Intervention de éric Dupond-Moretti

Réunion du mercredi 3 mars 2021 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Nous avons aussi auditionné, réuni les associations et entendu, notamment, le Dr Salmona, qui défend avec passion la prise en compte du syndrome d'amnésie post-traumatique. Je vous sais aussi convaincus qu'elle. Mais il existe des divergences au sein de la communauté scientifique. Or, je ne veux pas d'un texte qui ne reposerait pas sur un constat unanime.

J'estime que vos propositions se heurtent au principe de légalité criminelle. La notion d'amnésie traumatique n'est pas, en outre, une notion juridique ; elle est susceptible d'imprécisions et d'incertitude. Elle pourrait introduire une forme de rupture d'égalité entre les différentes victimes, selon que le syndrome serait constaté ou non, et selon la date de ce constat. Tout cela est bien trop imprécis pour être du droit.

Je ne doute pas que ce syndrome existe et explique, sur le plan psychologique ou psychiatrique, un certain nombre de situations. Du reste, il est reconnu par la société. Aujourd'hui, plus personne ne dit, comme on l'entendait autrefois dans les prétoires, que si la victime n'a pas dénoncé immédiatement les faits, c'est qu'elle y a consenti. On sait désormais à quel point il est difficile de libérer la parole et que des faits que l'on ne peut regarder en face sont très profondément refoulés. On le dit. Mais en droit, ce n'est pas possible. La loi pénale, ce n'est pas cela. C'est donc presque contre ma conscience que j'émets un avis défavorable.

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