compétence ayant fait l'objet d'une expérimentation réussie.
Le quatrième axe, ajouté par le Sénat, concerne la remise au Parlement de rapports permettant de suivre les expérimentations conduites et d'évaluer les processus de mise en œuvre.
Ma première conclusion, c'est qu'on ne remet pas en cause le principe d'égalité en droit. Toute collectivité pourra donner suite à une volonté d'expérimentation dès lors que différence de traitement est justifiée par un motif d'intérêt général lié à des différences de situation objectives. Mieux, on encouragera l'équité, aux côtés de l'égalité. Face à une difficulté propre à un territoire, identifiée par ses élus, l'expérimentation doit permettre de tenter d'apporter un remède – c'est extrêmement important.
Par ailleurs, on injectera une dynamique supplémentaire dans notre République décentralisée. Le projet vient du terrain, et gageons que l'expérimentation ne sera pas qu'une affaire de métropoles : cela peut être aussi une affaire rurale dès lors que de l'ingénierie est apportée à des élus locaux qui ont véritablement envie d'expérimenter et d'avancer face à un problème.
Enfin, on anticipera en ce qui concerne un des aspects du projet de loi « 4D », la différenciation positive.
Pour toutes ces raisons, le groupe La République en Marche votera ce texte, aux côtés de ses partenaires, et remercie le Sénat pour ses apports utiles.
Pourriez-vous préciser, madame la ministre, quelles dispositions du projet de loi « 4D » permettront d'approfondir le droit à la différenciation territoriale que nous appelons de nos vœux pour renforcer encore la dynamique locale ? Je suis de ceux qui pensent que si on poussait encore un peu plus loin l'initiative et l'innovation dans nos territoires, on pourrait peut-être gagner un ou deux points de croissance supplémentaire dans notre pays en soutenant véritablement l'expérimentation – je pense à l'économie circulaire ou à la dimension sociale. Ce sont autant d'enjeux à traiter si on veut aider le développement local de nos territoires.