Cette proposition de loi vise à lutter contre les individus violents lors de manifestations – sujet ô combien important et d'actualité. Les manifestations en France connaissent, ces derniers temps, une montée des violences : des individus agressent les forces de l'ordre, brûlent le mobilier urbain et pillent les commerces qui ont le malheur de se trouver sur leur parcours. Ces destructions et affrontements sont devenus quasi systématiques ; ils relèguent désormais au second plan les revendications des manifestants pacifiques. Prenons l'exemple des black blocs, qui utilisent un mode opératoire visant à causer le plus de dégâts possible. Ils ont laissé plusieurs fois derrière eux des paysages de désolation, lors de manifestations contre la loi Travail, célébrant le 1er mai ou encore celles des gilets jaunes. Depuis le quinquennat de François Hollande, ce constat est devenu la norme à chaque manifestation.
Le Gouvernement et la majorité ne sont pas toujours très à l'aise avec ces questions. Elles appellent pourtant des réponses de bon sens, garantissant la sécurité et l'ordre public. La liberté de manifester et la liberté d'expression ne permettent pas tout. Agresser un fonctionnaire de police ou de gendarmerie n'est pas faire usage de sa liberté de manifester. Brûler un abribus ou un engin de chantier, piller un magasin ou saccager un lieu public n'est pas faire usage de sa liberté d'expression. C'est de la violence pure et simple. Le rôle de l'État est de tout faire pour l'empêcher, ce qui revient précisément à garantir le droit de manifester et la liberté d'expression.
Depuis les manifestations contre la loi Travail, les médias n'ont plus qu'un seul axe d'information lorsqu'il s'agit de couvrir une manifestation : le nombre de dégradations et d'interpellations. Or cela contrevient à l'intérêt des manifestants, dont les revendications ne sont plus reprises, ou alors de manière anecdotique. La sécurité des manifestants pacifiques est également mise en danger par les agissements de ces individus violents, dont le seul but est de casser et de défier les forces de l'ordre. Voter en faveur de mesures de lutte contre les violences commises pendant les manifestations, c'est s'engager pour le droit à manifester et la liberté d'expression.
Devant l'urgence d'agir, pour ne pas laisser les mains libres aux casseurs et aux pilleurs, le groupe Les Républicains au Sénat a déposé, en 2018, une proposition de loi. Alors qu'elle avait été adoptée, le Conseil constitutionnel a décidé de la censurer partiellement avant son entrée en vigueur, l'année suivante. Ce texte avait pourtant pour objet de renforcer et de garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations, en donnant des instruments légaux aux autorités pour mettre hors d'état de nuire les casseurs et les agresseurs des forces de l'ordre.
Cette proposition de loi prévoyait, entre autres dispositions, de donner la possibilité aux policiers, en cas de risque de trouble à l'ordre public, de contrôler les effets personnels des passants ainsi que les véhicules circulant ou stationnant à l'entrée d'un périmètre délimité, pendant les six heures précédant le début de la manifestation et jusqu'à sa dispersion. L'objectif était d'empêcher l'accès à une manifestation aux personnes détenant, sans motif légitime, des objets pouvant constituer une arme. Il en était de même pour le fait de détenir ou de faire usage, sans motif légitime, de fusées d'artifice ou de toute arme par destination. Ce délit devait être puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Enfin, selon le principe du casseur-payeur, le texte prévoyait la possibilité pour l'État de se retourner contre les auteurs des dommages.
En première lecture à l'Assemblée nationale, des modifications ont été adoptées. Elles concernaient la suppression du périmètre de sécurité lors des manifestations, l'allègement des procédures de déclaration préalable d'une manifestation, la création d'un fichier de personnes interdites de manifester et la suppression de l'article relatif aux fusées d'artifice –article finalement incorporé dans la proposition de loi relative à la sécurité globale.
Le texte adopté par le Parlement prévoyait également la possibilité, pour le préfet, d'interdire à une personne constituant une menace pour l'ordre public de manifester. Cette interdiction pouvait s'étendre à tout le territoire national. C'est cette disposition que le Conseil constitutionnel a décidé de censurer, jugeant que le législateur portait au droit d'expression collective des idées et des opinions une atteinte qui n'était pas adaptée, nécessaire et proportionnée.
Afin de répondre à cette censure, le groupe UDI-I a déposé la proposition de loi que nous étudions aujourd'hui. Elle vise à lutter contre les individus violents lors de manifestations, en introduisant la possibilité d'une interdiction pour ces derniers de participer à une ou plusieurs manifestations. Concrètement, les personnes constituant des menaces particulièrement graves pour l'ordre public et dont les agissements auront conduit à des violences ou des dégradations pourront se voir interdire, par un arrêté motivé du préfet, de participer à une manifestation au cours de laquelle de telles atteintes seraient susceptibles d'avoir lieu. Ces personnes pourront également se voir interdire de prendre part à toute manifestation sur l'ensemble du territoire national, pour une durée ne pouvant excéder dix jours. Le non-respect de ces interdictions sera puni de trois ans d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. Au moment de ces manifestations, ces personnes, à l'image des mesures prises à l'égard des hooligans dans le monde du football, pourront être amenées à pointer au commissariat de police.
Cette proposition de loi de nos collègues UDI-I reprend la volonté et le dispositif inclus dans la loi dite anticasseurs de nos collègues sénateurs du groupe LR. Les députés du groupe LR voteront donc pour cette proposition visant à renforcer le dispositif législatif existant.