Intervention de Danièle Obono

Réunion du mercredi 3 mars 2021 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Il est heureux que se dégage enfin, au sein de l'Assemblée nationale, une majorité pour réaffirmer l'interdiction des violences sexuelles sur mineur. Tel n'était pas le cas il y a deux ans et cette évolution est sans doute à porter au crédit, non seulement de ceux de nos collègues qui sont à l'origine de ces propositions de loi, mais aussi et surtout des spécialistes, des associations et des collectifs de victimes qui ont maintenu une pression constante, accrue par les révélations médiatiques et l'écho de plus en plus important rencontré par la parole des victimes. Nous saluons donc cette avancée du Gouvernement et des majorités de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Le groupe La France insoumise est cependant très mécontent de la manière dont les débats se déroulent. Il y a trois semaines, nous examinions, dans cette même salle, une autre proposition de loi portant sur le même sujet qui, si elle n'a pas obtenu la faveur du Gouvernement, a néanmoins recueilli l'unanimité des suffrages de l'Assemblée nationale. Elle aurait pu être encore amélioré par le Sénat. Par respect pour le travail parlementaire, on aurait dû permettre qu'elle aille au bout du processus législatif. Au lieu de cela, nous sommes amenés à discuter d'un texte qui est en réalité une proposition de loi gouvernementale, puisque le Gouvernement propose de la récrire entièrement. De ce fait, non seulement celui-ci est dispensé de nous soumettre une étude d'impact – comme il y est tenu dans le cadre d'un projet de loi –, mais nous en sommes réduits à déposer des sous-amendements sur les amendements du Gouvernement. En définitive, tout le monde s'y perd : les parlementaires, les professionnels du droit et les associations ! Cette méthode nous semble dommageable tant au travail parlementaire qu'au résultat final de nos travaux.

Quoi qu'il en soit, un certain nombre de points restent à clarifier : le seuil d'âge est fixé à treize ans alors qu'il nous semblait que l'on avait évolué à ce sujet ; s'agissant de la connaissance de l'âge de la victime, il nous semble nécessaire de renverser la charge de la preuve ; le quantum des peines, vingt ans de réclusion dans les deux cas, n'établit pas de distinction entre le viol sur mineur et le viol incestueux sur mineur ; enfin, la protection des lanceurs et lanceuses d'alerte est insuffisante – je pense en particulier au cas, récemment médiatisé, de la pédopsychiatre Eugénie Izard, sanctionnée par l'ordre des médecins après avoir dénoncé des maltraitances et des suspicions d'inceste.

Il y aurait donc beaucoup à faire pour compléter le travail déjà accompli. Hélas, la méthode choisie ne nous permet pas de régler l'ensemble des questions qui doivent l'être !

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