Comme j'ai eu l'occasion de le dire en séance publique lors de l'examen de la proposition de loi de notre collègue Isabelle Santiago renforçant la protection des mineurs victimes de violences sexuelles, nous constatons une libération de la parole dans les livres, sur les réseaux sociaux et dans les familles. Les victimes dénoncent des crimes et se défendent avec des mots qui brisent leurs chaînes, celles du silence et de la souffrance ; ces mots les réparent un peu ou beaucoup, mais jamais totalement.
Aider à réparer, à se reconstruire, à surmonter la honte et la douleur, à redonner du sens à la vie quand l'enfance a été niée, piétinée, volée, violée : tel est notre devoir de législateur. Le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés travaille depuis longtemps sur ce sujet douloureux et extrêmement important. Il y a trois ans, lors de l'examen de la loi Schiappa renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, nous avions d'ailleurs clairement appelé à un débat de fond sur les violences sexuelles faites aux mineurs. Nous avions notamment insisté sur la nécessité de prévoir un âge de non-consentement pour les mineurs de quinze ans.
Si la proposition de loi de notre collègue sénatrice Annick Billon répond en partie à notre souhait en fixant un seuil de non-consentement, nous souhaitons cependant que ce dernier passe de treize à quinze ans. C'est la raison pour laquelle notre groupe soutiendra l'amendement de réécriture de l'article 1er déposé par le Gouvernement. Cet amendement essentiel constitue une véritable avancée : il permet d'aller plus loin et de faire mieux que ce que nous proposent nos collègues sénateurs. Outre l'interdit clair, pour un majeur, d'avoir des relations sexuelles avec un mineur de moins de quinze ans, qui sera inscrit dans le code pénal, une soupape de sécurité est prévue afin de préserver les amours adolescentes entre des mineurs dont l'un devient majeur : tel est le but de l'instauration d'un écart d'âge maximal de cinq ans. Le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés soutient non seulement ce principe, mais aussi l'écart de cinq ans proposé. Notre position est liée à la nécessité de respecter les exigences constitutionnelles ainsi qu'à notre absolue conviction qu'il ne faut pas pénaliser des relations consenties entre adolescents parce que celles-ci déplairaient à un tiers pour des raisons de discrimination raciale, sexuelle ou autre.
L'amendement du Gouvernement prévoit une interdiction tout aussi claire de tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis par un majeur sur un mineur lorsque l'auteur est un ascendant. Cela va dans le bon sens, mais nous avons déposé un sous-amendement visant à élargir le périmètre de l'inceste pour y englober, notamment, les actes perpétrés par les oncles, tantes, frères et sœurs, ou par toute autre personne exerçant sur le mineur une autorité de droit ou de fait.
Par ailleurs, il nous semble indispensable d'intégrer, dans la définition du viol, les actes bucco-génitaux, qui n'apparaissent pas dans l'amendement du Gouvernement portant réécriture de l'article 1er. Il est très important, à nos yeux, de protéger les petites filles de la même façon que les petits garçons. La jurisprudence a démontré ses failles en la matière.
Notre groupe est également favorable au maintien de l'infraction d'atteinte sexuelle, que le Gouvernement propose de dénommer « abus sexuel ». C'est indispensable pour sanctionner non seulement des faits commis par le passé, mais aussi des faits susceptibles d'être commis dans le futur et qui ne tomberont pas sous le coup des nouvelles incriminations.
Enfin, nous soutiendrons le mécanisme de prescription prolongée des viols sur mineurs dans sa version issue de l'amendement du Gouvernement. Il s'agit là encore d'une avancée importante.
Nous saluons le travail de concertation mené en amont de l'examen de cette proposition de loi. Nous remercions M. le garde des sceaux pour son écoute et pour la prise en compte de nos attentes dans les amendements du Gouvernement. Nos remerciements vont également à Mme la rapporteure. Après les dysfonctionnements observés lors de la discussion de la proposition de loi de Mme Isabelle Santiago, il est de notre responsabilité de nous rassembler pour aboutir à un texte pertinent, juste et bien écrit. Nous devons protéger les mineurs et punir fermement tous ceux qui viendront briser leur innocence. Le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés sera au rendez-vous.